"Ce sont les auto-écoles en ligne qui sont rétrogrades ! " (Sophie Karsenty, CNPA)

Gérante d'une auto-école, Sophie Karsenty est également la présidente du Conseil national des professions de l'automobile (CNPA), section éducation routière, dans le Rhône.
(Crédits : Charles Platiau)

Vous restez mobilisée contre l'ubérisation du permis de conduire. Pensez-vous réellement pouvoir faire reculer le gouvernement là où les taxis n'y sont pas parvenus avec des revendications similaires ?

Oui, nous espérons faire bouger le gouvernement. Il faut avoir bien conscience que l'on parle de jeunes de 15 à 18 ans qui apprennent à conduire. On touche donc à la sécurité routière. Nous rencontrons des élèves qui nous disent qu'ils n'apprennent rien avec les plateformes en ligne ! Car les moniteurs indépendants qui travaillent pour les auto-écoles en ligne n'ont aucune pression quant aux résultats des élèves qu'ils accompagnent. Comme les élèves passent ensuite le permis en candidat libre, il n'existe aucun moyen de contrôle du taux de réussite des auto-écoles en ligne. Ces plateformes sont un miroir aux alouettes.

Vous espérez la fermeture des auto-écoles en ligne ?

On ne veut pas qu'elles cessent leur activité, mais simplement que les règles soient les mêmes pour tout le monde. Nous considérons qu'il y a un lien de subordination entre les moniteurs indépendants et ces plateformes, nous devons donc payer les mêmes charges. Alors, soit on diminue nos charges, soit on augmente celles des plateformes en ligne. Ensuite, on prendra en compte le taux de réussite au permis, et seules les meilleures auto-écoles resteront.

La concurrence des plateformes en ligne se traduit par une forte inflation des liquidations judiciaires d'auto-écoles (+ 27 % pour près de 450 fermetures en 2017). Pensez-vous que le modèle économique des auto-écoles avec agences soit encore viable ?

Notre modèle est viable si la concurrence redevient normale et si l'on arrête de dire que les auto-écoles sont chères.

C'est pourtant bien ce que laissent penser les clients qui se tournent vers les plateformes en ligne avant tout pour leurs tarifs attractifs...

Passer le permis de conduire a effectivement un coût, mais ce n'est pas cher : 2000 euros pour apprendre la conduite pour les cinquante prochaines années de sa vie, cela ne me paraît pas excessif. Vouloir faire baisser le prix du permis de conduire, comme l'annonce Emmanuel Macron, est une proposition électoraliste. Car après, si les jeunes sont mal formés sur les routes, c'est la société qui va payer.

Mais on a également l'impression que les auto-écoles rencontrent des difficultés à répondre au défi d'innovation.

Je dirais qu'il y a encore 30 % des auto-écoles qui fonctionnent à l'ancienne, mais les autres proposent depuis longtemps le code en ligne, des cours en salle avec des supports pédagogiques, des livrets de formation électroniques. Les plateformes ne sont pas innovantes. Elles n'ont pas de local, donc pas de simulateurs de conduite, les élèves sont récupérés au coin de la rue pour leurs leçons... Ce sont elles qui sont rétrogrades !

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