Budget : la Métropole de Lyon se dote d'un PPI axé sur la "relance écologique"

Décryptage. Ce lundi, l’exécutif écologiste conduit par Bruno Bernard a soumis au vote son plan pluriannuel d’investissements (PPI) à l’échelle du mandat. Adopté par la majorité de gauche, ce PPI doit traduire les grandes lignes de la nouvelle équipe EELV aux commandes, qui ne cache pas sa volonté de repenser le fonctionnement de la métropole. L’opposition dénonce quant à elle manque d’ambition sur ce budget, ainsi qu’un flou sur la nature des projets qui seront soutenus par la métropole au cours des six années à venir.
La nouvelle programmation pluriannuelle votée par la majorité écologiste de la métropole de Lyon, chiffrée à 3,6 milliards d'euros sur les six prochaines années, s'inscrit dans un contexte sanitaire encore fragilisé, qui se traduit par une hausse de l'endettement de la collectivité.
La nouvelle programmation pluriannuelle votée par la majorité écologiste de la métropole de Lyon, chiffrée à 3,6 milliards d'euros sur les six prochaines années, s'inscrit dans un contexte sanitaire encore fragilisé, qui se traduit par une hausse de l'endettement de la collectivité. (Crédits : ML)

C'était une étape attendue dans l'installation de la nouvelle équipe écologiste à la tête de la métropole de Lyon. Ce lundi, l'équipe conduite par le président EELV Bruno Bernard a dressé les grandes lignes de son budget 2021-2026, qui doit comprendre à la fois les principaux investissements, mais également les recettes prévues à l'échelle de ce mandat pour atteindre l'objectif fixé par cette nouvelle majorité : à savoir « la relance écologique et solidaire ». Et ce, en pleine période de pandémie, à l'aube d'un possible 3e reconfinement...

« Nous sommes, je le crois, la première grande métropole du pays à voter notre budget et notre PPI, il s'agit d'un choix de relance économique du territoire car nous avons besoin que l'activité reprenne. Dès 2021, ce sont 650 millions d'euros d'investissements qui seront réalisés sur notre territoire, alors qu'en début de mandat précédent, on était plutôt à 400 millions », a introduit Bruno Bernard.

Cette nouvelle programmation pluriannuelle, chiffrée à 3,6 milliards d'euros sur les six prochaines années (dont 1,8 milliard d'euros d'investissements), doit permettre à la nouvelle municipalité écologiste de traduire en actes ses ambitions selon trois axes affichés : à savoir des investissements dans le domaine de la transition écologique, des solidarités, mais également des 59 communes qui la composent. Avec, parmi les premiers postes d'investissement, l'urbanisme (944 millions), le domaine des déplacements et mobilité (579 millions d'euros), l'habitat (518 millions), l'environnement, l'énergie et l'agriculture (517 millions) et le développement économique, l'insertion et la recherche (392 millions).

Avec, à la clé, des dépenses de fonctionnement qui grimpent de +3,6% par rapport au budget 2020 (tous budgets confondus) et de +4,6% pour le seul budget principal. Une situation qui s'expliquerait, selon l'exécutif, principalement par la hausse du nombre d'allocataires du RSA (+7%) suite à la crise sanitaire actuelle, qui fait grimper la facture pour la métropole de 44,3 millions d'euros. Mais le volet social fait justement partie des priorités que s'est fixées ce nouvel exécutif EELV, qui propose notamment l'augmentation des aides accordées dans le cadre du Fonds de Solidarité pour le Logement (FSL), le lancement d'un Revenu de solidarité Jeune pour un montant de 10 millions d'euros pour sa première année de mise en place en 2021.

Les grands axes de la « relance écologique »

Avec également, une volonté affichée de placer la lutte pour l'amélioration de la qualité de l'air dans le haut de la liste. Pour cela, la nouvelle majorité compte notamment s'appuyer sur le grand plan d'investissements annoncé par l'autorité régulatrice des transports en commun le Sytral (et dont Bruno Bernard avait également pris la présidence à la rentrée) à hauteur de 2,5 milliards d'euros sur la période 2021-2026, mais également la mise en œuvre de la ZFE (zone à faibles émissions), ou encore d'une enveloppe de 200 millions d'euros pour les modes actifs (marche à pied, vélo)... Mais aussi, sur des projets (encore non identifiés précisément), concernant « la lutte contre le dérèglement climatique » ou encore une plus grande « végétalisation de la métropole ».

Sur le volet économique, le Grand Lyon annonce « la création d'un nouveau pôle entrepreneurial libre », ainsi qu'un renforcement de l'accompagnement de la transition écologique au sein de la Vallée de la chimie, ou encore de la mise en place d'un schéma des achats responsables, afin de donner la possibilité au nouvel exécutif d'inclure des clauses de RSE et environnementales au sein des futurs achats publics.

Dans le domaine de l'habitat, ce PPI confirme également « la poursuite et l'amplification » de dispositifs d'isolation des bâtiments comme ÉcoRénov et de la prime à bois, qui demeure « un enjeu majeur pour lutter contre la pollution aux particules fines » ainsi que la création de nouveaux équipements énergétiques (réseaux de chaleur, stations d'épuration).

Sur le volet urbain, ce PPI se traduira également la création de 5.000 logements sociaux par an, ainsi que 1.000 logements en accession, ainsi que la poursuite de la rénovation urbaine de plusieurs quartiers (Part-Dieu, Confluence, Villeurbanne, etc). Ces mesures s'appuieront sur un principe de dissociation entre la propriété du foncier et celle du bâti, « permettant de diviser quasiment par trois le prix d'accès à la propriété » et qui sera engagée à l'échelle du mandat à travers l'Organisme de foncier solidaire de la Métropole de Lyon (OFSM), créé à l'automne 2019, et qui sera pour cela renforcé par une enveloppe de 40 millions d'euros.

