Numérique : Comment les startups tentent de moderniser les pratiques de la filière équine

Alors que le nouveau plan Ambition cheval vient tout juste d’être lancé par la région Auvergne Rhône-Alpes afin de donner un coup de pouce à la filière équestre, zoom sur un marché où les startups sont de plus en plus présentes. Elles tentent aussi de s'y frayer une place.
(Crédits : ML)

Epaulée désormais par la région Auvergne Rhône-Alpes à travers le plan Ambition Cheval dévoilé ce dimanche à Equita Lyon, l'ensemble de la filière équine s'ouvre à la transformation. Dans ce domaine, comme dans d'autres secteurs de l'économie moins connus par le grand public, des projets de startups émergent afin d'intégrer les nouvelles technologies au sein du quotidien des cavaliers et de leurs montures. Même si, sur ce marché souvent réputé comme traditionnel, les innovations se développent à petits pas.

C'est par exemple le cas de la pépite Arioneo, spécialisée dans les objets connectés liés à la performance et au bien-être des chevaux, qui, après avoir intégré l'accélérateur Synapse du groupe Boehringer Ingelheim, a enregistré, en septembre dernier, l'entrée au capital de plusieurs acteurs renommés des sports équestres - dont Kevin Staut et Patrice Delaveau. Ou encore la jeune pousse Equineledger, dédiée à la traçabilité des données équines, et qui, après avoir remporté le Prix Emergence du concours Equi'Défi d'Hippolia, avait signé en avril 2019 une collaboration avec le groupe informatique IBM, dans le cadre de ses projets liés au domaine de la blockchain.

En plus de l'arrivée de produits innovants sur le marché du textile, des soins et cosmétiques (Akhal, Jump your hair, etc) et des équipements du cheval, qui visent de meilleures performances techniques et des fonctions connectées (Arionéo, Equisense, etc), on observe depuis quelques années l'essor de nouvelles plateformes digitales, à l'image des sites de location de moyens de transports (Dadavroum, Horsicar) ou de covoiturage équin (Hippn'Go), de location de logements et écuries (Equimov), de la plateforme d'élevage collaboratif (My Horse Family), ou encore de location de matériel (Equipeer).

"Il existait de gros besoins sur du partage d'informations au sein de la filière, qui restait jusqu'ici très traditionnelle et fonctionnait beaucoup par le bouche-à-oreille", illustre Lory Gonzales, chargée de projet au sein de l'unique pôle de compétitivité de la filière équine, Hippolia (200 membres), basé en Normandie.

"Le fait que des startups introduisent notamment du digital a permis aux gens de plus échanger, mais aussi aux professionnels d'être plus rigoureux dans leurs activités, en offrant davantage de transparence", estime-t-elle.

Equita Lyon, une vitrine pour les innovations françaises

Depuis cinq ans, la salon Equita Lyon se pose un peu comme la principale vitrine de ces nouvelles technologies, avec son village dédié aux startups innovantes, situé en plein cœur d'Eurexpo. Au total, ce sont 34 jeunes pousses qui ont pu bénéficier de ce dispositif, pour une filière de innovante qui représente désormais près de 110 emplois créés, pas moins de 263 nouveaux produits mis sur le marché, pour près de 7 millions de fonds levés et plus de 2 millions d'euros de chiffre d'affaires.

Cette année encore, six startups se sont vues offrir un emplacement en plein cœur de l'événement, qui attire chaque année plus de 160 000 visiteurs sur cinq jours. Avec, à l'issue du salon, un prix remis par le public et un jury de professionnels.

Cette année, le podium a même été raflé par trois jeunes pousses rhônalpines, avec le créateur de vêtements techniques multisports l'Armure Française, qui obtient la première place, suivie du fabricant de produits cosmétiques Jump your Hair et du dispositif de surveillance connecté pour les écuries, Coho.

"L'objectif est de permettre à ces startups d'avoir de la visibilité sur un salon comme Equita avec des moyens réduits puisqu'on leur fournit des équipements pour recevoir le public sur le stand, ainsi que l'électricité et le wifi", reprend Lory Gonzales.

Le processus de sélection, basé sur un appel à candidatures mené au sein des membres du pôle Hippolia, cible les jeunes pousses françaises ayant jusqu'à trois ans d'existence, et disposant d'une offre ou d'un prototype avancé, tous domaines confondus (à l'exception des centres équestres).

Le concept a d'ailleurs créé des petits, puisque le pôle Hippolia reproduit depuis l'an dernier son village lyonnais au sein d'une autre manifestation, le jumping de Bordeaux, qui a lieu chaque année en février.

