David Kimelfeld  : "La Métropole ne concentre pas tout pour elle"

Premier vice-président à la Métropole de Lyon, en charge du développement économique, David Kimelfeld estime qu'en matière d'évolution des emplois privés marchands, l'agglomération se place plutôt bien à l'échelle nationale. Cette lecture qu'il fait de la dernière analyse de l'Insee valide selon lui la stratégie de filières engagée depuis quinze ans par l'exécutif de l'agglomération.

Acteurs de l'économie-La Tribune : L'analyse que l'Insee consacre à l'évolution des emplois salariés marchands dans la métropole de Lyon comptabilise 3 000 établissements et 4 000 emplois supplémentaires, en moyenne annuelle sur la période 2003/2013. Ce qui correspond à un taux de progression respectif de 3,5 % et 1 %. En la matière, l'agglomération ne fait ni mieux ni moins bien que les autres grandes métropoles françaises où le tissu économique est dynamique. Est-ce satisfaisant ?

David Kimelfeld : Ce n'est jamais satisfaisant. Mais, à l'échelle nationale, la Métropole se place plutôt bien. Cette évolution valide la stratégie engagée depuis quinze ans. Elle repose sur la dynamique de filières économiques qui s'imbrique dans la dynamique démographique. Les sciences de la vie, la santé humaine, l'action sociale, les secteurs de l'hébergement et de la restauration enregistrent les croissances les plus importantes.

Nous devons être en mesure d'attirer des entreprises et également de répondre aux besoins de celles qui déménagent pour grandir. Ces dernières créent le plus d'emplois d'après l'étude de l'Insee. Dans sa précédente analyse de juin cet organisme montrait que le taux de survie à trois ans des jeunes sociétés était inférieur dans les grandes agglomérations par rapport aux autres territoires. Il faut également que nous portions les efforts de nos dispositifs d'accompagnement "post création" au-delà de trois années.

L'Insee relève que dans l'industrie les nouveaux établissements compensent tout juste les 14 % qui disparaissent en moyenne annuelle. Comment faire mieux  ?

L'appel à projets des 30 lancé en septembre 2014 pour la Vallée de la Chimie est destiné à muscler l'appareil productif même si c'est compliqué. Les projets commencent à prendre tournure. Le préfet est en train de finaliser le volet PPR (Plan de prévention des risques, NDLR) et nous pourrons ainsi arrêter les implantations fin 2015 ou début 2016.

David Kimelfeld

Il ressort de l'étude que l'effet d'entraînement de la Métropole dépasse ses frontières. Etes-vous surpris ?

Le constat est intéressant. La Métropole ne concentre pas tout pour elle. Elle attire à ses portes des entreprises qui s'implantent ou investissent. C'est vrai pour le groupe allemand Fresenius Medical Care qui crée une nouvelle unité à l'Arbresle pour sa filiale SMAD. S'il n'y avait pas eu la Métropole, Bledina aurait-il choisi de déménager son siège caladois de 25 km à Limonest ? Ne serait-il pas parti ailleurs ?

Venons-en aux dossiers sensibles. A commencer par Renault Trucks dont les restructurations successives auront entraîné la suppression de 2 200 postes selon la CFE-CGC. Vous interrogez-vous sur la pérennité de ce groupe dans l'agglomération lyonnaise ?

La CFE-CGC nous a remercié, tout comme l'Etat et la Région, de l'action que nous avons menée auprès du groupe dans le cadre du dernier PSE. Il s'annonçait socialement lourd mais le nombre de licenciements secs a été réduit à 25. Renault Trucks demeure un employeur important et un donneur d'ordres pour de nombreux sous-traitants. Il fait partie de l'histoire. Quel Lyonnais n'a pas eu un membre de sa famille employé chez Berliet ?

Nous devons resserrer nos liens avec les responsables locaux et les dirigeants de Volvo. Nous devons être très présents auprès du pôle LUTB (Transport & Mobilty Systems). Solutrans, le salon professionnel du transport, que nous voulons accompagner est un autre signe fort à donner à Volvo. C'est vrai, le poids lourd est une filière que l'on a sans doute tendance à mettre moins en avant car elle "brille" moins que le numérique par exemple.

Cenntro Motors France est promis à la liquidation, sans doute le 29 octobre. C'est la triste chronique d'une reconversion ratée, celle de l'usine FagorBrandt, alors que cette reconversion avait une valeur emblématique. Que va devenir ce site dont le terrain appartient aujourd'hui à la Métropole ?

C'est un échec. J'ai du mal à comprendre comment l'actionnaire (Cenntro Motors Group) a investi plus de 10 millions pour arriver à ce résultat. Nous ne nous posons pas aujourd'hui la question de la vente du terrain. Il est classé en zone Ui et on ne modifiera pas le plan local d'urbanisme. Toutefois si ce tènement industriel ne trouve pas preneur au bout de cinq ou six mois, alors nous aviserons.

En absorbant les compétences du Département du Rhône sur son périmètre, la Métropole a récupéré la gestion du RSA (Revenu de solidarité active) qui fait débat car il coûte de plus en plus cher aux départements. Pour la Métropole, la courbe de progression des dépenses (220 millions en 2015) liées à ce dispositif oscille entre 7 et 10 % et cette hausse n'est pas non plus compensée par l'Etat. Comment pouvez-vous aider les allocataires à trouver plus rapidement un travail ?

Nous avons lancé une grande concertation qui se terminera le 26 novembre par une séance plénière présidée par Gérard Collomb. Et un plan métropolitain d'insertion et de l'emploi sera adopté en décembre. Nous allons nous appuyer sur le levier de notre développement économique pour faire en sorte que notre priorité soit le retour à l'emploi mais aussi à l'activité pour ceux qui sont trop éloignés de l'emploi. L'activité, qui peut prendre différentes formes n'est pas suffisamment valorisée dans le parcours du RSA. A la Métropole nous allons élargir nos clauses d'insertion avec les coopératives d'activités et d'emploi (groupements économiques solidaires, NDLR). Veolia a accepté de réserver dans son campus d'entreprise un certain nombre de places à ce public. Nous discutons aussi avec EDF ou encore la Compagnie Nationale du Rhône. Et des secteurs en tension, comme les services à la personne, l'hôtellerie, la restauration sont susceptibles d'offrir des opportunités à des allocataires du RSA avec une formation professionnelle adaptée.

La Métropole veut également mettre en place un nouvelle gestion de l'insertion en s'imposant comme chef de file...

Il faut simplifier l'organisation sachant qu'aujourd'hui on dénombre 145 acteurs dans le domaine de l'insertion. Dans la même logique la Métropole prendra la gestion des fonds européens dédiés à l'insertion des publics fragiles le 1er janvier 2017. Les trois PLIE (Plans locaux pluriannuels pour l'insertion et l'emploi) n'auront plus à gérer les dossiers FSE et il a fallu les en convaincre. Leur plus value, c'est la proximité et le lien avec la population. Certains allocataires n'ont plus d'emploi depuis 10 ans et ces personnes requièrent une attention particulière. Il faut d'abord les aider à se reconstruire plutôt que les envoyer faire un énième CV. La Métropole a une attitude modeste dans l'approche du RSA.

[Lire l'étude de l'Insee] >> Créations d'établissements dans le Grand Lyon : un effet métropole.

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