Jeunes, actifs, seniors... font-ils toujours société  ?

Le vivre-ensemble est bouleversé. Est-il en péril ou simplement en redéploiement ? Serge Guérin, sociologue, professeur à l'INSEEC, apporte sa vision dans cette tribune publiée dans le cadre du forum "Une époque formidable" organisé à Lyon, ce lundi 15 octobre 2018 par Acteurs de l'économie - La Tribune. Il débattra en compagnie de Jean-Paul Delevoye.
(Crédits : Laurent Cerino / ADE)

Le débat sur les retraites continue de parcourir la société. Cela fait plus de trente ans que cela dure. À chaque fois le même psychodrame, les mêmes inquiétudes et postures. L'équation est toujours un peu la même : recul de l'âge de départ, hausse des cotisations, baisse des prestations. La modulation varie, mais dans un contexte d'incapacité à créer suffisamment d'emplois, de mépris pour les métiers du service, d'indifférence à la situation des plus fragiles qui auraient bien besoin de plus d'accompagnement, et d'augmentation continue de la population en âge de travailler et de l'immigration, l'imagination n'a pas pris le pouvoir.

Lire aussi : FORUM "Une époque formidable"

Travailler plus longtemps n'apparaît pas comme une envie partagée par le corps social. Pourquoi ? Les résultats du dernier baromètre Ipsos pour la fondation Korian pour le « bien vieillir », le confirment. Lorsque l'on demande aux Français de plus de 65 ans si les seniors peuvent avoir le droit de ne pas partir en retraite, ils refusent à 49 %, contre 38 % du côté des seniors belges et tout juste 17 % outre-Rhin. Les Français de moins de 65 ans sont encore plus réfractaires à cette idée : 53 % pensent nécessaire d'obliger les seniors à ne pas travailler au-delà de l'âge légal de la retraite...

Un retraité est un actif social

Cette situation s'explique en grande partie par les représentations négatives sur le travail comme à propos des seniors. Elle vient aussi de la situation de l'emploi et de notre culture du chômage de masse. Pour en sortir, quelques pistes existent. Ainsi, dès le début des années 1980, l'économiste Dominique Taddéi, proche de Michel Rocard, évoquait l'idée d'une retraite à la carte, d'une retraite progressive. Le gouvernement planche sur une autre piste, celle des comptes à points qui auraient au moins l'avantage d'une meilleure visibilité et d'une plus grande équité entre les personnes via l'harmonisation des différents régimes.

Lire aussi : L'intergénération, un modèle d'entreprise

Mais ne faudrait-il pas aussi chercher du côté du développement des emplois d'utilité sociale solidaire (accompagnement en formation, renforcement de l'éducation à une culture commune, soutien aux plus fragiles...), pas nécessairement rentables à court terme ? En ces temps où la prise de conscience de la finitude de notre bonne vieille planète Terre commence à émerger, ne faudrait-il pas aussi valoriser autrement non pas les emplois mais l'activité ? Un retraité est un actif social qui peut produire du lien, favoriser la solidarité, contribuer à une vie bonne mieux partagée. À l'inverse, il est des activités professionnelles, parfois très bien rémunérées, dont l'apport à la collectivité est discutable, voire négatif. L'enjeu est donc de changer de regard et de comprendre que les retraités sont un actif et non un passif pour la société.

Serge Guérin : co-auteur de La Silver économie (La Charte, 2018) ; La Guerre des générations aura-t-elle lieu ? (Calmann-Lévy, 2017).

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 26/10/2018 à 10:03
Signaler
Bravo !

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.