Montagne : la crise du Covid-19, et après ?

Envisager l'avenir malgré l'incertitude. Telle est désormais la mission des responsables de stations de sports d'hiver alpines et des représentants du secteur de la montagne. Car après avoir publié plusieurs prévisions quant à l'impact de cette crise sanitaire sur la fin de saison, la saison estivale est déjà dans les esprits, malgré une sortie de crise très incertaine.
(Crédits : Licence CC0 Domaine public)

Après l'annonce d'une fermeture brutale des bars et restaurants, ainsi que des lieux jugés "non-indispensables à la nation" à la mi-mars, les stations de sports d'hiver alpines ont dressé un premier bilan des pertes accumulées il y a quelques jours en raison de leur fermeture anticipée. La plupart des stations ayant, à l'origine, prévu de fermer à la mi-avril, voire début mai.

Il pourrait se résumer en quelques chiffres : soit 800 millions d'euros sur le territoire de l'Observatoire Savoie Mont Blanc pour la saison 2019/2020, tandis que chez son voisin isérois, Isère Tourisme estime que le niveau des pertes pour l'industrie touristique attendrait  118 millions d'euros rien qu'au mois de mars, et 135 millions si le confinement se poursuivait jusqu'à fin avril. Le syndicat Domaines Skiables de France (DSF), qui rassemble près de 200 entreprises de remontées mécaniques à l'échelle nationale, table quant à lui sur près de 1,5 milliards d'euros de dépenses touristiques, tous domaines confondus, qui vont faire défaut à l'échelle de l'Hexagone.

Pour autant, le regard des acteurs du secteur est déjà tourné vers l'avenir, malgré un certain nombre d'incertitudes. Car la saison d'été, qui démarre généralement à la mi-juin, pour se poursuivre jusqu'à la mi-septembre, pointe déjà le bout de son nez. Sera-t-elle suffisante pour espérer un rattrapage des pertes réalisée sur la fin de l'hiver ?

Tout dépend en premier lieu des acteurs concernés : car si certains acteurs comme les remontées mécaniques réalisent 98% de de leur chiffre d'affaires en hiver (hors station de Chamonix), d'autres secteurs, d'autres, comme l'hôtellerie-restauration ou l'industrie des loisirs, pourraient paradoxalement voir leur activité estivale en partie boostée par le contexte actuel.

Une opportunité pour le tourisme de proximité ?

Car alors que les stations entament depuis plusieurs années une transition vers le tourisme toutes saisons, avec le développement de nouvelles activités plein air (circuits de VTT, trail, etc) ainsi qu'une rénovation voire une montée progressive en gamme des hébergements traditionnels et collectifs, cette stratégie pourrait bien servir cette année, à attirer de nouveaux publics en montagne.

"Les Français seront probablement plus réticents à l'idée de partir à l'étranger, mais auront certainement envie de s'aérer après plusieurs semaines de confinement, avec des réservations de dernière minute notamment. C'est une tendance que l'on constatait déjà depuis quelques années, et qui pourrait se renforcer", juge Vincent Delaitre,  directeur d'Isère Tourisme, qui regroupe les 23 stations du territoire isérois.

Ce dernier mise notamment sur la clientèle de proximité, composée grandes villes situées dans un rayon de quelques centaines de kilomètres des massifs, qui pourraient choisir de se diriger au plus près de chez eux, tout en profitant des activités de plein air offertes en montagne.

Pour autant, Laurent Reynaud rappelle que la France pourrait elle aussi connaître, à l'inverse, une chute de la fréquentation de la part des touristes étrangers cet été, même si celle-ci demeure encore difficile à évaluer et devrait être variable en fonction des pays. Sans oublier certaines inconnues à ce jour :

"La perspective d'un possible report du calendrier des vacances scolaires, en cas de prolongement du confinement, pourrait également avoir des conséquences sur les réservations de début juillet, une période habituellement propice à l'hébergement en montagne", ajoute-il.

Des campagnes de communication réorientées

Isère Tourisme se tient néanmoins prête, et affirme travailler au lancement d'une campagne de communication plus courte mais massive, une fois la crise sanitaire passée, tout en misant sur le développement de dispositifs et plateformes favorisant également les courts et moyens séjours.

"Il nous a fallu adapter notre communication, afin de ne surtout pas être en décalage avec la période actuelle. Les gens ont aujourd'hui d'autre soucis, et il faut respecter ce droit au silence", atteste Vincent Delaitre.

Même position pour l'Observatoire Savoie Mont-Blanc, qui réaffirme, dans un communiqué sa volonté d'accompagner ses membres à travers cette période difficile, "en attendant l'opportunité de relancer la demande avec de puissantes campagnes de communication, une fois cette crise sanitaire sans précédent maîtrisée grâce à la solidarité de tous".

De mesures du gouvernement attendues

Demeure cependant une autre inconnue, qui pourrait dépendre de la stratégie annoncée par le gouvernement afin de soutenir les acteurs économiques.

 "Il va falloir se pencher sur la situation des résidences de tourisme, qui risquent de déposer le bilan si elles se retrouvent contraintes de régler, comme leurs contrats le prévoient, des loyers aux propriétaires alors que celles-ci n'ont enregistré aucune recette... ", rapporte Laurent Reynaud.

Selon lui, des discussions pourraient être engagées prochainement auprès de l'Etat afin que ces loyers "puissent être au minimum retardés, voire annulés", sous peine de voir un grand nombre de logements disparaître du marché très rapidement.

D'autant plus que les capacités d'hébergement, tous types de logements confondus, ne sont d'ores et déjà pas extensibles.

 "Il n'est pas possible de faire tourner un restaurant ou un hôtel à 150% de sa capacité", rappelle Vincent Delaitre.

DSF entrevoit également un autre enjeu, concernant le report des charges annoncé sur six mois pour l'ensemble des acteurs économiques.

"Un report sur six mois n'a pas grand intérêt  pour les entreprises de remontées mécaniques, qui, compte-tenu de leur activité saisonnière, ne reconstituent pas leur trésorerie avant le mois de décembre au minimum", affirme Laurent Reynaud.

Le syndicat milite ainsi pour un report des charges sur un an pour le secteur. Même si pour l'instant, le gouvernement n'a pas encore répondu à cette demande.

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Commentaire 1
à écrit le 30/03/2020 à 16:30
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Surtout que la vallée doit fortement s'enrichir de cette chute brutale de la pollution, c'est peut-être une année que vous n'aurez jamais connu de ce point de vu qualitatif là, que personne n'aurait du connaitre même, un sacré atout qui devrait vous ...

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