Cet hiver, on chaussera avant tout les skis de randonnée ou encore les raquettes... Au Vieux Campeur, la tendance est unanime : « Beaucoup de gens souhaitent redécouvrir le ski de randonnée, qui progresse très fortement cette année, d'autant plus que la neige s'y prête. Mais c'est aussi le cas pour le ski de fond, qui connaît un renouveau, ainsi que la raquette à neige », reconnait Aymeric de Rorthays, le directeur général et petit fils du fondateur, Roger de Rorthays.

Avec, du côté des chiffres, un bond de +60% dans le domaine des raquettes à neige et du ski de randonnée, ou encore de +90% pour le matériel de randonnée (tentes, sacs de couchage, chaussures de randonnée...), nécessaire aux excursions. A tel point que sur certaines gammes de produits, comme les raquettes à neige produites en France par la marque TSL (Annecy), ont même connu des épisodes de pénurie...

« Heureusement, nos bonnes relations avec ce fournisseur stratégique nous ont permis de solutionner le problème rapidement. On peut dire que l'on connaît actuellement l'une des plus grosses années de la raquette à neige », confirme-t-il.

Et pour cause : dispensés de remontées mécaniques, mais avides de grand air après plusieurs semaines de confinement, les pratiquants -et même les novices- se sont tournées naturellement vers des pratiques dites plus « libres », redevenues tendance et accessibles. Et ce, au détriment du matériel de ski de piste, dont les ventes sont à l'arrêt.

Une deuxième saison en janvier ?

Alors qu'une large partie de ses magasins se trouvent au pied des stations de sport d'hiver, et notamment à Sallanches, Albertville, Chambéry, ou encore Grenoble, le spécialiste de l'outdoor constate déjà que la saison 2020-2021 ne sera pas comme les autres.

Même si la neige, relativement abondante, est déjà de la partie : « Il y a aura peut-être une deuxième saison à compter de la mi-janvier... Mais pour l'instant, on en sait rien, tout peut encore arriver », admet Aymeric de Rorthays. Les deux confinements ont en effet eu un impact majeur sur ses ventes.

« Les consommateurs achètent des produits dont ils ont besoin, ce qui fait qu'à chaque fois que l'on a interdit la pratique, les ventes ont chuté, y compris sur le site marchand », avance le directeur général du Vieux Campeur.

La même tendance s'observerait d'ailleurs lors des prises de parole du gouvernement français, effectuées aux différents stades de l'épidémie : « Après chaque conférence de presse, la clientèle réagit dans un sens ou dans un autre. Ce qui est sûr, c'est que le jour même, notre journée est très mauvaise ».

La prudence reste de mise sur l'ouverture des remontées

« 90 % du matériel que nous vendons aujourd'hui est destiné à la randonnée, alors que cela représente habituellement 50 % de l'équipement vendu », ajoute Aymeric de Rorthays. Les distributeurs pourraient même grignoter des parts de marché sur le secteur de la location du matériel outdoor, habituellement proposée en stations.

Pour autant, Aymeric de Rorthays ne crie pas victoire trop vite. D'autant plus que sa division liée aux voyages, qui représente habituellement 30 % de son chiffre d'affaires, se trouve complètement à l'arrêt depuis plusieurs semaines. Et elle le sera pour encore au moins six mois, estime le directeur général du Vieux Campeur.

« Aujourd'hui, on ne peut aller nulle part, que ce soit dans un pays du Grand Nord ou dans un pays chaud, ce qui a un impact direct sur une large gamme de produits, allant jusqu'aux anti moustiques ou aux vêtements les plus chauds », avance-t-il.

Attendue, pour l'heure, aux alentours du 7 janvier prochain, la reprise des stations de ski demeure toutefois empreinte d'incertitude. Un travail « d'équilibre » a donc déjà commencé pour les enseignes comme Au Vieux Campeur, « avec des familles de produits qui explosent à +30% et d'autres qui s'effondrent à -90%. Il faut pouvoir s'adapter ». Pour l'instant, le réseau a recouru au chômage partiel, et a demandé un PGE qu'il n'a finalement pas encore consommé. Juste au cas où.

+ 65% de ventes en ligne

Pour lisser les déconvenues, le réseau Au Vieux Campeur a toutefois pu compter sur le levier des ventes digitales, qu'il a activé depuis 2012. Il dispose désormais de 150.000 produits référencés sur son site internet. Un pari qui semble payer puisque durant le mois de novembre, les ventes en ligne ont bondi de +65%, tandis que l'enseigne table sur une progression globale de +35% sur l'ensemble de l'année 2020, ce qui devrait représenter 10% de son chiffre d'affaires (contre 5% l'an dernier).

D'abord à petits pas, mais surtout grâce à coup d'accélérateur posé il y a 18 mois. « Nous voulions offrir sur internet le même niveau de conseil et la vision d'ultra spécialiste qu'au sein de nos magasins », confirme le directeur général.

Cela se traduit notamment par la mise en place d'un chat communautaire, permettant aux clients d'échanger directement entre eux sur les produits proposés, mais également l'accès à des guides techniques développés en interne, « et qui ont la signature de nos vendeurs en magasin », souligne-t-il.

Aymeric de Rorthays milite d'ailleurs pour une enseigne qui se veut désormais multicanale, reposant sur les vendeurs en boutique, qui réceptionnent et enverraient plus de la moitié des commandes passées sur internet. « Cela ne part pas d'un entrepôt logistique, pour nous il s'agit du même métier ». S'il demeure discret sur les chiffres, le directeur général estime toutefois que cette stratégie digitale représente « le même type d'investissement » que d'ouvrir une boutique physique.

Deux ouvertures en 2020

L'enseigne, qui fêtera ses 80 bougies l'an prochain, se pose avant tout comme un spécialiste de l'outdoor au sens large, avec ses 450 salariés pour 50 magasins. On en oublierait presque qu'elle est d'abord née à Paris, dans une boutique de 23m2, située en plein coeur du Quartier Latin, et qui abrite désormais un village d'une trentaine de magasins...

« Nous ne revendiquons aucune origine, si n'est la nature et l'outdoor. À l'époque où nous avons démarré, nous faisions déjà des activités de plein air, mais ce domaine était moins marketé qu'aujourd'hui. Depuis, on a vu apparaître de nouvelles activités, nous en proposons au total une vingtaine », résume le petit fils du fondateur.

Le réseau n'a pas d'ailleurs pas baissé les armes cette année, en confirmant l'ouverture de deux magasins, que l'on pourrait penser diamétralement opposés : à savoir un corner de 150m2 au sein des galeries Printemps, ainsi qu'une boutique de 700m2 située au pieds des Hautes-Alpes, à Gap depuis le 28 novembre dernier.

Mais pour son directeur général, c'est bien là toute la force du modèle : « Depuis l'essor du click and collect, on a constaté que l'on pouvait fonctionner avec des surfaces de magasins inférieures à 1.200 mètres carrés. Nous n'avions pas ouvert de nouvelles boutiques depuis 2013, mais nous avions là deux opportunités qui correspondaient bien à nos cibles ».

Une fois la crise passée, il sait déjà que certaines régions, comme Bordeaux ou Nantes, sur lesquelles il dispose d'un vivier de pratiquants, pourraient même constituer de nouveaux relais de croissance.