Des freins au déploiement des innovations

Si la vague des startups semble bel et bien lancée au sein de la filière, quelques obstacles restent toutefois à franchir afin de permettre une diffusion plus large de ces innovations, au sein d'un marché français qui compte déjà plus de 800 entreprises industrielles et près d'un million d'équidés.

"Nous observons que les startups que nous accompagnons réalisent, d'un côté, un retour vers l'aspect produit, avec moins de projets basés uniquement des applications mobiles, mais aussi une forme d'essoufflement de la bulle des startups au sein de la filière équine, après quelques années d'accélération", note Lory Gonzales.

Car, contrairement à d'autres secteurs de l'économie comme le digital, "les porteurs de projets sont des gens qui ont une passion et qui veulent ensuite la transformer en source de revenus".

Une position qui peut emmener ces passionnés vers certains écueils, tels que des difficultés à aborder les aspects plus stratégiques de leur projet (étude de marché, de la concurrence, de sa cible, etc), voire même à investir beaucoup d'argent dès le démarrage, sans stratégie précise.

Sans compter que la diversité et la petite taille des exploitations équestres peut également compliquer la diffusion des innovations sur le marché : "Beaucoup de gens ont un ou deux chevaux pour se faire plaisir, ce qui n'est pas le cas du secteur agricole, qui possède de plus larges cheptels où l'automatisation est déjà largement déployée".

"De nombreuses innovations se sont développées dans le monde du cheval dans la dernière décennie, que ce soit dans les soins ou l'alimentation et il est difficile pour les établissements équestres et élevages d'avoir toutes les informations", note Marc Damians, président du Cluster Auvergne-Rhône-Alpes dédié à la santé équine.

Bien que la transformation digitale commence à se faire sentir, cet ensemble de facteurs rendraient le passage à l'échelle encore périlleux et incertain pour les jeunes pousses de la filière.

"On a des acteurs qui avaient réussi à prendre des parts de marché mais qui se sont rendus compte que leur produit n'était pas pérenne, car il était rapidement revendu par les utilisateurs. Et, d'un autre côté, des entreprises comme Arionéo, qui ont développé une stratégie globale, avec un produit d'appel leur permettant de rentrer de la trésorerie pour investir ensuite en R&D sur un autre produit, et grossir petit à petit", analyse Lory Gonzales.

Des liens à renforcer

Autre phénomène propre au secteur : malgré quelques intégrations de jeunes pousses (comme GT Concept au sein du sellier français Devoucoux) ou partenariats (entre la jeune pousse Arionéo et le sellier CWD), les acteurs du monde du cheval seraient encore peu nombreux à s'appuyer sur les startups pour mutualiser leurs recherches.

"Les grandes marques se rendent compte que les startups développent des produits intéressants, mais ces collaborations n'arrivent pas encore au niveau de ce qui peut se faire dans le numérique", nuance Lory Gonzales.

Pour cela, le Cluster régional dédié à la santé équinelancé il y a tout juste un an sous l'impulsion de la CCI Lyon Métropole Saint-Etienne Roanne, ambitionne justement de "rassembler et fédérer les entreprises autour de la santé et du bien-être du cheval", et de "renforcer la notoriété des entreprises de cette filière, en étant à la pointe de l'innovation".

 S'il rassemble déjà plusieurs entreprises, petites et grandes, qui développent de nouvelles techniques pour la santé et le bien-être du cheval, son ambition est justement de fédérer, dans un second temps, également la clientèle avec les établissements équestres et élevages possédant un certain nombre de chevaux.

"En Auvergne Rhône-Alpes, il faut reconnaître qu'on a une région complète puisqu'on regroupe à la fois de grosses entreprises mais aussi  beaucoup de startups qui s'intéressent à ça, ainsi qu'un potentiel important puisque nous sommes la 2e région française d'élevage (après la Normandie) et au niveau équitation (après l'Ile-de-France)", reconnaît son président Marc Damians. Et d'ajouter : "Les jeunes entreprises ont besoins de relais, de connaître la clientèle et d'être connues et le Cluster peut à ce titre jouer un rôle de mise en relation".

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Commentaire 1
à écrit le 06/11/2019 à 10:11
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Pourquoi n'emploie-t-on pas les mots français dans cet article ? Numérique : Comment les JEUNES POUSSES tentent de moderniser les pratiques de la filière équine (...) dans le cadre de ses projets liés au domaine de la CHAÎNE DE BLOCS.

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