Covid-19 : "Les arnaques aux entreprises restent classiques même si elles prennent le nom de la crise"

En plus de devoir gérer la baisse d'activité, la fermeture prématurée, la gestion des équipes à distance, les entreprises doivent également faire face aux risques d'attaques malveillantes, quelles qu'en soient leurs formes, rappelle le général Philippe Guimbert, commandant de la région de Gendarmerie Auvergne-Rhône-Alpes.
(Crédits : DR)

La Tribune : Depuis le début du confinement, la gendarmerie met en garde les entreprises et appelle à la vigilance. En quoi cette période de crise est propice à la (cyber)criminalité ?

Général Guimbert : La crise sanitaire est une aubaine pour les criminels, et notamment la cybercriminalité. En période de crise, les gens sont plus vulnérables. S'ils appliquent les gestes barrières en matières sanitaires, ils sont moins vigilants en matière informatique : le maintien de l'activité par le télétravail est une bonne solution, mais cela comporte certains risques.

Il faut éviter d'utiliser son ordinateur personnel, sécuriser sa connexion wifi à la maison, bien quitter son poste de travail, ne pas échanger de documents sur des réseaux mal sécurisés... il est bon de rappeler que les entreprises peuvent être des cibles potentielles et qu'elles doivent penser aux gestes simples à faire appliquer. Et puis il y a toutes les entreprises fermées, des dirigeants vulnérables qui peuvent se faire arnaquer.

Avez-vous d'ores et déjà enregistré une augmentation des plaintes ?

Pour le moment, nous n'avons pas encore de données consolidées. Ce qui est certains, c'est qu'il y a une augmentation des faits : des ventes illégales de médicaments, des arnaques totales de ventes de masques et de protections, de fausses boutiques en ligne, des appels aux dons détournés et toujours des escroqueries financières et des techniques « d'hameçonnage », via des mails, des SMS ou des appels téléphoniques destinés à obtenir des données personnelles, professionnelles ou bancaires. Tout ceci est gérée par notre équipe de cybergendarme, très active à Lyon. Cette cellule édite d'ailleurs tous les 15 jours un bulletin d'information qui récapitule les bons gestes. Nous les transmettons à tous les relais d'information auprès des dirigeants

Ce contexte inédit pousse-t-il à de nouvelles formes d'attaques ?

Les arnaques restent classiques même si elles prennent le nom de la crise. Elles tournent autour des produits, des masques, des gels ou des gants mais les menaces restent les mêmes.

Face à cette crise, quelles mesures concrètes avez-vous mis en œuvre ?

Nos relations avec le monde économiques sont solides et historiques. Nous entretenons des liens réguliers avec les grandes entreprises, les PME et les TPE de nos territoires, avec les CCCI, les organisations patronales, le monde agricole. Dans ce contexte de crise, il est important que notre institution s'engage encore davantage pour protéger le potentiel économique local.

Nos commandants de groupement ont des contacts réguliers avec cet écosystème, ils expliquent et proposent aux entreprises notre "opération tranquillité entreprise". C'est un dispositif qui existe depuis 2012 - qui a d'ailleurs été proposé à l'origine par un gendarme de notre région avant d'être étendu à tout le territoire - et que nous avons densifié depuis 4 semaines et qui permet à tout dirigeant de signaler, gratuitement et près de chez lui, la fermeture de sa société mais aussi des événements particuliers, comme la livraison de matériels sensibles, comme les masques par exemple. Ces éléments sont intégrés aux actions de terrains.

Dans le même esprit, nous allons étendre ce dispositif au BTP et lancerons très prochainement, en partenariat avec la Fédération du bâtiment, une "opération tranquillité chantier". Nous la déploierons surtout dans le cadre de la sortie progressive de la crise. Nous répondrons également présents à ce moment-là : la remise en route nécessitera aussi la sécurisation d'un certain nombre de sites, c'est très important.

Une attaque liée au télétravail

  • Le 7 avril dernier, une société étrangère propose par mail à un commercial en télétravail d'acheter des produits de protection individuelle (masques, gel hydroalcoolique et gants stériles). Une commande est passée et un virement de près de 140 000 euros est réalisé. Rapidement, la banque de l'entreprise victime signale le caractère douteux de la transaction. Une plainte est immédiatement déposée auprès de la gendarmerie. La coopération judiciaire européenne permet le blocage rapide des fonds sur un compte hongrois. L'enquête est en cours.

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