Ces pépites qui visent la relève

Le fichier demeure jalousement gardé : 82 "PME à fort potentiel" ont été officiellement identifiées en Rhône-Alpes parmi les 35 000 PMI qui composent le tissu régional. Leur point commun ? Présenter suffisamment de critères d'autonomie, de capacité d'innovation et d'audace à l'export pour laisser espérer qu'on a affaire à une ETI en puissance.

Ce sont les chouchous de l'administration et des collectivités territoriales : "Les pépites dont on suppose qu'elles ont du potentiel, mais qui ne sont jamais à l'abri d'un retournement de marché", présente Alexandre Moulin, commissaire au redressement productif, qui a reçu du ministère la tache de "suivre" une centaine de PME de croissance. La méthode de repérage ? Revue de presse, analyse de bilan, et surtout bouche à oreille. Dans ce listing, on trouve pêle-mêle : La Boule Obut, qui rivalise sans complexe avec ses concurrents chinois sur le marché de la boule de pétanque, Fermob, le mobilier de jardin coloré qui plaît aux New-Yorkais, les sirops Routin, dont la famille Clochet vient de céder la main faute de successeur, et dans un secteur plus industriel Ryb, Maviflex ou encore Mecelec, qui avec 258 salariés, est coté sur Euronext.

Quelle coopération dans le cadre de la BPI ?

Au reste, il n'existe pas un mais plusieurs fichiers : ERAI, qui soutient le développement des entreprises à l'international, dispose du sien. L'ARDI, qui œuvre sur la branche innovation, toujours pour le compte de la Région, travaille sur sa propre base de données. La CCIR également. Tout comme la Direccte, dont le service d'Intelligence économique alimente sa propre veille. Chacun conserve envieusement ses données, car ces fichiers, qui sont en général la résultante d'un travail de fourmi effectué depuis des années, s'immiscent souvent dans l'intimité des entreprises. Eléments stratégiques, données à l'export, identification des partenaires-clés… Ce qui rend le partage d'information délicat. Tel est le contexte dans lequel fait irruption la BPI, dont la mission est de coordonner l'aide apportée aux PME afin de les aider à crever le plafond de verre et de répondre à leurs carences de capital. Si le travail de recensement existe bel et bien, il s'agit désormais de croiser les bases de données entre structures accompagnantes. Tâche non aisée, reconnaît Jean-Louis Gagnaire, vice-président du Conseil régional en charge du développement économique, qui vient de commander une feuille de route stratégique à celles d'entre elles qui se trouvent dans le giron de la Région, afin "de nous montrer pro-actifs et d'éviter de perdre du temps sur ces aspects".

Ouvrir des portes

Au-delà du travail de recensement, l'heure est à l'accompagnement personnalisé. Pour ces enfants chéris de l'économie régionale, il faut du sur-mesure. Les services de la Direccte viennent eux-mêmes frapper à leur porte, pour faire connaissance, et proposer d'accélérer leurs démarches sur toutes les questions qui sortent de la vie ordinaire d'une entreprise : décrocher un permis de construire, recruter un salarié étranger, mener une augmentation de capital, identifier un partenaire stratégique hors de son domaine technologique… Alexandre Moulin insiste sur le rôle de médiation assuré par ses équipes. "En général, les dirigeants se montrent contents que l'Etat s'adresse à eux pour autre chose qu'un contrôle réglementaire ou fiscal. Nous les aidons à renouer un lien avec l'administration ou les collectivités territoriales et favorisons les mises en relation". Le Plan PME, financé par la Région et l'Etat (à hauteur de deux-tiers et un-tiers) et coordonné par l'ARDI, dispose d'une enveloppe de 15 millions d'euros par an pour donner accès aux chefs d'entreprise à une palette de consultants, experts et formateurs. "En général, les équipes dirigeantes n'en sortent pas indemnes, observe Jean-Louis Gagnaire. Ce travail questionne fortement toute l'organisation interne, jusqu'aux rapports hiérarchiques qui régissent l'organigramme. Il s'agit de faire tomber les croyances, d'abandonner les pratiques anciennes. Pour un chef d'entreprise, c'est un peu comme se retrouver sur le divan du psy. Cela permet à l'entreprise de se replacer dans une nouvelle dynamique".  Car au-delà de la fameuse recette des "3 I" (Investissement, Innovation, International), les ressources humaines et la formation du dirigeant forment un levier décisif pour créer les conditions de passage au stade d'ETI. "C'est le point clé, reconnaît Alexandre Moulin. Le dirigeant d'une PME n'en a pas conscience lorsqu'il se lance dans une étape de croissance. Il sent en général que cela ne va plus chez lui, mais sans comprendre pourquoi. La raison est bien souvent qu'il n'a pas adapté sa vision des ressources humaines à sa stratégie. Pour passer du statut d'homme-orchestre à celui de chef d'orchestre, il faut témoigner d'une véritable capacité à remettre en question ses méthodes managériales. Toutes les PME ne réussissent pas à passer ce cap".     

 

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