117 nouveaux emplois pour appuyer la stratégie

En matière d'emploi également, ce plan pluriannuel se distingue par la volonté de proposer la création de 117 nouveaux postes à l'échelle métropolitaine, dont la vice-présidente aux RH Zemorda Khelifi rappelle « qu'ils seront chargés d'accompagner la réalisation du plan de mandat ». Ce sera par exemple le cas de la création d'un poste de de directeur de l'eau potable - suite au passage de l'eau en régie publique à compter de 2023-, ainsi que de plusieurs chefs de projets destinés à suivre des dossiers clés de cette nouvelle municipalité, tels que les enjeux d'agriculture et alimentation, d'économie sociale et solidaire, de végétalisation, ainsi que certains projets comme la ZFE ou encore la Brigade du logement,  « qui sera chargée de mettre en œuvre la politique d'encadrement des loyers votée par la métropole ».

Malgré un contexte financier contraint et un autofinancement brut réduit de moitié au cours de l'année 2020 pour atteindre 322 millions d'euros, la nouvelle équipe a augmenté sa ligne d'investissements de 3% par rapport à la PPI votée en 2015.

Pour cela, la métropole devra, en même temps, faire l'exercice de rationaliser ses coûts, mais aussi de s'endetter davantage. Dans les faits, ses capacités d'autofinancement ont en effet chuté à 344 millions d'euros (contre 546 millions en 2019), avec, en premier lieu, une diminution des recettes fiscales liée notamment à la baisse des recettes des droits de mutation (DMTO), consécutive à la crise sanitaire qui a vu le nombre de transactions immobilières chuter.

Même si cet aspect demeure à nuancer : « On s'aperçoit que, par rapport au compte administratif 2019, le nombre de transactions a bien diminué, mais par contre, la valeur des biens a augmenté. C'est la même chose sur la TVA, où l'on observe pour l'instant plutôt une augmentation par rapport à 2019. Mais nous ne sommes pas encore capable de dire ce qu'il en sera pour 2021 », précisait le vice-président aux finances, Bertrand Artigny.

D'autant plus que d'un autre côté, les métropoles s'attendent toujours à une baisse significative des recettes issues des taxes foncières et d'habitation, tandis que des interrogations concernant la réaffectation des recettes de la TVA de la part de l'Etat.

Un changement de style assumé face à l'opposition

La nouvelle équipe métropolitaine attend également plus de précisions sur l'affectation des fonds du dispositif France Relance, allouables aux collectivités, ainsi qu'aux volets du plan destiné à la rénovation énergétique des bâtiments, pour 13 milliards d'euros.

« En attendant, nous avons surtout cherché à diversifier nos emprunts », confirme le vice-président aux finances, Bertrand Artigny, qui annonce que la collectivité regarde également de très près la possibilité de recourir à des obligations dites vertes, qui seront fléchées vers des opérations directement liées à la transition écologique.

« Notre endettement est aujourd'hui d'environ 2 milliards d'euros contre 1 milliard précédemment, sur une durée de 6 ans, ce qui est quand même très confortable par rapport à des situations qu'on peut connaître au sein d'autres collectivités », rapporte-t-il.

En effet, la métropole de Lyon peut encore pour l'heure s'appuyer sur des conditions de financements favorables de sa dette (1,41% contre 1,69%), en vertu de la notation obtenue depuis plusieurs années par l'agence de notation Fitch, qui demeure parmi les meilleurs scores accordés à une collectivité territoriale.

L'opposition de droite et du centre n'a toutefois pas manqué de dénoncer le caractère « flou » et « imprécis » de cette nouvelle PPI, le président du groupe d'opposition de la droite et du centre Louis Pelaez allant jusqu'à affirmer que « le monde économique économique ne dispose ainsi d'aucune visibilité sur les opérations qui seront lancées ». L'ancien maire Gérard Collomb a quant à lui estime « qu'il ne s'agissait pas d'une PPI, mais tout au plus un vague élément de cadrage. Celle de 2015 comprenait 1175 projets, dont 670 territorialisés ! ».

L'exécutif écologiste s'est montré quant à lui offensif au cours de cette présentation du futur PPI à la presse : « La précédente PPI était composée d'un îlot de 1.175 projets, dont plusieurs centaines n'ont pas été réalisés. Il est ainsi facile de faire du consensus de cette manière, puisqu'en gros, tous les projets qui remontaient des communes, on le mettait dans le PPI », a tranché Bruno Bernard.

Qu'importe le fait que ce projet n'ait été voté cette fois à la majorité (83 voies pour, 50 contre, 10 abstentions) et non plus à l'unanimité comme l'ont fait remarquer l'opposition, le président EELV veut avancer et renvoie ses opposants à leurs retranchements. Avec une volonté de se différencier non seulement sur le contenu, mais également sur la méthode, Bruno Bernard a admis avoir bâti cette année « une PPI probablement plus politique », tout en précisant sa volonté de « travailler et de créer un lien de confiance avec chaque maire du territoire ».

« Nous sommes passés d'une addition politique communale d'investissement, à une vision métropolitaine. (...)Les projets existent, et sont même encore au-dessus du budget : il va donc falloir prioriser et travailler territoire par territoire ».

Une clause de revoyure concernant les investissements à prioriser a d'ores et déjà été actée d'ici les deux prochaines années, afin d'adapter le plan de mandat en fonction de la crise sanitaire.

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