Enseignement supérieur : l'autre enjeu de l'axe Lyon-Chine

Chaque année, 10 millions de jeunes chinois arrivent sur les bancs de l'enseignement supérieur. Parmi eux, seuls quelques milliers (entre 3 500 et 5 000 étudiants selon les estimations) choisissent des structures lyonnaises. Un potentiel de taille pour des établissements en quête de nouveaux marchés, que la réouverture active du Nouvel Institut Franco-Chinois pourrait contribuer à développer.

Ce jeudi 15 septembre, Thierry de la Tour d'Artaise, président du Nouvel Institut Franco-Chinois et président-directeur général du Groupe Seb et Gérard Collomb, sénateur-maire de Lyon célébraient, en présence de nombreuses personnalités du monde économique et de l'éducation, la réouverture officielle d'un établissement lancé en 1921. L'héritier de l'Institut Franco-Chinois dévoile ses ambitions : renforcer les liens culturels, économiques mais aussi universitaires entre Lyon et la Chine.

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De l'ancien au Nouvel Institut Franco-Chinois

Entre 1921 et 1946, l'Institut Franco-Chinois accueillit près de 500 étudiants chinois, dont la majorité constitua l'élite intellectuelle. Dans cette maison bourgeoise, toujours située dans l'actuelle enceinte du Fort Saint-Iréné (Lyon 5e), se succédèrent poètes, architectes ou physicien. Fermé après la Seconde Guerre mondiale, faute de budget et d'intérêt pour l'éducation, l'Institut Franco-Chinois resta une belle endormie jusqu'en 2014, n'ouvrant ses portes qu'à de rares occasions, de quelques visites privées aux Journées du Patrimoine.

A cette date, Xi Jinping, président de la République populaire de Chine, commençait sa visite officielle française par Lyon... et l'Institut Franco-Chinois. Un signal fort pour les observateurs de l'intérêt de la seconde puissance économique pour Lyon, marquant le début d'une seconde vie pour l'institut.

Réhabilitation du site, constitution d'une association pour lancer le projet, chasse aux mécènes : désormais, entreprises régionales qui ont des intérêts en Chine (Groupe Seb, Bank of China, EFI Automotive, Serge Ferrari...), institutions (Métropole de Lyon, Ville de Lyon, Aderly...) et universités fondatrices (Université de Lyon, Université Lyon 3 et 3 autres universités chinoises) animent ce nouveau lieu, ouvert au grand public via une exposition permanente et temporaire. Un volet culturel développé, notamment, en partenariat avec Yishu 8, la Maison des Arts de Pékin, elle-même installée dans les locaux de l'ancienne université franco-chinoise de Pékin. Un dernier symbole.

40 accords universitaires

Mais les établissements d'enseignement supérieur lyonnais n'ont pas attendu la réouverture de l'institution pour se lancer sur le marché chinois de l'éducation. Quarante accords universitaires existent entre les Lyonnais et leurs homologues chinois, sous diverses formes : diplômes conjoints, échanges d'étudiant en mobilité et programmes de recherche communs.

À leur tête, l'Université de Lyon, qui possède un bureau de représentation à Shanghai et des accords celés par ses membres. L'Université Lyon 3 et l'emlyon sont partenaires de l'Université Sun Yat-Sen de Canton, quand l'ENS de Lyon, l'entreprise Solvay et le CNRS ont établi un partenariat de recherche avec l'East China Norma University. A cela s'ajoute des institutions dont le savoir-faire est reconnu en Chine : Institut Paul Bocuse ou Ecole Emile Cohl.

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Montée en gamme qualitative

Dans ce contexte, un institut pour favoriser les liens est-il encore nécessaire ?

"L'institut est un point de convergence pour tous. Il est important d'avoir une stratégie groupée pour avoir une qualité de formation d'un niveau international", souligne Jacques Comby, président de l'Université Lyon 3.

Car l'objectif n'est pas tant d'attirer plus d'étudiants, mais bien d'attirer les plus qualifiés d'entre eux.

"Nous allons surtout approfondir nos échanges avec le secteur de la recherche et mieux cibler la qualité des demandes en mobilité", poursuit Jacques Comby.

L'université lyonnaise travaille déjà à la mise en place d'un nouveau projet pluridisciplinaire entre la France, la Chine et le Canada sur les questions de santé et les modèles économiques autour de la santé.

Survivre au modèle anglo-saxon

"Les échanges académiques entre nos deux pays rentrent dans une nouvelle phase, nous allons renforcer notre coopération avec de nombreuses écoles et explorer de nouveaux projets de recherche. C'est un nouveau chapitre qui s'ouvre pour une nouvelle génération d'étudiants et d'élite chinoise", indique Ma Jun, vice-président de l'Université Sun Yat-sen de Canton.

Il n'est donc pas seulement question de se tailler une part du gâteau. Il s'agit aussi de gagner, à plus long terme, une bataille intellectuelle.

"La gratuité apparente des études supérieures françaises peut desservir nos positions. Car dans l'esprit général, ce qui est gratuit n'est pas forcément de qualité. Or, nous devons rester dans le système de formation des élites chinoises, pour contribuer à développer cet esprit d'analyse nécessaire à la créativité et à l'innovation dont à besoin la Chine, et qui commence a émerger.

Mais c'est également nécessaire pour "rester dans l'esprit" de ces futures élites. Si les futurs décideurs nous connaissent, ils auront moins de difficulté à commercer avec nous à l'avenir", analyse Jean Dorey, ancien directeur de l'école centrale de Lyon, consultant spécialisé sur la Chine.

Chahuté par les grosses machines que sont les universités anglo-saxonnes, le modèle français, dont la langue peut être un handicap, peine parfois à se faire reconnaître. "Mais nous restons dans la course, notre qualité est bien perçue en Chine", rassure Jean Dorey. Et le Nouvel Institut Franco-Chinois pourrait y contribuer.

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