EdTech : les jeux vidéo veulent transformer l'apprentissage

Les jeux vidéo ne sont plus uniquement des jeux sur console réservés aux jeunes geeks. Alors que l'e-sport se développe largement - la chaîne spécialisée Twitch a été rachetée par Amazon pour 970 millions de dollars -, une des autres tendances de fond est l'EdTech, dont les jeux vidéo à visée pédagogique font partie. Si en France, le marché en est à ses balbutiements, il est déjà en pleine expansion aux Etats-Unis.
Image d'illustration

"Quand j'ai vu quels jeux étaient proposés aux enfants sur les tablettes, je me suis dit que cela n'était pas du tout abouti", se souvient Vanessa Kaplan. En 2012, elle a donc co-fondé avec trois autres collaborateurs un studio de création de jeux vidéo à visée pédagogique, basé à Lyon : Kiupe. "Nous cherchions à réaliser un vrai jeu vidéo, qui ne soit pas seulement un quizz. Nous avons donc conçu MatheMathews ", raconte-t-elle lors du forum Jeunes Femmes et numérique organisé par Social builder à l'Inseec à Lyon, jeudi 6 octobre.

Selon elle, jusqu'à présent, le marché est soit composé de jeux très éducatifs, soit de jeux vidéo classiques. Il fallait donc trouver un compromis : un serious game, ou jeu sérieux, pour enfants.

Outil pédagogique

Alors que dans l'imaginaire les jeux vidéo sont parfois associés à la violence, ils semblent acquérir ses lettres de noblesse en devenant désormais un véritable outil d'apprentissage pour les plus jeunes.

"Au-delà du fait que le jeu vidéo est ludique, s'il est bien réalisé, l'enfant aura envie d'y revenir. Nous utilisons donc les mécanismes du jeu vidéo pour lui permettre d'apprendre. Par ailleurs, dans un jeu vidéo, on ne peut pas "mourir", donc l'enfant se dit qu'il peut persévérer et aller plus loin dans l'histoire."

Pour Alain Thillay, chef du département du développement et de la diffusion des ressources numériques au ministère de l'Education nationale, ces jeux "sont une ressource, parmi d'autres, pour les enseignants et font déjà partie d'une palette pédagogique enrichie". Mais l'apprentissage ne peut se faire que s'il existe "une médiation pour entrer dans le jeu et consolider les actions, et une partie réflexive. Pour nous, cela est au cœur du sujet", affirme-t-il.

Paris révolutionnaire

Outre les jeux vidéos conçus pour apprendre, certains professeurs détournent également les jeux vidéos plus classiques, à l'image de Pascal Meriaux, professeur d'histoire-géographie à Lyon. En classe, le professeur utilise Assasin's Creed - développé par Ubisoft : "Cette série offre un fabuleux travail de reconstitution historique. Dans la première version, on découvre Florence, puis Constantinople au 15e siècle et dans dernière version, le Paris révolutionnaire", expliquait-il en avril 2015, lors d'une journée d'étude à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS).

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"Je ne me bats pas contre mes élèves, mais je m'en sers grâce aux personnages pour observer ce que pouvaient être ces villes. Nous travaillons également avec les élèves en réfléchissant par exemple aux sources qu'Ubisoft utilise", ajoute-t-il également.

Démocratisation

Une des raisons qui explique ce déploiement du gaming est la démocratisation du jeu vidéo, notamment lié à la diffusion des smartphones et tablettes.

"Auparavant, il fallait être un geek et acheter une console. Maintenant, ils sont accessibles à tous", explique Rebecka Coutaz, dirigeante du studio d'Ubisoft à Annecy.

Là-bas, 180 personnes travaillent à la réalisation et la conception de jeux vidéo.

"De plus en plus de jeux vidéo s'adressent au grand public. Nous ne sommes plus dans le stéréotype du mâle blanc entre 15 et 26 ans", souligne-t-elle également. Preuve en est, en 2005, 25 % de la population était des joueurs réguliers, contre 53 % en 2015.

EdTech

Avec l'e-sport et la réalité virtuelle, l'EdTech, autrement dit les nouvelles technologies appliquées au champ de l'éducation, est l'une des tendances de fond ces dernières années quant à l'évolution des jeux vidéo. Selon le Boston consulting group, le secteur a attiré en 2015 des investissements à hauteur de 4,5 milliards de dollars au niveau mondial, et les prévisions de croissance sont de l'ordre de 20 % par an.

Par ailleurs, l'EdTech fait partie des cinq nouveaux réseaux thématiques de Lyon French Tech depuis la fin du mois de juillet 2016. Le rôle de ces réseaux est d'accélérer la croissance des startups à fort potentiel, preuve que le secteur est porteur.

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Cependant, si le marché est en pleine expansion aux Etats-Unis, il reste encore fébrile en France où "toutes les écoles ne sont pas équipées. Mais des entreprises se montent et réfléchissent à la façon dont on peut apprendre autrement", souligne Vanessa Kaplan.

D'ailleurs, Kiupe collabore avec le CNRS sur un nouveau projet de recherche en science cognitive.

"Ils se sont intéressés au fait que le jeu vidéo pouvait aider tous les enfants à apprendre. L'idée est de proposer le bon contenu au bon moment."

Autrement dit, si l'enfant a compris la leçon, il pourra passer au niveau supérieur. Si ce n'est pas le cas, le jeu va adapter la façon de lui enseigner. De quoi ouvrir le champ des possibles dans ce secteur qui n'est définitivement plus réservé aux geeks.

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