Le Brésil, un marché alléchant mais difficile d'accès

Le Brésil est un marché qui attire de nombreuses entreprises rhônalpines. Mais pour le conquérir, les obstacles sont nombreux et imposent patience et obstination. Un des atouts possibles est d'offrir des procédés et des produits à haute valeur ajoutée.
Le stade Das Duna situé dans la ville de Natal dans le Rio Grande. Serge Ferrari a construit une partie du toit. Crédits : Serge Ferrari

Si le Brésil est la terre promise du foot, certaines entreprises y voient également un eldorado. Le pays, fort de 200 millions d'habitants et d'une classe moyenne en développement, séduit. Pour preuve, en 2013, les entreprises rhônalpines ont exporté pour 613 millions d'euros. Désormais, le Brésil est le 15 partenaire économique de la Région en matière d'exportation, une progression de 10 rang en 15 ans. La CCIR recense 446 exportateurs et 21 implantations. Mais il n'est pas si évident de faire du business.  « Le brésil est un vrai défi » souligne Julie-Capucine Hours, conseillère du développement Amérique à la CCI de Lyon. 

Normes et patriotisme économique

Les obstacles sont nombreux : l'organisation fédérale qui engendre une forte bureaucratie et une fiscalité en cascade ; il faut franchir 6 rangs avant de pouvoir exporter son produit.  En outre, il existe plus de 85 taxes, des nombreuses normes juridiques et sociales (plus de 2 400 dans ce dernier domaine). Sans compter les barrières douanières : « elles peuvent aller jusqu'au 30 % de la valeur du produit. Le Brésil défend le patriotisme économique » détaille Yvan Trouillot, directeur du développement commercial chez ECM Technologies, une société basée à Grenoble et spécialisée dans les équipements de cémentation basse pression. Elle a commencé à s'intéresser au Brésil depuis plus de 12 ans. 

D'autres obstacles existent. Le marché est cher, notamment par un coût salaire élevé et un système social « exigeant » pour les entreprises, avec parfois, un 13ème  ou 14ème  mois à verser.  « ll y a également des contraintes réglementaires, notamment au niveau de la licence d'importation » décrit Julie-Capucine Hours. « C'est compliqué lorsqu'on veut obtenir le droit d'importer » confirme Marc Beaufils, directeur général International du groupe Serge Ferrari, spécialisé dans les matériaux composites souples et qui a participé à la construction de trois stades de la Coupe du monde.

Face à ces difficultés, l'accompagnement et le conseil, aussi bien en amont (via la CCI par exemple) que sur place, sont déterminants. « Il n'y a pas d'autres options que de se faire aider, via des conseillers juridiques spécialisés dans le droit social et celui des affaires. Un ensemble d'experts nous a accompagné » témoigne Pascal Rousseau, Président-fondateur de Processium, une firme spécialisée dans les procédés industriels.

Plusieurs portes d'entrées

Il existe plusieurs portes d'entrées pour faire du business au Brésil. L'entreprise grenobloise ECM Technologies s'est immiscée via ses clients étrangers déjà implantés au Brésil, comme Bosch ou l'américain Eaton, avant d'évoluer. « La volonté de se structurer nous a poussé à faire appel à un agent commercial brésilien ayant la connaissance et le réseau local » précise Yvan Trouillot. Aujourd'hui, l'entreprise réfléchit à créer une filiale support, en fonction des commandes à venir.

Serge Ferrari a franchi le pas de la filiale il y a seulement deux ans, alors que l'entreprise commerce avec le Brésil depuis 15 ans. Après avoir exporté directement de France puis s'être appuyé sur un réseau de représentants locaux. « Le seuil de volume atteint, nous devions créer une entité juridique brésilienne pour pouvoir obtenir la licence d'exportation » développe Marc Beaufils. Aujourd'hui, elle emploie 5 personnes.  A noter qu'établir une filiale n'est pas si facile, notamment avec l'obligation d'avoir une personne légale brésilienne, présente dans le pays.

Quoi qu'il en soit, l'une des clefs pour réussir au Brésil est de proposer des produits à haute valeur ajoutée. « Nous avons la nécessité de miser sur de la technologie de pointe si nous voulons percer au Brésil qui est un marché concurrentiel » assure Yvan Trouillot d'ECM. Bannir la qualité standard est une obligation pour réussir : « les spécificités techniques de nos produits, relayés par les réseaux de prescriptions (architectes, bureaux d'études) nous permettent de rivaliser avec la concurrence locale et chinoise » défend le directeur général International du groupe Serge Ferrari.

La patience comme vertu

« Le marché brésilien est au moins deux fois plus long qu'ailleurs. Nous avons mis 9 ans pour nous implanter » constate Daniel Doligez de la société 6D solution installée à Sainte-Foy-lès-Lyon et spécialisée dans le BTP. « Le Brésil, c'est un défi au long terme » confirme Pascal Rousseau, dirigeant de Processium, qui souhaite implanter des laboratoires dans le domaine biotechnique.

Les nombreuses contraintes expliquent qu'il faut du temps pour réussir au Brésil, auxquelles s'ajoutent celle du relationnel : « Il faut bâtir une aventure pérenne et prouver aux clients qu'ils peuvent avoir confiance en nous » analyse Pascal Rousseau. « La première commande est la plus dure à obtenir. Une fois obtenue, elle nous permet d'avoir une référence auprès des clients » explique Vincent Esteve, Directeur commercial en charge de l'Amérique du Sud chez ECM.

En dépit de l'adversité, les entreprises s'attaquent donc à ce marché. Même si le chiffre d'affaires des entreprises reste marginal sur cette localisation, il peut potentiellement faire exploser l'activité d'une société : « Si nous signons le contrat en cours, il représentera 70 % de notre CA actuel » confie le dirigeant d'ECM. Au Brésil, entre enfer et paradis, il n'y a qu'un pas. 

 

 

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Commentaires 2
à écrit le 19/06/2014 à 17:26
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C'est comme le marché français n'est-ce pas ? alléchant mais bourré de bureaucratie.

à écrit le 19/06/2014 à 12:36
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Très bonne synthèse du sujet. Pour les candidats à l'exportation au Brésil ne vous découragez pas. Mais faites vous aider.

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