"Nos entreprises doivent considérer le marché européen comme un marché domestique"

Présidente de l'Alliance Silicon Europe depuis octobre 2016, Isabelle Guillaume, également directrice générale de Minalogic, détaille le rôle de cette structure qui rassemble 12 clusters européens d'excellence autour d'un objectif commun : renforcer l'industrie européenne du numérique et de la micro-électronique en favorisant les fertilisations croisées.

Acteurs de l'économie - La Tribune. Quel est le but de cette alliance européenne ?

La mission de cette alliance est de créer plus d'innovations, plus de R&D et plus de relations business entre ses membres. Cette alliance fédère, à travers les 12 pôles communautaires adhérents, environ 2 000 membres du secteur du numérique et de la micro-électronique : à 75 % des PME, mais aussi des laboratoires de R&D européens. Il s'agit de faire, à l'échelle européenne, ce que chacune des structures réalise avec excellence à son échelon local. En somme, l'objectif est de crossfertiliser nos écosystèmes.

La perception et le potentiel du marché européen, pour les entreprises communautaires, sont-elles encore sous-exploitées ?

Les ambitions claires de cette alliance sont d'aider nos membres à ce que l'Europe soit un marché aussi facile que celui de leur territoire domestique. Le terrain continental doit devenir un terrain de chasse naturel.

La taille du marché européen a une vraie équivalence par rapport à celui américain. Mais l'avantage de ce dernier est que, de par la structure fédérale du pays, il est plus simple pour leurs entreprises de faire du business entre les États. A contrario, le marché européen est encore fragmenté. Il faut aider les petites entreprises innovantes à se développer, en les poussant à considérer désormais l'Europe comme une chasse gardée et non plus comme une chasse impossible. À leur tour, comme c'est le cas aux USA, les entreprises européennes doivent donc voir de façon facile et accessible la possibilité de commercer dans les "États" communautaires européens.

Les entreprises de l'alliance peuvent-elles viser d'autres marchés mondiaux ?

Le marché taiwanais regorge d'opportunités. Celui-ci a des demandes sur les applications, dans la santé ou encore l'usine du futur. En dépit de la concurrence et de la montée en gamme de certains lieux de production mondiaux, Taiwan veut rester l'une des manufactures les plus importantes du monde. Il cherche donc à monter en compétences technologiques, ce qui ouvre de nombreuses opportunités pour nos entreprises. C'est, de plus, une porte d'entrée non négligeable sur la Chine continentale.

Nous regardons également en direction du marché nord-américain.

Quels sont les leviers d'action de l'alliance pour atteindre ses objectifs ?

La mission de l'alliance est en droite ligne avec les plans de la Commission européenne, et la philosophie du commissaire européen à l'Économie numérique, Günther Oettinger. Il souhaite créer un marché numérique unique. Des fonds européens sont disponibles dans le cadre du programme Horizon 2020, et nous avons l'ambition d'aller les chercher. L'enveloppe générale de financement est très importante, de l'ordre de 79 milliards d'euros. Une somme ensuite répartie selon les fléchages et les secteurs. Nous ciblons les fonds liés aux projets ICT.

La structuration de notre alliance nous permet un accès privilégié à ces subventions. Car, pour accéder à ces fonds européens, trois prérequis sont demandés aux entreprises, et auxquels l'alliance tente de répondre.

Premièrement, les entreprises potentiellement concernées doivent avant tout connaitre l'existence même de ces appels à projets. Chaque pôle, en faisant sa propre veille peut repérer tel ou tel projet et construire une offre commune avec des membres de l'alliance. Ensuite, pour être en position de candidater, il faut intégrer un consortium composé d'entreprises d'au moins trois pays européens. En assurant une mise en réseau, nous favorisons les collaborations et les candidatures communes. Enfin, il faut que les membres de ce consortium soient en capacité de s'intégrer pleinement dans cette collaboration. Les pôles, à l'image de Minalogic, construisent une offre en ce sens-là.

Comment gérez-vous la mise en réseau de vos membres ?

Nous n'allons pas créer une base de données géante. Le premier objectif essentiel, pour atteindre nos objectifs, est de créer une confiance profonde entre les différents membres de l'alliance.

Et cette confiance se noue par les rencontres, la mise en relation, et passera donc par des invitations lors des événements organisés par chacun des pôles. Un phénomène que le pôle grenoblois a déjà enclenché, à travers les Minalogic Business Meetings et les Brainstorming projets qui avaient déjà une petite dimension européenne l'an dernier.

Mais ce mouvement devra être amplifié au niveau européen, avec la volonté de construire ces événements au périmètre de l'alliance. Par exemple, nous pourrions transposer le modèle de la Journée Open Innovation organisée par Minalogic à l'échelle de l'Alliance, en mettant en relation un grand compte privé ou public et des startups/PME membres des clusters, afin de générer des collaborations business et/ou R&D.

Comment analyserez-vous la réussite de cette alliance, et donc de votre mandat ?

J'ai proposé des plans d'actions, qui passeraient par l'identification de "leaders" au sein du groupement qui, à leur tour, proposeraient des objectifs chiffrés. Le travail est en cours, mais les indicateurs de réussite pourraient se traduire par le nombre de PME adhérentes postulants aux appels d'offres européens, l'impact concret traduit par le nombre de nouvelles commandes décrochées par nos entreprises, mais aussi, le nombre d'entreprises participant aux événements des autres clusters membres.

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