Accord CGPME/Medef pour la CCI de Lyon : « La hache de guerre prête à être déterrée »

« Le Medef Lyon-Rhône représente un patronat qui n'a pas de fantaisie ; il est une agglomération de mono-secteurs et n'a pas de contact direct avec les PME. Il n'est donc pas légitime à être leur porte-drapeau. Vous n'avez qu'à comparer les 150 personnes qui assistent à sa cérémonie des vœux aux 2000 qui partagent la nôtre », claque François Turcas.

Comment exister face à cette puissante CGPME, dont la convivialité, le réseau, la dynamique, le charismatique président, sont aux yeux des 3000 adhérents revendiqués plus essentiels que les assertions « poujadistes, populistes, clientélistes » ou le professionnalisme contesté des services et des mandataires ? Voilà l'équation que Bertrand Millet aimerait bien résoudre. Une équation d'autant plus compliquée que les deux organisations traquent le même public des PME et sont aujourd'hui ligotées par un pacte tacite de non-agression établi lors de l'élection consulaire. L'accord entre la CGPME et le Medef Lyon-Rhône pour la CCI de Lyon demeure salué. Principalement parce qu'il évite une guerre fratricide à laquelle la CCI stéphanoise n'a pas échappé et dont même le « business » aurait pu pâtir : « Vous imaginez le risque de mesures de rétorsion sur nous, sous-traitants de grandes entreprises dont certaines sont des leaders du Medef ? » interroge Jean-Jacques Charmes, secrétaire adjoint (CGPME) de la CCI et directeur général délégué de Sunkiss. « Cette union sacrée était capitale, y compris pour sauver une Chambre que l'année pré-électorale avait failli tuer » claque Jean-Paul Mauduy, dont la « reprise en main » de l'établissement est plébiscitée : « C'est une métamorphose » souligne t'on parmi le personnel consulaire. Néanmoins, cinq mois après sa conclusion, l'accord ne fait pas l'unanimité au sein du Medef. Pas plus d'ailleurs à la CGPME, dont le président François Turcas, longtemps engagé avec virulence à lancer la joute, doit désormais justifier la volte-face. Robert Paris, président du Medef Lyon-Rhône, « n'est pas emballé », Gilles Maurer, président de Syntec Rhône-Alpes, évoque un accord « tordu, stérile », et déplore comme beaucoup que le Medef ne soit pas allé « au combat ». L'écart, important, entre les confessions « off » et les discours officiels, policés, l'atteste : artificiellement créé, maintenu par un intérêt de circonstance et par la personnalité - appréciée au sein de la CGPME - de Jean-Paul Mauduy, l'accord demeure friable. « La hache de guerre apparaît enfouie. En réalité, le manche dépasse. A la moindre étincelle, elle sera déterrée » résume Gilles Maurer. Et les occasions ne manqueront pas : gestion des rapports de force, de la parité des postes, et de la frustration des membres opposés au mariage, passation de pouvoir au CGPMiste Guy Mathiolon en 2007, lobbying politiques à l'approche des élections municipales... A ce propos, Bertrand Millet, selon plusieurs témoins proches de Charles Million - il refuse l'étiquette mais se félicite que l'un de ses fils ait participé au dernier scrutin municipal sur la liste milloniste Amaury Nardone - ressuscitera t-il le dogmatisme politique au risque, le redoute l'un de ses « supporters », de mettre en péril l'œcuménisme politique en instance départementale ?

 

Le BTP « adversaire » du Medef ?

 

Les premières lézardes entre les deux organisations patronales sont palpables : le Medef Lyon-Rhône vient de se doter d'un  « chargé de relations », destiné à doubler le nombre d'adhésions directes, à ce jour seulement de 300 et apportées pour l'essentiel par la Garantie sociale des chefs d'entreprise. « Nous prospecterons dans le strict respect de nos statuts et en évitant de piocher dans les branches » assure son directeur général Nicolas Farrer. Pourtant, certaines entreprises adhérentes directes appartiennent à des branches - BPI et Altedia sont chez Syntec-. Cette stratégie commerciale fait enrager la CGPME, attaquée frontalement sur son territoire. «  Qu'ils s'y essaient. On va rire quand ils devront composer avec leurs branches... Ils peuvent investir le terrain de la représentativité des PME : nous les attendons... » prévient-on dans l'entourage de François Turcas. A la Fédération régionale des Travaux Publics, on juge « aberrant et regrettable » que ce même Nicolas Farrer considère cette branche comme un « adversaire », au seul motif que son président n'est autre que...Guy Mathiolon. « Ce comportement est symptomatique de la vive rivalité entre les deux organisations patronales » affirme son secrétaire général Jean-Louis Courbon. Lui-même « Medef ». « La paix des braves » entre les deux organisations patronales devrait être préservée tant que l'actuel et le futur président de la Cci auront la liberté d'agir ensemble. « Le danger viendra des appareils patronaux qui, à un moment, voudront interférer dans cette coopération entre les deux hommes. Surtout du côté de Mathiolon, qui ne peut pas revendiquer la même autorité et la même autonomie à l'égard de son organisation syndicale que Mauduy » pronostique un fin connaisseur du dossier. Ainsi soumises aux récupérations et aux instrumentalisations des tutelles, l'efficacité du tandem pourrait alors se dégrader.
Reste que la « manière » dont le Medef Lyon-Rhône évinça l'ancien président consulaire Jean Agnès a, de son côté, laissé des stigmates. Outre la longueur excessive du mandat, Bertrand Millet prend pour motif que « s'il n'a pas démérité, Jean Agnès avait pour défaut de ne pas partager le pouvoir ». L'intéressé reste meurtri par son limogeage, et les contestations au sein du syndicat patronal demeurent vives. « Si j'avais été à la tête du Medef Rhône-Alpes, jamais je n'aurais géré ce dossier de la sorte. C'est au cours et non pas à la fin du mandat de Jean Agnès qu'il fallait réagir ; on aurait pu l'alerter sur ses erreurs, ses dérives, ses rapports difficiles avec le personnel, et lui permettre de les corriger. Il fallait dialoguer avec lui, l'aider dans son intérêt et dans celui de son mandat. Au lieu de quoi on l'a laissé faire. On ne lui a donné aucune explication au moment de ne pas renouveler son mandat. Je suis partisan du parler vrai, pas du camouflage. Cette manière choisie par Bertrand Millet pour écarter Jean Agnès n'est pas la mienne. J'en veux pour preuve ma gestion du candidat à la présidence du Conseil Economique et Social Régional ; j'ai arbitré entre le sortant Gérard Geoffray et Bruno Lacroix, en expliquant à l'un et à l'autre les raisons de mon choix en faveur du second. Et tout s'est bien passé » affirme Robert Paris.

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