Près de Grenoble, Bombardier veut s’implanter... sur la friche Ascometal

EXCLUSIF. L’information a fuité par le biais des syndicats : le géant des transports québécois Bombardier, actuellement en phase de rachat par Alstom, projette de s'implanter sur un site industriel basé au Cheylas (Isère), près de Grenoble. Et selon nos informations, c'est la friche industrielle d’Ascometal, une ex-usine de forges et de hauts fourneaux centenaire, qui a remporté l'adhésion du fabricant québécois.
D'après nos informations, Bombardier Transport aurait choisi le site centenaire de la friche Ascometal du Cheylas, aujourd'hui transformé en une pépinière d'entreprises, pour y installer des activités de maintenance et de rétrofit d'ici 2022/2023.
D'après nos informations, Bombardier Transport aurait choisi le site centenaire de la friche Ascometal du Cheylas, aujourd'hui transformé en une pépinière d'entreprises, pour y installer des activités de maintenance et de rétrofit d'ici 2022/2023. (Crédits : DR)

Tout juste un siècle après sa naissance en 1921, le site Ascometal du Cheylas (Isère), près de Grenoble, pourrait bien poursuivre sa renaissance avec une jolie prise.

Cette friche industrielle de la vallée du Grésivaudan, qui accueillait jusqu'en 2015 l'usine des Forges et Hauts-Fourneaux d'Allevard, avait été contrainte de fermer ses portes, malgré le projet de reprise mené par l'investisseur Franck Supplisson.

Depuis 2017, elle avait été rachetée par un entrepreneur immobilier à la tête de la société SLS, Mathieu Janin, qui voulait transformer ses 30 hectares et 40.000 m2 de bâtiments industriels en une pépinière d'entreprises. Aujourd'hui, son pari est déjà presque rempli puisque SLS Actiparc Sillon Alpin, de son nouveau nom, accueille déjà une quarantaine d'entreprises, spécialisées dans le domaine de l'énergie et de la métallurgie.

Si une partie de ces sociétés souhaitent demeurer discrètes, on dénombre parmi elles non seulement des artisans, chaudronniers, tuyauteurs, et ateliers mécaniques sur ce site, mais aussi des acteurs innovants, à l'image de la pépite Sylfen. Cette spin-off du CEA Leti développe par exemple une solution hybride (batterie électrique-hydrogène) de stockage pour le milieu du bâtiment.

« Nous avons construit ce site artisan par artisan et brique par brique, toujours en vue de bâtir un écosystème d'entreprises autour des activités de l'énergie et du ferroviaire », reconnait son propriétaire, Mathieu Janin, qui propose uniquement des baux de location.

Un emplacement doublement stratégique

Ce n'est donc pas tout à fait un hasard si ce site à forte empreinte industrielle intéresse aujourd'hui un géant comme Bombardier Transport. La région Auvergne Rhône-Alpes constituerait en effet un emplacement stratégique pour le groupe, qui recherchait depuis quelques années à s'implanter au centre de la France, en vue de pouvoir adresser les commandes de son client SNCF, au plus près du sud de la France.

Après avoir communiqué des marques d'intérêts à l'égard d'une possible reprise des ACC de Clermont-Ferrand, spécialisés dans la maintenance ferroviaire, le groupe québécois pourrait finalement trouver chaussure à son pied, toujours en Auvergne Rhône-Alpes, mais cette fois-ci, du côté de Grenoble.

Avec un atout de taille pour le site d'Ascometal, rebaptisé SLS Actiparc Sillon Alpin, puisque celui-ci dispose déjà d'une grande proximité avec une liaison ferroviaire encore en service et offre même un embranchement privé à la ligne de chemin de fer Grenoble-Chambéry.

Bombardier Transport, dont le rachat par le groupe français Alstom devrait être officialisé le 29 janvier prochain, pourrait d'ailleurs en profiter pour sécuriser sa présence sur ce second site, avant l'issue de la transaction, d'autant plus qu'il s'agirait d'une location.

