Haulotte group lâche du lest

Le leader européen de la nacelle élévatrice s'est séparé de son activité de location au Royaume-Uni afin de dégager des capacités financières. Durement affaibli par la crise, le groupe ligérien reste fragile et se réorganise en attendant le rebond.

Haulotte group tente de retrouver des marges de manœuvre. Le groupe ligérien (ex-Pinguely-Haulotte), leader européen et numéro trois mondial de la fabrication de nacelles élévatrices de personnes, a cédé début juillet la société UK Platforms à HSS Hires services group. Montant de l'opération : entre 30 et 35 millions d'euros. En se séparant de son activité de location de nacelles et chariots téléscopiques au Royaume-Uni (120 salariés, 2 400 véhicules et 20 M€ de CA), Haulotte group réduit sa dette financière de moitié et s'offre une respiration financière dont il a bien besoin.

Renforcer la solidité financière

« Nous voulons donner la priorité à notre cœur de métier, à savoir la fabrication, la vente et les services autour des engins de levage (nacelles et chariots), explique Alexandre Saubot, directeur général délégué du groupe. Or faire de la location en Angleterre ne nous apportait aucun avantage concurrentiel. Nous avons donc décidé d'en sortir. » D'après le fils de Pierre Saubot, fondateur du groupe Pinguely-Haulotte en 1985, le fruit de la vente de UK Platforms ne sera pas alloué au financement d'un projet de développement identifié. Il servira avant tout à renforcer la solidité financière d'un groupe qui reste affaibli par le contexte économique. « Tant que l'on n'est pas sorti de la crise, on n'est jamais trop flexible, affirme le dirigeant. Nous travaillons dans un secteur par nature cyclique où nous devons être capables de bouger très vite, de faire preuve de souplesse financière. Et il nous faut renforcer cette flexibilité. »

« Besoin de cash »

L'an dernier, la direction d'Haulotte group avait déjà du se résoudre à réorganiser sa production au terme de plusieurs années de descente aux enfers. « L'activité commençait à se redresser, mais le groupe avait besoin de cash », témoigne Franck Sauton, délégué syndical central (CFDT). La restructuration est passée par la fermeture de l'usine espagnole du groupe qui avait ouvert ses portes en 2007 dans l'euphorie des années d'avant-crise. Située près de Santander (Cantabrie), elle employait 70 salariés et demeurait en sous-production en raison de la faiblesse chronique du marché sud-européen. L'adaptation de l'outil de production s'est également soldée par la suppression de 33 postes sur le site de L'Horme, notamment dans le cadre d'un plan de départs volontaires, ainsi que le transfert de l'assemblage des nacelles de moyenne hauteur dans l'usine roumaine du groupe. « L'entreprise était surdimensionnée », estime Franck Sauton. Au final, Haulotte group a réduit ses coûts fixes de 35 % depuis le début de la crise. Malgré les efforts consentis pour maintenir les équipes en place, notamment grâce au chômage partiel, les effectifs du groupe à travers le monde sont passés de 2 200 salariés en 2007 à 1 500 aujourd'hui en passant par un point bas de 1 300 collaborateurs.

Revers violent

Il faut dire que les dirigeants d'Haulotte group n'avaient pas vu venir une crise d'une telle ampleur. « Le groupe n'a pas commis d'erreur stratégique vraiment identifiée, commente Maxence Dhoury, analyste financier chez Portzamparc. Haulotte a été confronté à l'erreur classique de se dimensionner pour un marché trop grand, ce qui a élevé le point mort de l'entreprise, avant de subir une division par quatre du volume du marché mondial. » Franck Sauton confirme : « Avant 2008, la stratégie consistait à acquérir toujours plus de parts de marché. La direction nous expliquait qu'il fallait être partout dans la mesure où il n'existerait jamais de crise mondiale ». Erreur d'appréciation, car entre 2007 et 2009, le marché mondial de la nacelle élévatrice est passé de 120 000 unités vendues à 30 000. Conséquence : Haulotte group a subi un revers violent, voyant ses ventes chuter de 75 % en l'espace de 13 mois. Coup d'arrêt au niveau de la production, car les stocks peinent alors à être écoulés. « En 2008, si vous m'aviez dit que le marché allait être divisé par quatre, je vous aurais sans doute ri au nez », reconnaît Alexandre Saubot. Au final, l'effondrement aura été d'autant plus rude que le groupe familial n'avait cessé de prendre de l'ampleur sur la décennie précédente, passant de 50 M€ de chiffre d'affaires en 1997 à plus de 650 M€ en 2007. « Il faut bien voir que la période 2005-2007 était marquée par un environnement de pénurie qui nous poussait à consolider nos capacités de production, justifie le dirigeant d'Haulotte group. Pour autant, dans toutes les décisions que nous avons prises, nous avons toujours fait en sorte de pouvoir faire face à une baisse de 50 % du marché. C'est ce qui fait que notre situation n'a jamais été grave, même si nous avons été affaiblis et que nous sommes désormais plus fragiles qu'avant. »

Le rebond se fait attendre

Depuis 2010, le volume d'activité a repris une pente ascendante, mais les niveaux de vente d'avant-crise sont encore hors d'atteinte tandis que le rebond se fait toujours attendre. « L'entreprise vivote », résume Franck Sauton. Et les derniers chiffres montrent que le groupe peine encore à redresser la barre. Ainsi, au premier trimestre 2012, les ventes de machines ont reculé de 5 % par rapport à l'exercice précédent. Les activités de services et de location ont suivi la même tendance avec des baisses respectives de 4 et 7 %. L'an dernier, l'équilibre opérationnel a été atteint de justesse (0,8 M€) et le groupe a affiché un résultat net en hausse mais déficitaire à hauteur de 7,5 M€. « Le premier semestre devrait être équivalent à celui de l'an dernier malgré le retard pris au premier trimestre, anticipe Alexandre Saubot. L'objectif est de faire de la croissance au cours du second semestre et rien ne dit que ce n'est pas possible. » Pour autant, le dirigeant reconnaît que le carnet de l'entreprise n'offre aucune visibilité au-delà de deux mois. « L'idéal serait d'avoir une vision sur 3, 4 ou cinq mois. Mais en Europe, les acteurs ne se projettent plus dans la durée », constate le dirigeant.

Challenger aux Etats-Unis

Pour rebondir, Haulotte group ne pourra pas parier sur un marché européen atone où il reste toutefois leader et sur lequel il enregistre ses meilleures marges. Il ne pourra pas davantage miser tous ses espoirs sur un marché asiatique qui lui-même montre des signes de faiblesse. « A moyen terme, tous les marchés sont porteurs, affirme Alexandre Saubot. Mais à court terme, on peut compter essentiellement sur l'Amérique du Nord, l'Amérique du Sud bien que ce marché s'achemine vers un plafonnement, et le Moyen-Orient. » Les obstacles d'Haulotte group à l'international demeurent sa position de challenger aux États-Unis (derrière les géants américains JLG et Terex) et les coûts commerciaux élevés qui accompagnent son implantation sur les marchés émergents. « Il faut compter trois à quatre semaines de bateau pour livrer des machines en Amérique du Sud », cite, à titre d'exemple, Alexandre Saubot. Présent commercialement dans une vingtaine de pays, le groupe familial réalise désormais 40 % de ses ventes hors Europe.

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