STMicro : suppressions d'emplois et réorganisation annoncée

Après plusieurs mois d’inquiétude, les résultats annuels de STMicroelectronics, attendus de pied ferme par les syndicats, sont tombés. Le groupe annonce l'arrêt de la production de son activité dédiées aux set-top box (décodeurs numériques). Cette unité de sa division numérique représente 1 400 emplois dans le monde, dont 430 en France. Une réorganisation des principales entités du groupe est également prévue.

Article publié à 10:06, actualisé à 14:26

Les craintes des syndicats se sont confirmées : STMicroelectronics vient d'annoncer, à l'occasion de la publication de ses résultats annuels, la suppression progressive de son activité numérique dédiée aux set-top box (décodeurs). Conséquence directe : près de 1 400 emplois vont être supprimés à travers le monde, dont 430 environ en France via un plan de départs volontaires.

D'après le délégué CFDT Éric Potard, près de 90 % des départs volontaires annoncés en France concerneront les sites de Grenoble et du Mans. Si le détail n'est pas encore connu, Jean-Marc Sovignet, délégué CFE-CGC, estime que l'unité du Mans pourrait être moins touchée par des départs, car elle possède une activité software qui pourrait servir à d'autres divisions.

170 millions de dollars d'économies

Une mesure qui devrait prendre effet rapidement puisque, dès cette année, "la décision devrait affecter environ 1 000 salariés, dont environ 150 en France", prévoit le groupe, qui affirme que ce plan permettra de "réaliser des économies de 170 millions de dollars une fois le plan achevé tandis que les coûts de restructuration sont évalués à 170 millions".

Le groupe a notamment annoncé un chiffre d'affaires net de 6,90 milliards de dollars (contre 7,4 milliards en 2014) et résultat net de 104 millions de dollars en 2015 (contre 128 millions en 2014).

"Le chiffre d'affaires et la marge brute du quatrième trimestre, qui sont conformes à nos prévisions dans un marché faible, ont permis à ST de dégager un cash flow solide au cours du quatrième trimestre et pour la totalité de l'année", a déclaré par voie de communiqué le président de STMicroelectronics, Carlo Bozotti.

La réaction des syndicats

Pour Éric Potard, délégué CFDT, "il ne s'agit pas du pire scénario - où l'on annonce un arrêt total de DPG, NDLR -, mais ce n'est pas non plus ce que l'on espérait", déclare-t-il. Les syndicats ont obtenu que ce plan soit revu à la baisse, et avec des plans de départs volontaires, mais il va être difficile de trouver 430 candidats au départ alors que 180 départs volontaires ont déjà eu lieu l'an dernier."

Il voit néanmoins plutôt d'un bon oeil la restructuration des services annoncée par ST, avec la création de trois divisions principales dont Automotive and Discrete Group (ADG), l'ancien département MMS qui devient Microcontrollers and Digital IC's Group (MDG) et Analog and Mems Group (AMG).

"Un groupe Imaging product Division (IMD) a également été créé sous la direction de Marc Chery qui va prendre en charge le développement des produits avancés. Même si nous n'en avons pas encore le détail, cette restructuration va permettre à ST de se concentrer sur les marchés porteurs, que sont l'automotive, les produits connectés et le machine to machine", souligne-t-il.

Un constat que ne partage pas la CFE-CGC, qui affirme par voie de communiqué que "la grande réorganisation au plus haut niveau, n'est en fait qu'un grand plan de départs à la retraite programmés" et souligne qu'il n'existe toujours "aucune stratégie globale" pour le groupe.

"On avait dit au gouvernement que le groupe allait présenter d'abord la fin de DPG, pour finir par dire que la fin de CPG (la filiale comprenant les set-top box) est moins grave", analyse le délégué CFE-CGC Jean-Marc Sovignet.

La CGT ne comprend quant à elle pas la stratégie annoncée : "Détruire le numérique en plein essor de l'économie numérique, il fallait oser !", estime-t-elle dans un communiqué. La CGT parle d'un "scandale social et une énorme aberration économique. Le PDG veut détruire la partie la plus avancée de ST sur le plan des produits, de la complexité entre le logiciel et le matériel".

Des députés montés au front

La publication de ces résultats intervient alors que, lundi, les députés PS de l'Isère (Marie-Noëlle Battistel, Geneviève Fioraso, Michel Destot, Michel Issindou et Pierre Ribeaud) ont envoyé un courrier au ministre de l'Économie Emmanuel Macron pour souligner "le manque de vision stratégique de l'entreprise", détenue à parts égales entre l'État français et italien (13,5% chacun) et qui emploie plus de 5 000 personnes à Grenoble et Crolles, et génère environ 20 000 emplois induits dans l'agglomération grenobloise.

Plusieurs sources parlaient même ces derniers jours d'un remplacement imminent du PDG, Carlo Bozotti, affirmant notamment à l'Usine Digitale qu'un cabinet de chasseurs de têtes, Spencer Stuart, aurait été mandaté pour trouver une direction bicéphale : un CEO italien et un COO français. Aucune confirmation n'a cependant été apportée pour l'instant.

Des inquiétudes pour l'avenir

C'est la déclaration du PDG italien, en mai dernier, laissant entrevoir un possible arrêt de la division numérique du groupe, (Digital Product Group), qui avait mis le feu aux poudres.

Lire aussi : Les salariés de STMicroelectronics reçus à Bercy, la division numérique menacée

Les syndicats se sont rapidement inquiétés des conséquences en matière d'emplois, puisque cette division emploie au total près de 1 000 personnes en France. Cette restructuration est d'autant plus mal vue par les syndicats qu'elle touche un secteur emblématique, le numérique. Ils avaient déjà pointé du doigt les conséquences que pourraient avoir une telle annonce sur le développement de la technologie phare de ST, la FD-SOI. "Aujourd'hui, la FD-SOI peut servir aux micro-contrôleurs pour le spatial mais ce n'est pas avec ça qu'on va charger les fabs", estime Jean-Marc Sovignet.

DPG représente environ 15% du chiffre d'affaires total du groupe, mais ses revenus auraient chuté de près de 20% l'an dernier face à la concurrence. "On avait pris du retard face à la concurrence asiatique et américaine, avec des produits trop chers, trop gros, pas aux normes... Et le retard est difficile à rattraper ensuite", estime M. Sovignet.

Quelques jours avant la publication des résultats annuels, près de 200 salariés de STMicro se sont rassemblés devant le site de Grenoble le 21 janvier pour demander de nouveau un changement de stratégie et l'arrêt des annonces de suppressions d'emplois. En novembre dernier, les salariés français du groupe avaient également sollicité un arbitrage de la part du cabinet du ministre de l'Économie concernant l'emploi et la stratégie du groupe, mais leur visite est jusqu'ici restée sans réponse. Une nouvelle visite est programmée le 24 février prochain avec le gouvernement.

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