"L'état d'esprit d'une ONG doit être entrepreneurial" (Handicap International, X. du Crest de Villeneuve)

Xavier du Crest de Villeneuve a pris la tête d'Handicap International France depuis janvier avec la mission d'accroître le rayonnement de l'ONG. Homme de communication, dirigeant de plusieurs agences par le passé, il s'est désormais mis en tête d'utiliser les méthodes entrepreneuriales afin de pouvoir donner les moyens à l'association de collecter toujours plus de fonds pour aider les populations dans les zones de conflits.

Acteurs de l'économie-la Tribune. Comme Manuel Patrouillard, directeur général de la fédération Handicap International, vous avez fait vos armes précédemment dans la même ONG que lui, Aide et Action, où vous occupiez le poste de directeur de la communication au siège à Genève. Et vos parcours sont similaires puisque vous venez tous les deux du privé. Quel regard cela vous donne-t-il ?

Xavier du Crest de Villeneuve. Je connaissais Handicap International puisqu'avec mon agence, nous avions travaillé avec elle sur l'opération des sacs à sapin notamment. Le point commun entre mon passé dans le milieu publicitaire et mon arrivée dans celui associatif, c'est le partage des mêmes valeurs.

De plus, étant bénévole pour plusieurs associations, j'apportais mon expertise et faisais le lien entre le monde économique et le monde social. Une dimension qui offre un autre regard sur le milieu associatif et permet ainsi son développement.

Toute ONG doit-elle se penser comme une entreprise, selon vous ?

L'état d'esprit d'une ONG doit être entrepreneurial. Handicap International fonctionne ainsi sur le modèle d'une entreprise. Innover, se remettre en cause, aller toujours de l'avant pour mieux se développer et répondre aux enjeux toujours plus importants. C'est cela une ONG aujourd'hui.

Comment souhaitez-vous développer l'association ?

La stratégie à 10 ans est ambitieuse. Aujourd'hui nous constatons une crise humanitaire grave et qui, malheureusement, se multiplie. Donc, nous sommes (les ONG, NDLR), de plus en plus sollicitées. Ce qui nous oblige à nous déployer davantage, à grossir, et à aller chercher des ressources ailleurs d'autant plus que l'aide publique au développement des pays développés est en baisse permanente et s'affiche à 0,32 % de leur revenu national brut. Sur cette part, seulement, 2 % reviennent aux ONG.

Nous devons renforcer l'image de la marque pour collecter des fonds en utilisant toujours plus le cross canal. Pour un euro dépensé, Handicap International France collecte ainsi 4,55 euros. Cela se traduit par le développement du digital avec des campagnes sur les réseaux sociaux et des emailing. Du street marketing ou encore des événements comme la Pyramide de chaussures ou prochainement le 2 juillet à Lyon, Sport ensemble.

Quel est le budget d'Handicap International France ?

HI France bénéficie à ce jour d'un budget de 53 millions d'euros (152 millions d'euros pour le budget du réseau) dont 87 % proviennent du privé. Du grand public : ils sont ainsi 103 000 donneurs réguliers et 315 000 ponctuels; et des entreprises, que nous souhaitons renforcer. L'institutionnel complète le reste. Nous utilisons ensuite ces ressources à 80 % pour des actions sur le terrain et à 20 % pour le fonctionnement de la structure (300 salariés au siège à Lyon dont 60 pour l'antenne France).

Les sacs à sapin vendus en période de fin d'année et les protèges cahiers lors des rentrées scolaires ont permis à Handicap International de se faire un nom et d'asseoir "la marque" auprès du grand public. Réfléchissez-vous à un nouveau produit ?

Nous cherchons effectivement un produit solidaire qui pourrait être disponible au printemps, et ce, toujours dans notre logique de développement. Nous devons déployer tous les canaux pour récolter des fonds.

Si les aides aux populations dans le monde explosent, avez-vous les moyens suffisants pour pouvoir y répondre ou travaillez-vous avec d'autres associations ?

À plusieurs, il est certain que nous sommes une force puisque nous mutualisons et sommes complémentaires sur des zones de conflits. Ce que nous faisons déjà, mais que nous devons structurer pour aller encore plus loin. Une difficile équation à mener puisqu'il s'agit d'une logique empruntée au privé. Il est toujours compliqué de la faire comprendre à d'autres. Chaque association a sa culture, son ADN.

Les conflits sont beaucoup plus durs qu'auparavant et les enjeux humains colossaux, vous parlez d'ailleurs d'« une politique de la terre brûlée », dès lors quels moyens de pression avez-vous sur les États ?

Nous mettons en ligne des pétitions qui peuvent les faire plier. Grâce à cela, nous avons pu faire signer l'arrêt des mines anti-personnelles. Le poids des stylos est ainsi très important. Le poids de la société civile, mais aussi du lobbying que nous menons dans l'ensemble des lieux de décision ont un impact sur le cours de certains conflits. Mais cela demande un travail quotidien.

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