Idex Lyon Saint Etienne : Après un vote négatif, le projet définitivement stoppé ?

Le conseil d'administration de l'Université Jean Monnet à Saint-Etienne vient de se prononcer contre les statuts de la future université cible, se retirant ainsi définitivement du projet Idex Lyon Saint-Etienne. Le projet peut-il néanmoins se poursuivre ? C'est ce qu'espèrent les acteurs lyonnais du dossier.
La nouvel établissement labellisé Idex aurait dû accueillir 140.000 étudiants.
La nouvel établissement labellisé Idex aurait dû accueillir 140.000 étudiants. (Crédits : Martine Leroy)

A Saint-Etienne (Loire), c'est définitivement non. Après plusieurs mois de polémiques auxquelles ont pris part les personnels de l'Université Jean Monnet, les étudiants, les acteurs économiques, les élus et les acteurs nationaux de la recherche, le Conseil d'Administration de l'université stéphanoise s'est enfin prononcé ce vendredi 23 octobre. Et c'est non, à une écrasante majorité de 22 sur 34 votes.

Fusion contestée

"Nous avions senti, dans la dernière ligne droite, que nous remportions de plus en plus d'adhésions. Nos arguments ont pesé, tout comme la communication inappropriée de la présidente Michèle Cottier. De plus, les interventions extérieures, notamment celles des chefs d'établissements lyonnais ont été très mal perçues en interne", analyse Stéphane Riou, ex vice-président en charge de la Recherche, démissionnaire et membre fondateur du collectif UJM, créé il y a quelques mois pour s'opposer au projet.

Ce projet devait mettre en œuvre la fusion des universités Jean Monnet, Lyon 1, Lyon 3 et l'École Normale Supérieure de Lyon au sein d'un seul établissement, nommé Université cible. Une fusion exigée par le jury international de l'Idex pour obtenir le fameux label, mais qui ne pouvait s'opérer sans l'accord du conseil d'administration de chacun des établissements.

Cette fusion supposait que l'Université stéphanoise perde sa personnalité juridique et morale. C'est sur ce point précisément que se sont concentrées les inquiétudes des opposants au projet.

"Bien que le projet puisse sembler séduisant, il est apparu nettement que Saint-Etienne Métropole, en tant que membre du CA de l'UJM, ne pouvait voter favorablement les statuts de la future entité. (...) Le texte ne présentait pas les garanties suffisantes pour assurer une gestion optimale du campus stéphanois répondant aux intérêts des étudiants et des enseignants. Ce faisant, l'attractivité de l'UJM s'en trouvait sérieusement altérée", a ainsi rappelé Gaël Perdriau, le maire de Saint-Etienne, dans un communiqué diffusé vendredi soir à l'issue du Conseil d'administration.

Le Département et la Région se sont alignés sur cette position. Sollicitée à plusieurs reprises sur ce dossier par La Tribune, mais peut-être embarrassée politiquement par un projet la tiraillant entre les positions de ses interlocuteurs lyonnais et stéphanois, la Région n'a jamais donné suite pour faire connaitre sa position officielle sur l'Idex Lyon Saint-Etienne.

Stop ou encore ?

Ce vote, prononcé au lendemain du vote positif du CA de l'Ecole Normale de Lyon, met définitivement fin au projet Idex Lyon Saint-Etienne. "C'est un mal pour un bien", écrit le député ligérien Régis Juanico sur sa page Facebook. "Ceux qui ont été mis de côté dans le processus Idex, comme Lyon 2 ou Sciences Po Lyon vont pouvoir repartir sur un nouveau projet de coopération renforcée et faire du sur-mesure".

En réalité, présentée jusqu'ici comme certaine en cas de vote négatif d'un des quatre établissements, l'interruption du projet Idex ne semble désormais plus si évidente.

"Je souhaite que l'Idex continue", confie ainsi à la Tribune Frédéric Fleury, président de l'Université Claude Bernard Lyon 1. "Il crée un établissement expérimental qui fera parti des cinq meilleurs français. Nous n'avons pas à subir les conséquences du choix de Saint-Etienne, que je respecte".

Avec 80.000 étudiants, 8.000 salariés et 90 unités de recherche, ce nouvel ensemble lyonno-lyonnais serait suffisant, selon lui, pour "conserver tout le potentiel jusqu'ici envisagé avec Saint-Etienne". Pour le président de Lyon 1, "le départ de Saint-Etienne est regrettable après quatre ans de travail en commun, validé régulièrement par toutes les instances de l'établissement. Saint-Etienne apportait la dimension territoriale avec des forces complémentaire aux établissements lyonnais, ainsi que son expérience d'université multidisciplinaire adossée aux forces économiques locales, mais son départ ne change pas fondamentalement ni la masse critique académique, ni les statuts".

Et de préciser qu'un temps de réflexion sera nécessaire mais que, pour lui, le projet Idex Lyon conservait toutes ses chances." Nous verrons comment le Ministère et le SGPI vont se positionner".

Dans un communiqué publié à l'issue du vote, la Ministre de l'enseignement supérieur et de la Recherche, Frédérique Vidal, annonce justement que les conséquences de ce vote seront tirées dans les prochains jours.

Pourrait-elle revenir sur l'obligation de la fusion, avec la perte de personnalité juridique et morale comme demandé initialement pour la labellisation Idex et ouvrir ainsi de nouveau la porte à Saint-Etienne?

"Non, cela m'étonnerait beaucoup. Il s'agit d'un jury international. L'Etat n'est pas intervenu pour Toulouse par exemple, il ne le fera pas pour Saint-Etienne. En revanche, la demande des Lyonnais était prévisible ", explique Michèle Cottier, présidente de l'Université Jean Monnet.

Et d'ajouter : "Qui pouvait sérieusement penser que les Lyonnais ne demanderaient pas l'Idex sans nous ? L'université stéphanoise ne pèse pas lourd, en termes de masse critique, au regard des établissements lyonnais. Ils décrocheront l'Idex sans nous. Nous allons désormais devoir vivre avec cet échec".

Saint-Etienne, isolée?

Pour la présidente, les prochains mois risquent d'être complexes pour l'Université Jean Monnet. "Nous avons laissé passer une opportunité. Il sera désormais difficile de travailler avec les autres établissements de l'Idex, nous ne sommes plus un partenaire de confiance à leurs yeux. Et nous serons même en compétition avec eux".

Chez Jean-Michel Mis, député (LREM) de la Loire, la déception est également perceptible. "Nous aurions pu faire notre entrée dans le Top 100 du classement de Shangaï. Nous allons continuer de n'être, même pas, dans les 1.000 premiers".

Frédéric Fleury se veut rassurant, mais donne néanmoins le ton, sans détour. "Le projet Idex prévoit de nombreux partenariats avec tous les acteurs de l'enseignement supérieur et de la recherche. Les collaborations continueront demain au sein d'un système universitaire qui comprendra un établissement de rang mondial et qui bénéficiera à tout le territoire. Rien ne changera fondamentalement en ce domaine. Saint-Etienne sera naturellement un de ces partenaires mais ne pourra plus participer à définir la stratégie académique et ne pourra bénéficier des moyens Idex. Elle devra trouver sa propre trajectoire".

Dans cette nouvelle trajectoire stéphanoise, quelle sera la position de Michèle Cottier sa présidente, qui n'a pu faire accepter sa vision ? "L'opposition est-elle une question de projet ou de personne ? Je vais analyser et prendre le temps de la réflexion pour agir au mieux dans l'intérêt de l'établissement", assure-t-elle.

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