Manitowoc rassemble ses forces vives et tourne la page Potain

Le groupe américain a réuni 300 de ses collaborateurs dans un nouveau siège social à Dardilly, dans la banlieue ouest de Lyon, conçu dans le cadre d’un projet participatif. Le repreneur des grues Potain doit définitivement cicatriser les plaies provoquées par les trois derniers plans sociaux et attirer des jeunes talents dans un métier technique et soumis à des cycles conjoncturels forts.

Après les restructurations, la recomposition. Le siège, flambant neuf, de Manitowoc Europe, Moyen-Orient et Afrique (EMEA), inauguré en octobre à Dardilly, dans le Rhône, contribue à redonner fierté à des salariés ayant vécu l'humiliation des trois derniers plans sociaux mis en oeuvre depuis 2009 chez Potain, entré en 2001 dans le giron du groupe transatlantique. "Etre acheté par un Américain nous a fait peur, à l'époque", témoigne Karine Jacquet, arrivée il y a 20 ans chez le fabricant tricolore de grues et maintenant administrateur CAO dans le service ingénierie. Elle se souvient aussi combien, en 2010, le rapatriement sur Ecully - où se situait le précédent siège datant de 1970 - des trois bureaux d'études, alors implantés dans les trois usines hexagonales de Potain*, a été douloureux pour les quelque 70 personnes concernées. D'autant que ce mouvement s'assortissait de la fermeture du site historique de La Clayette, en Saône-et-Loire où les époux Potain ont donné le jour à l'entreprise, en 1928. "Il a fallu monter des workshops pour aider les salariés déracinés à verbaliser et surmonter leur mal être", se rappelle cet ingénieur. Autant dire que la direction ne pouvait pas prendre le moindre risque quant aux nouveaux locaux. "Ils devaient se situer dans l'Ouest Lyonnais, près de l'ancien siège d'Ecully pour perturber le moins possible la vie du personnel", signifie en substance Philippe Cohet, directeur général de Manitowoc EMEA. Ce transfert a fait l'objet d'une longue anticipation (trois ans à l'avance) : "Nous l'avons voulu participatif pour que le personnel s'approprie le projet. Un groupe de travail de 15 personnes, représentatives de toutes les fonctions, s'est réuni plus d'une soixantaine de fois, et dans la dernière ligne droite, à raison d'une demi journée toutes les semaines, pour déterminer l'implantation de chaque poste de travail, entre autres. Ils ont souhaité organiser un concours pour baptiser les salles de réunions que nous pensions identifier par des chiffres. Leur choix s'est porté sur des noms de pays et de capitales", poursuit le dirigeant. Karine Jacquet, partie prenante dans ce groupe a ainsi apporté sa pierre à l'ergonomie et à l'adaptation du mobilier des personnes travaillant à la conception : "Ils avaient notamment besoin de tables plus grandes pour étaler leur plan, faire des calculs. Les choses ont beau avoir été préparées très en amont, il restait quelques détails pratiques à gérer, lors de l'emménagement". Telle la répartition des toilettes à l'étage de l'ingénierie qui compte 80 hommes pour 4 femmes: à certains moments les premiers doivent attendre leur tour faute d'urinoirs en nombre suffisant, alors que les femmes, ont chacune un WC! Toutefois, à quelques exceptions près, les 300 personnes rassemblées au sein de ce nouveau siège, sont satisfaites.

Rassurés

Le parti pris des open spaces, voulu pour favoriser la communication inquiétait les intéressés, a priori. Mais aujourd'hui sur place ils se disent, globalement, rassurés : l'insonorisation est bonne et l'espace vital individuel plutôt spacieux. Les six lieux de vie, très contemporains, agrémentés de tables et chaises hautes, et baignés par la lumière du jour, poussent aux échanges autour d'un café. Des mètres carrés restent disponibles, au rez-de-chaussée pour une salle de sports mais d'ores et déjà ceux qui s'adonnent au jogging, entre midi et deux,
disposent de deux douches.

Le bâtiment lui-même se compose de deux ailes réparties autour d'un grand hall d'accueil : l'une est dédiée aux activités dites support (finances, ressources humaines, communication, direction générale) et l'autre à la vie des produits: depuis la conception jusqu'au service après-vente, lequel était jusque là situé à Décines, dans l'Est Lyonnais. Un regroupement qui ne peut que rendre plus facile "la perpétuelle évolution de notre entreprise, une nécessité du
fait d'un contexte économique très mouvant", atteste le directeur général de Manitowoc EMEA effectuant, à partir de Dardilly, un milliard de dollars de chiffre d'affaires dans les grues, dont 85 % à l'exportation. Sur ce point "il nous faut trouver le bon équilibre entre les tâches devant être exécutées ici et celles devant être confiées aux 14 filiales locales", indique le dirigeant.

"flying doctors"

Après le choc provoqué par la crise mondiale de 2008 - le carnet de commandes s'est alors effondré de "75 %" -, Philippe Cohet est convaincu que "le pire est derrière nous". Pour le futur proche il prévoit "une stabilité voire ensuite de la croissance. Les grues vieillissent. Même si elles ont une durée de vie longue, elles ne sont pas éternelles. Dans les cinq prochaines années on assistera donc à un fort renouvellement du matériel. De plus, il existe des marchés qui émergent. Nous avons gagné de belles affaires en Turquie, ces dernières années, par exemple". Ces conquêtes commerciales s'appuient sur des équipes techniques, à la fois défensives et offensives. "Un système d'alerte nous informe de tous les incidents sur les chantiers. Nos "flying doctors", des experts qui ont 20 ans de maison, sont dépêchés en cas d'importants problèmes, équipés de leur boite à outils", explique Philippe Cohet. Pour l'aspect offensif, "nous nous sommes fixés trois défis permanents: réduire le poids des engins, sécuriser leur manipulation et accroître leur performance". Les grues de demain doivent s'adapter aux exigences de chantiers dont les délais se sont réduits et qui font de plus en plus appel au préfabriqué.

 

* Les deux autres unités de production sont sises à Saint-Nizier-sur-Charlieu, dans la Loire et
Avermes, dans l'Allier.

 

Par Marie-Annick Depagneux.

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