Eric Boël (Unitex) : "Le textile français est pleinement ancré dans le 21e siècle"

Dans un cadre mondialisé, l'industrie française du textile doit innover. Qu'il soit technologique ou durable, le textile de demain se construit aujourd'hui, notamment en Auvergne Rhône-Alpes où le secteur dégage un chiffre d'affaires de trois milliards d'euros. Entretien avec Eric Boël, PDG des "Tissages de Charlieu", et président d'Unitex, à l'occasion du Textival* qui se tiendra le 2 juin à Lyon.
Eric Boël est le président d'Unitex. L'Union Inter-entreprise textile de Lyon et sa région organise ce 2 juin le Textival, une convention d'affaire dédiée aux professionnels du secteur.

Acteurs de l'économie - La Tribune. Le mot textile, dans l'imaginaire populaire, fait souvent référence à l'habillement. Pourtant, depuis une dizaine d'années, le textile se situe à la croisée de plusieurs domaines, allant de la décoration à l'aéronautique. Comment expliquer cette évolution du secteur ?

Eric Boël. Autrefois, nous, les industriels textiles, étions cloisonnés. Mais les entreprises qui se trouvaient dans des niches ont su se diversifier. Ce secteur d'activité comprend désormais des débouchés multiples. Le fait d'assembler plusieurs types de technologies permet de créer des liens afin de mettre sur le marché des produits qui répondent à des besoins fonctionnels qui n'étaient pas couverts. Prenons par exemple la fibre optique : il n'est plus obligatoire d'utiliser des lampes mais plutôt des fibres tissées à l'intérieur du textile.

Les entreprises textiles qui restent ce sont celles qui ont su innover, car cela fait longtemps que la toile de coton basique n'est plus fabriquée en France.

Quelle est justement la place de la recherche et développement dans l'industrie textile ?

En Auvergne Rhône-Alpes, le taux d'emploi en R&D de la filière textile se situe entre 10 % et 20 %. Le besoin est infini, il faut donc innover sans cesse.

Le textile connecté est régulièrement évoqué pour parler d'innovation. Seulement moins d'un quart des vêtements sont recyclés, ne faut-il pas également penser à l'aspect développement durable ?

Le taux d'utilisation de matières biologiques ou recyclées augmente. Même si cela avance doucement, il existe un bouillonnement d'innovation par rapport au développement durable. Il faut savoir que lorsque l'on fabrique en France, on divise l'impact environnemental par deux, voire par trois. Pas tant au niveau des transports, celui par bateau est relativement peu consommateur d'énergie, mais surtout au niveau des processus de production. Nous fabriquons les textiles les plus propres de la planète, et personne ne le sait.

Le principe d'achat est basé sur les prix, et souvent l'aspect environnemental est mis de côté. Aujourd'hui, l'objectif n'est pas de baisser les standards environnementaux, mais de leur redonner une valeur. Il s'agit d'une réflexion que nous devons avoir, en tant qu'homme.

Lire aussi : Quand le textile devient outil de communication

Les textiles français seraient donc à la pointe en matière environnementale. Mais plus généralement, comment se démarquer face à la concurrence internationale ?

Si l'Allemagne est un des leaders dans les textiles techniques, et l'Italie sur les textiles créatifs, en France nous avons la particularité d'avoir les deux.

La compétitivité intrinsèque des entreprises françaises, dans le secteur textile industriel, est dynamique car les produits conçus apportent une intelligence particulière, qu'elle soit technologique, créative, ou fonctionnelle avec l'emploi de matières de haute qualité. En France, on vient chercher de la plus-value.

D'ailleurs, lors du dernier Textival, un commercial de chez Salomon est venu. D'habitude, ils réalisent leurs achats en Asie. A la fin de l'événement il nous a dit être tombé de sa chaise lors qu'il a vu toutes les possibilités qu'il existait en Rhône-Alpes.

Le projet Perfect a fait partie des six projets retenus par le gouvernement au début de l'année 2016 dans le cadre de l'appel à projet " Partenariats pour la formation professionnelle et l'emploi". Plus de 4,6 millions d'euros seront alloués à ce projet, notamment porté par Unitex, sur cinq ans. En quoi va-t-il consister ?

Il va répondre à deux objectifs : se former tout au long de sa carrière et accroître l'attractivité. Car nous avons un souci : nous travaillons en b to b et nous ne communiquons pas, ou mal. Le secteur textile est souvent associé au 19e siècle alors que nous sommes bien ancrés dans le 21e. Le financement alloué par l'Etat devrait nous permettre de monter une cité virtuelle, une matériauthèque ou encore des parcours certifiés...

Les chiffres clés du secteur textile en Auvergne Rhône-Alpes (données 2015) :

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16 693 emplois, soit 29,2 % des emplois directs au niveau national -
622 établissements -
3,3 milliards d'euros de chiffres d'affaires, soit 25 % du CA national -
1er bassin d'emploi de l'industrie textile en France

 *Pour la troisième année consécutive, se tient le 2 juin à Lyon le Textival, une convention d'affaires business dédiée aux professionnels des textiles et matériaux souples.

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