Car le groupe québécois ne disposait jusqu'ici que d'une seule usine en France, située à Crespin, près de Valenciennes (Hauts-de-France). Cette usine, elle-même deux fois centenaire (ex-Ateliers de construction du Nord de la France, ANF) affiche déjà un carnet de commandes fermes, bouclé jusqu'en 2025. Et disposait ainsi de peu de marges de manoeuvre pour étendre ses travaux de maintenance.

De source syndicale, ce second site servirait alors à nourrir les ambitions du groupe Bombardier Transports dans le domaine de la rénovation des tramways, mais aussi du rétrofit des trains régionaux. Un marché en pleine expansion, du fait de l'ancienneté du matériel roulant utilisé actuellement, et qui nécessite une maintenance d'étape au bout de 20 ans.

Un marché en plein essor du rétrofit ferroviaire

Les représentants du personnel CFDT ont en effet confirmé, d'abord par le biais des réseaux sociaux dès le 12 janvier dernier, puis par voie de presse, que le groupe nourrissait le projet d'implanter en Isère un nouveau site de rénovation destiné à ses tramways, et TER AGC (aussi nommés Autorails grande capacité), appelés à passer du diesel à l'électrique.

L'horizon de ce projet, qui a été présenté au Conseil social et économique (CSE) de l'entreprise, serait prévu pour 2022 à 2023, avec près de 120 nouveaux emplois à la clé.

Selon nos sources, près de 6 millions d'euros pourraient être investis par le géant des transports, pour équiper et transformer progressivement ces locaux destinés à accueillir du matériel ferroviaire. Au moins deux bâtiments de 200 mètres de long seraient concernés par cette opération.

Les travaux pourraient même débuter sous peu, et viseraient en premier lieu l'ouverture d'un premier bureau d'ingénierie d'ici l'automne. Pour l'instant, ni la direction de Bombardier en France ou à Montréal n'ont confirmé, ni démenti cette information.

Selon Pascal Lussiez, secrétaire de la CFDT Bombardier, l'un des principaux clients du groupe, la SNCF, s'est déjà engagé à se retirer du diesel d'ici 2030 sur son matériel roulant. « Alstom travaille déjà sur des solutions hydrogène, tandis que Bombardier développe des trains bimodes, fonctionnant avec des systèmes hybrides embarquant une batterie électrique ». Et d'ajouter : « L'une des prochaines révolutions à venir sera que les nouveaux trains AGC pourront se recharger en roulant, avec des bougies à aimants permanents ».

Et à ce titre encore, Bombardier pourra trouver matière à justifier son choix grenoblois puisqu'en plus d'un site où siègent déjà des entreprises du secteur de l'énergie, l'écosystème local s'avère particulièrement dense. La région auralpine réunit en effet près de 80% des acteurs de l'hydrogène de l'échelle nationale, tandis que Grenoble est particulièrement bien placé dans le domaine de l'énergie, avec un certain nombre de grands groupes (Schneider Electric, Air Liquide, Symbio, McPhy, etc) mais aussi un écosystème de recherche particulièrement spécialisé sur ces nouvelles énergies, avec le CEA Liten et la présence de pôles de compétitivité régionaux comme Tenerrdis, dans le domaine de la transition énergétique. « Aujourd'hui, des bus fonctionnent déjà avec cette technologie hybride, mais ce n'est pas encore le cas des trains, où il reste des développements à réaliser », confirme Pascal Lussiez.

Selon lui, la région Auvergne Rhône-Alpes s'avère très comparable à celle des Hauts-de-France, « où il existe un passé industriel et des savoir-faire locaux, avec un bassin d'emploi intéressant dans le domaine du ferroviaire ». De quoi trouver chaussure à son pied et redonner une âme industrielle à une portion de ce site, empreint d'histoire.

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Commentaire 1
à écrit le 16/01/2021 à 9:02
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Cette vallée est engorgee en terme de circulation. Pour limiter les effets de bouchon et de pollution dans la cuvette grenobloise, il faudrait qu'ils s'installent dans des friches industrielles mais loin de la metro, en plaine de Bievre pourquoi pas....

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