Le centre de recherche grenoblois Naver Labs affine sa stratégie dans l'IA

Racheté en 2017 au groupe Xerox par le géant sud-coréen Naver, le centre de recherche a profité d’une visite du président de la métropole iséroise, Christophe Ferrari, pour évoquer sa stratégie. Avec, au menu, ses ambitions dans le domaine de l’intelligence artificielle, et ses projets à Meylan, où le groupe prévoit d’injecter plusieurs millions d’euros dans la rénovation de son site.
(Crédits : DR)

"Depuis le rachat du centre par Naver, nous sommes passés de 70 chercheurs, spécialisés dans les logiciels en intelligence artificielle, à près d'une centaine aujourd'hui, avec près de 26 nationalités différentes", annonce Michel Gastaldo, directeur de Naver Labs Europe.

Basé dans un ancien château rénové à Meylan, dans la périphérie grenobloise, ce centre de R&D constituerait aujourd'hui le plus grand centre de recherche privée français en intelligence artificielle, devant des acteurs comme Facebook, ou même Google.

"Nous avons embauché des spécialistes en traitement de la langue ou en techniques de machine learning et techniques de vision par ordinateur, en allant même jusqu'à débaucher des gens qui travaillaient chez Amazon en Allemagne, et d'autres en Inde ou aux Etats-Unis".

Trois axes principaux

Le géant technologique sud-coréen Naver, notamment propriétaire de l'application de messagerie Line, très populaire en Asie avait acquis en juin 2017 le centre de R&D de Xerox. Fondé en 1993, Naver Labs Europe est spécialisé dans des domaines tels que l'intelligence artificielle, l'apprentissage automatique, la vision par ordinateur, le traitement des données du langage naturel et l'ethnographie.

"Nos axes de recherche ont été réorientées autour de trois axes principaux, que sont l'IA pour la robotique, la recherche d'informations et de recommandations, ainsi que la mobilité contextuelle", expose Michel Gastaldo.

Des collaborations avec le nouvel institut 3IA de Grenoble, MIAI, ont notamment été déployées, avec la mise en place d'une chaire de trois ans sur le machine learning, conduite par Naver.

"Nous sommes le seul porteur de chaire de cet institut. Nous avons engagé un budget financier qui représente 200 000 euros annuels sur le projet grenoblois, et nous participons également à l'institut en IA parisien, PRAIRIE, à la même hauteur", précise le directeur de Naver Labs Europe.

Un engagement qui se traduira prochainement par l'attribution d'un chercheur senior à temps plein, ainsi que de cinq doctorants Cifre.

Explorer les opportunités

Face à la transformation en cours pour les GAFA, qui ne cachent pas leur appétit pour des nouveaux marchés (industrie 4.0, IoT, transports, habitat connecté...), Naver se positionne pour l'instant comme le principal moteur de recherche en Corée du Sud.

Mais envisagerait déjà de nouveaux débouchés dans le domaine de la robotique :

"Naver ne nous demande pas d'intervenir sur des opérations à court terme ni d'influencer son business au jour le jour. Notre rôle est plutôt d'explorer les opportunités technologiques qui pourraient ensuite être reprises par des business du groupe ou générer la création de nouveaux groupes à moyen terme, d'ici 3 à 5 ans", confirme Michel Gastaldo.

Un rôle qui se veut d'ailleurs complémentaire aux missions du second centre de R&D du groupe, basé en Corée du Sud, et axé pour sa part sur la robotique. "Nous apportons les compétences en IA tandis qu'ils travaillent sur la partie mécanique, avec la même mission d'intervenir sur du long terme", indique le directeur du centre grenoblois.

Une quinzaine de projets

Il faut dire qu'en matière d'intelligence artificielle, les défis ne manquent pas : l'un des challenges actuels du moteur de recherche sud-coréen demeure, par exemple, de développer une IA qui soit explicable. "Lorsqu'on robot prend une décision, tout l'enjeu est désormais de pouvoir l'expliquer la justifier", ajoute Michel Gastaldo.

Ses chercheurs travaillent d'ores et déjà sur une quinzaine de projets, comme la manière dont l'IA peut aider les robots à se localiser, afin que ceux-ci puissent s'orienter dans l'espace, ou encore attraper un objet.

"Il faut pour cela relever un certain nombre de challenges, comme d'apprendre à un robot à saisir un objet, qu'il puisse déterminer la manière de se positionner, d'anticiper son poids, de se déplacer dans un monde qui peut présenter des obstacles, ou dont l'apparence peut changer en fonction des saisons".

D'autres applications sont également en cours, comme le développement de modules de traduction automatique plus contextuels, qui permettraient ainsi de reconnaître et de traduire plus rapidement un vocabulaire spécifique, comme des menus de restaurant. Ou encore de développer des solutions de transport multimodales aux interfaces plus complexes, combinant plusieurs modes de transport, tels que le train, l'avion et le bus.

Un modèle alternatif aux Gafa ?

Sur ce terrain, Naver ne cache pas son ambition :

"L'idée est de proposer une alternative aux GAFA américaines ou chinoises, qui ont une force de frappe très forte", glisse Michel Gastaldo.

Le sud-coréen s'est d'ailleurs déjà dit ouvert à des partenariats avec d'autres acteurs européens, en vue de proposer une solution "alternative" aux consommateurs européens.

Et multiplie, pour cela, les partenariats avec le tissu académique local.

"La région grenobloise constitue un endroit intéressant pour la recherche en intelligence artificielle car, en dehors de la présence d'un certain nombre de sociétés et de projets sur cette thématique, les acteurs travaillent ensemble à mettre les choses en commun", souligne-t-il.

Rénovation des bâtiments à venir

Si le budget attribué au centre isérois demeure confidentiel, Naver affirme avoir réinvesti, depuis le rachat du site de Meylan, dans une nouvelle unité de calcul pour soutenir ses développements dans le domaine du machine learning (montant : NC). Sans compter d'autres investissements à venir :

"Nous avons sommes devenus propriétaires du site de Meylan depuis le 26 décembre dernier, ce qui va nous conduire à réaliser prochainement une rénovation très profonde de nos bâtiments", expose Michel Gastaldo.

Une opération dont le coût est évalué à "plusieurs millions d'euros", afin de booster l'attractivité du centre, en lui conférant l'image d'une société plus moderne et accueillante. Les travaux, qui viennent de démarrer par tranches, sont prévus pour durer trois ans.

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