Mecacentre : les conséquences dramatiques de la grève

Fin du conflit chez ZF PWK Mécacentre à Saint-Etienne. Après 9 jours de grève, le fabricant stéphanois de pièces pour l’automobile reprend la production. Mais cet épisode s’annonce d’ores et déjà lourd de conséquences.
(Crédits : Stéphanie Gallo)

A la sortie de la réunion de médiation pilotée par la Direccte hier après-midi, Laurent Dupont, le DRH de ZF PWK Mecacentre (240 salariés) est soulagé. Mais dépité.

"En reprenant le travail dès ce soir, c'est moins grave que si la grève s'était arrêtée demain, bien moins grave que si elle s'était arrêtée après-demain. Mais il ne faut pas se voiler la face, les conséquences pour l'entreprise seront graves à moyen terme", souffle Laurent Dupont.

Avec neuf jours de grève et de blocage total des camions, le fabricant stéphanois de pièces pour l'automobile (rotules de direction et de stabilisation) s'est mis à dos une bonne partie de ses clients, réputés intraitables sur les délais.

"Dans l'automobile, il y a zéro stock, la production se fait à flux tendu. Si nous ne livrons pas les clients dans les temps, nous bloquons les véhicules au milieu de leur chaîne de production. C'est une faute impardonnable dans ce métier".

Laurent Dupont estime à 20% minimum les volumes de production qui devraient s'envoler vers d'autres sites concurrents.

"Les clients nous ont déjà annoncé les sanctions. C'est irrévocable. Il n'existe pas de droit à l'erreur". A cette perte d'activité prévisible viendront s'ajouter plusieurs dizaines de millions d'euros dont devra s'acquitter l'entreprise pour non-respect des échéances prévues aux contrats.

"En quelques jours, la confiance que nous avions réussie à instaurer avec nos clients est partie aux oubliettes. Tout le travail fait depuis 7 ans a été balayé".

Retour à l'équilibre remis en cause

Créée en 1946 par M. Fanjaud, Mécacentre avait été reprise par Integral-Hydraulik en 1977 puis par Lemförder en 1981, devenue par la suite ZF. 30 ans plus tard, ZF a décidé de créer une joint-venture avec un autre groupe allemand, PWK, pour reprendre l'usine stéphanoise qui affichait 7 millions d'euros de pertes en 2009. Mécacentre était alors passée du statut, relativement confortable, de filiale de ZF à celui, plus exigeant, de fournisseur.

La nouvelle équipe de direction composée du président Leon Scholer, du DG Gilles Vasquez et du DRH Laurent Dupont avaient alors dû s'activer pour retrouver un niveau de productivité et de compétitivité acceptables. Un plan de départs volontaires (24 personnes) avait été mis en place et une chasse aux coûts engagée. Objectif : réussir à s'aligner sur les tarifs des concurrents. Un travail important avait également été réalisé sur la qualité.

Mécacentre avait finalement réussi à atteindre péniblement l'équilibre financier en 2016, avant de perdre de nouveau 1,7 million d'euros l'année dernière, en raison de retards dans la prise de commandes.

Pour 2018, la direction tablait sur un chiffre d'affaires de 38 millions d'euros, contre 36 en 2017, avec des voyants financiers au vert.

"Ces chiffres ne sont désormais plus d'actualité. Dans 10 jours, nous y verrons plus clair sur les conséquences précises".

Dialogue social difficile

90 salariés selon les syndicats (CGT/CFDT), 40 selon la direction étaient à l'arrêt depuis mardi 26 juin. Depuis cette date, les grévistes bloquaient les entrées et sorties de camion, paralysant ainsi totalement l'activité de l'usine.

Aucune négociation, aucune tractation. Le dialogue était complètement rompu sur ce site affichant sa 4e grève depuis le début de l'année. 

C'est une demande de la direction des Ressources Humaines qui semble avoir mis le feu aux poudres : l'exigence d'un CV et lettre de motivation aux salariés postulant sur un nouveau poste vacant. "Je ne comprends pas le problème !", expliquait Laurent Dupont avant la médiation de mardi après-midi. "Nous avons des supérieurs, ils nous connaissent. Cette demande est humiliante", rétorquait, en écho, les représentants de la CGT et de la CFDT.

Dialogue de sourds donc auquel la Dirrecte a réussi à mettre fin, via une médiation. Les grévistes ont obtenu que cette procédure ne soit appliquée qu'aux nouveaux postes, et non aux évolutions de carrière. "Mais c'est bien ainsi que nous l'entendions", glisse le DRH, écœuré de ce "malentendu". La CGT et la CFDT ont également obtenu que les évolutions de carrière soient validées rapidement, et non par des avenants de plusieurs mois. Les jours de grève seront partiellement payés. Le représentant de la CGT, Nordine Aït Zouaoua reconnait que la grève risque d'être lourde de conséquences mais botte en touche en pointant "la responsabilité de la direction".

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