"On va passer du monde de l'entrepreneuriat à celui de l'intrapreneuriat (Raise France)

Persuadés qu'il est possible de concilier croissance, bienveillance et fonds d'investissement performant, Clara Gaymard, ancienne présidente de General Electric, et l'investisseur Gonzague de Blignières ont imaginé Raise, une société d'investissement (650 M€ sous gestion, 200 M€ en investissement) d'un nouveau genre. Ils livrent leur regard sur un monde entrepreneurial en pleine mutation.
Clara Gaymard et Gonzague de Blignières
Clara Gaymard et Gonzague de Blignières (Crédits : SB)

ACTEURS DE L'ECONOMIE - LA TRIBUNE. Est-ce que l'entreprise traditionnelle est condamnée si elle ne se plie pas au changement ambiant ?

CLARA GAYMARD. "Tout le monde parle aujourd'hui d'Internet des objets (IoT), d'intelligence artificielle, de digital ou de robotique. Or, la réalité du changement n'est pas que technologique. Ce qui est en train de s'opérer, c'est un changement d'attitude, de comportement et de valeurs. Désormais, les entreprises qui marchent, ce sont celles qui partagent, qui sont généreuses et qui embarquent leurs salariés. Il ne s'agit pas de donner des "choses" aux salariés, mais plutôt de les rendre responsables en leur permettant de participer à un destin commun. L'entreprise, en étant généreuse, performe.

GONZAGUE DE BLIGNERES. "On va passer du monde de l'entrepreneuriat au monde de l'intraprenariat. Une entreprise ne peut plus vivre à côté des startups comme une jeune pousse ne peut plus vivre sans l'entreprise. Par exemple, prenez le cas de Socomore, une entreprise bretonne, que nous accompagnons, sous-traitante du secteur de l'aéronautique. Elle vient de construire son nouveau siège social dans lequel le patron a imposé 800 m2 d'incubateurs pour startup, et pas forcément de son métier. Il veut que ses cadres puissent prendre leur café en leur compagnie, les côtoyer. Ces différents mondes sont obligés de se parler : une des idées de Raise, c'est justement de créer des ponts entre les grands groupes et les startups.

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Justement, comment favoriser les ponts ? Il ne suffit pas de créer un incubateur pour que le lien se fasse...

CG. On a fondé Raise avec la volonté de faire quelque chose pour notre pays, de changer le monde. Nous nous sommes basés sur une idée très simple : il faut accompagner les entrepreneurs de toutes tailles, investir dans des PME en leur faisant confiance et introduire cette dose de générosité dont je parlais plus haut. De ce fait, nous donnons 50 % de nos bénéfices à Raisesherpas, un fonds de dotation destiné à aider les jeunes entrepreneurs. Il faut revenir à l'idée qu'on a tous un destin commun, qu'on a tous la volonté commune d'apporter le meilleur à la société. Cela ne passe pas forcément par l'observation unique des résultats financiers, comme on l'a trop fait, mais justement par une vision globale de ce qui est possible de faire.

Le possible d'aujourd'hui est absolument immense, c'est un nouveau continent à explorer, ensemble. Mais la nouveauté, c'est que cela met tout le monde à égalité sur la ligne de départ. Nous avons la conviction que la générosité est payante et qu'un monde meilleur est un monde où chacun à sa place et puisse bénéficier d'un gâteau qui grandit.

Quelles pistes pour une rencontre efficace ?

GB. Tout est question de langage. Il y a celui des grands groupes, des ETI et celui des startups. À ces dernières, on dit d'oser venir nous voir, car ne pas oser, c'est déjà perdre. Nous avons déjà accompagné, à travers divers programmes, près de 2000 startups, investi dans une dizaine d'ETI et on bénéficie de 55 actionnaires dans des grands groupes.

Dans le cas de ces derniers, nous considérons que nous sommes les mieux placés pour leur parler. Les deux clés pour une startup sont : le temps et la rencontre. Le temps tue les startups. On essaie donc d'accélérer les deux : optimiser la rencontre et réduire le temps.

CG. ll faut aplanir les obstacles naturels pour que cela se fasse. Et construire ces rencontres. Aux Etats-Unis, si vous demandez un rendez-vous à quelqu'un d'important, il va vous recevoir et vous écouter. S'il pense que vous avez quelque chose à apporter, il va vous aider même si ce ne sera pas forcément pour son bénéfice direct. Il se dit juste que si cette personne va accroître le champ des possibles, d'une manière ou d'une autre, j'y trouverai mon intérêt.

On a trop souvent en France le sentiment que le gâteau a une taille définie alors que non, il peut grandir. Nous qualifions les rencontres : elles sont toujours sur une thématique ou un sujet précis. On rend la rencontre utile du moment que les deux personnes peuvent s'apporter quelque chose.

Vous semblez particulièrement optimistes sur l'avenir...

GBOptimistes, oui ! Parce qu'on vit avec les jeunes ! Mais attention, il y a nombre de choses qui ne vont pas, l'argent va à l'argent, il est détenu entre trop peu de mains, il y a eut une perversion du capitalisme traditionnel.

CG. On a choisi de faire avancer le navire. On laisse le soin aux observateurs de critiquer, nous faisons le nécessaire pour que cela change"

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