La "war room" connectée de Clermont-Ferrand, au coeur de la modernisation militaire

STRATEGIE. Témoin du rôle central qu'elle joue dans l'amélioration de la performance du Maintien en condition opérationnelle (MCO), la "war room" connectée de l'Atelier industriel de l'aéronautique (AIA) de Clermont-Ferrand sera à terme dupliquée sur d'autres sites. Rattaché au chef d'état major de l'Armée de l'air, l'AIA travaille pour les trois armées et mesure déjà les progrès réalisés en matière de maintenance des aéronefs militaires.
(Crédits : DR)

La disponibilité d'un maximum d'aéronefs (Rafale, A400M, Tigre, drones...) prêts à être déployés est indispensable à l'action stratégique de la France sur les terrains d'opérations partout dans le monde. Trois ans après l'avoir engagé, Florence Parly, ministre des Armées, a fait un point d'étape sur la modernisation du maintien en condition opérationnelle (MCO) dans le secteur de l'aéronautique et de la défense à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), lors d'une visite à l'Atelier industriel de l'aéronautique (AIA) à la mi-octobre.

Une occasion, pour l'institution clermontoise, d'illustrer un enjeu majeur à l'ensemble du corps militaire, et sur lequel elle se place désormais à l'avant-garde : car depuis 2017, une profonde transformation du MCO aéronautique a été engagée pour qu'avions et hélicoptères militaires bénéficient d'un meilleur taux de disponibilité pour effectuer leurs missions.

Trois ans après, l'amélioration du maintien en condition opérationnelle de sa filière aéronautique est concrète et les enseignements de cette visite se déclinent en chiffres. En 2017, moins de trois A400M étaient disponibles. Désormais plus de 6 d'entre eux le sont, avec des pics ponctuels de 11 avions disponibles, sur une flotte globale de 17 avions. A la même période, moins de 5 Caracal étaient disponibles, aujourd'hui, plus de 8 machines le sont. En 2018, 2.500 heures de vol ont été réalisées par les Fennec de l'armée de Terre : en 2020, ils auront volé plus de 5.000 heures, avec un coût à l'heure de vol divisé par deux.

Un quart de la maintenance aéronautique militaire est assuré par le SIAé (Service industriel de l'aéronautique), le reste étant réalisé par l'industrie privée. Ce n'est donc pas un hasard si Florence Parly avait évoqué le rôle central du SIAé qui permet de «challenger nos industriels privés, de conserver une expertise très forte et une capacité de réparation industrielle en interne. »

Car à ce titre, Clermont-Ferrand, plus important établissement du SIAé, assure la maintenance des avions gros porteurs (A400M, C130H Hercules, C160 Transall), des avions de chasse (Rafale, Mirage 200 et Alpha Jet), ainsi que des hélicoptères (Tigre, Puma et Gazelle). L'an dernier, 130 aéronefs ont été livrés aux forces, tandis que 18.000 équipements aéronautiques ont été entretenus ou réparés, et 100 équipes de spécialistes ont été détachées sur le terrain.

Fleuron de l'industrie auvergnate avec ses 1.500 salariés directs et indirects, le site de l'AIA Clermont-Ferrand a été crée en 1939 et fait partie des cinq centres d'excellence de ce type à l'échelle nationale. Il est également membre de l'ACRAA (Aerospace Cluster Rhône-Alpes Auvergne) qui regroupe plus largement une cinquantaine d'entreprises et une vingtaine de partenaires, pour une filière qui génère annuellement près de 190 milliards d'euros.

Une "war room" innovante

Dans le cadre de la réforme de modernisation de l'institution militaire, l'armée a confié à l'AIA de Clermont-Ferrand une autre responsabilité : la disponibilité de la flotte C130H au travers d'un contrat verticalisé, qui l'engage sur l'ensemble de la chaîne de maintenance de cet avion. Cette « verticalisation des contrats » a permis de mettre fin à « la dissolution des responsabilités », en réduisant tout d'abord drastiquement le nombre de contrats. « Désormais, nous avons pour chaque flotte, un chef d'orchestre de la maintenance, avec un guichet unique pour la logistique », rappelait Florence Parly.

Une manière d'offrir plus de visibilité aux industriels et d'engendrer « une meilleure organisation des plans de charge et des relations fluides avec les sous-traitants.» Un changement de culture qui implique aussi d'importantes évolutions dans les méthodes de travail.

L'AIA de Clermont-Ferrand a relevé ce défi en innovant notamment à travers sa « war room C130 », un espace multimédia qui regroupe virtuellement l'ensemble des acteurs de la maintenance de l'avion, autour d'un dispositif qui permet des prises de décisions rapides avec un suivi en temps réel de l'état de maintenance de la flotte.

Cet outil permet désormais de mieux coordonner le diagnostic à l'aide de moyens de contrôle non destructifs, l'ingénierie avec un bureau d'étude intégré, la fabrication et la réparation des pièces avec des moyens de production étendus, ainsi que l'approbation en fonction des règles de navigabilité. Son site principal se situe à Clermont-Ferrand, et travaille avec un détachement à Toul (Meurthe et Moselle) ainsi que deux antennes situées à Phalsbourg (Moselle) et Orléans (Loiret).

Amplifier la réforme

En conclusion de sa visite à l'AIA de Clermont-Ferrand, la ministre a confirmé sa volonté d'« accélérer, confirmer et amplifier les taux de disponibilité dans les années qui viennent».

À ce titre, deux chantiers avaient été mentionnés, comme préludes à de nouvelles annonces : celui des systèmes d'information où, pour l'heure, le foisonnement des systèmes d'information actuels ne faciliterait ni la relation avec les industriels, ni l'emploi de techniques innovantes comme la maintenance prédictive.

Autre thème abordé et toujours d'actualité : celui de la navigabilité, puisque si l'ensemble des procédures permettent de certifier que les avions qui volent, le font en toute sécurité, celles-ci ne doivent pas aller jusqu'à entraver la réparation d'un appareil. « C'est l'un des principaux obstacles à la fabrication additive et nous devons y remédier», avait concédé la ministre.

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