Le 29 août dernier, le Premier Ministre annonçait les premières mesures issues des Assises de l'eau, cette initiative lancée au Printemps pour "se mettre collectivement dans la peau d'un élu gestionnaire de son réseau d'eau, bâtir un diagnostic des difficultés, et y apporter des solutions communes, intelligentes, souples", avec pour principal enjeu : "amorcer très vite un mouvement de rattrapage indispensable", après des décennies de sous-investissement chronique dans nos réseaux d'eau.

La connaissance comme prérequis à l'action

Sans surprise, l'une des premières mesures de ces Assises de l'eau, qui sous-tend toutes les autres, vise à améliorer la connaissance des services d'eau et d'assainissement sur l'ensemble du territoire. Un domaine sur lequel la marge de progression est en effet conséquente, alors que seuls 50 % des services d'eau et 40 % des services d'assainissement publient aujourd'hui leurs données.

Avec pour double conséquence, que plus de 40 % des élus ne connaissent pas bien leur réseau, et que près d'un français sur deux réclame désormais plus d'informations sur l'eau et son traitement.

Et dans notre nouveau monde numérique, la réponse à cette double problématique passe par la donnée. Cette "data" que l'on doit savoir collecter, exploiter et mettre à disposition. Cette data qui doit nous permettre de rendre nos réseaux d'eau "intelligents".

La donnée comme outil de diagnostic et d'aide à la décision

Pour le gestionnaire de réseaux d'eau, la donnée, collectée notamment grâce à l'installation de capteurs sur ses compteurs, va permettre de poser un diagnostic fiable sur son réseau, pour détecter précisément ses failles, et établir un plan de priorité, par exemple pour ses investissements de rénovation ou remplacement de canalisations, tout en optimisant la détection et la gestion des fuites.

Une approche urgente et nécessaire, quand on sait que pas moins d'un litre d'eau potable sur cinq est perdu dans des fuites de canalisations en France. Soit 1 300 milliards de litres d'eau par an qui sont traités par les usines sans jamais arriver jusqu'au robinet, et qui sont pourtant payés par les consommateurs, puisqu'ils sont indirectement répercutés sur les tarifs de l'eau facturés aux abonnés.

Mais aussi nécessaire soit-elle, cette approche s'annonce également longue et fastidieuse pour équiper un réseau de distribution d'eau potable français qui s'étend sur plus de 920 000 kilomètres, soit 23 fois le tour de la Terre.

La donnée comme instrument de la transparence

Pour l'usager, particulier ou entreprise, la donnée, collectée via les nouvelles générations de compteurs intelligents, va permettre un accès jusqu'ici inédit à ses informations de consommations. À la clé : une consommation maîtrisée, une facture optimisée, et une modification des usages bénéfique à la préservation de la ressource en eau.

De quoi poursuivre la prise de conscience, déjà amorcée, sur l'importance d'une utilisation raisonnée de l'eau domestique. Une consommation qui est passée, en France, de 106 litres par jour et par habitant en 1975, à 165 litres en 2004, pour revenir aujourd'hui à un niveau moyen de 148 litres d'eau par jour et par habitant.

L'accès de l'usager à ses données via son compteur d'eau intelligent s'inscrit par ailleurs dans la tendance de la domotique et de l'Internet des Objets, et répond à une attente des usagers de pouvoir "piloter" leur maison grâce aux informations fournies par ce type d'innovations technologiques.

Sans oublier qu'au final, pour tous, l'amélioration de la connaissance des réseaux et la maîtrise des consommations d'eau, grâce à la donnée, pourra être une des clés pour rouvrir l'éternel débat sur le "juste prix de l'eau". Un prix lui aussi "intelligent", qui prendrait en compte les besoins d'investissements des gestionnaires de réseaux, tout en intégrant les consommations réelles des usagers.