Marchés publics de la Défense : l’Etat a-t-il vraiment pour ambition de faire grandir nos PME ?

L’appel à concurrence de la DGA pour le remplacement du fusil de précision semi-automatique (FPSA) est lancé. Mais les conditions drastiques énoncées bloquent d’emblée les PME françaises explique Guillaume Verney-Carron, directeur général de Verney-Carron.

La Délégation Générale pour l'Armement (DGA) a lancé le mois dernier son appel à concurrence pour le remplacement du fusil de précision de l'Armée (FR-F2). Mais la DGA a décidé de fixer des conditions draconiennes pour pouvoir postuler à ce marché. Et notamment un seuil de chiffre d'affaires de 50 millions d'euros.

Il y a deux ans, la question s'était déjà posée lors de l'appel d'offres visant à remplacer le FAMAS (AIF). Le chiffre d'affaires exigé était alors de 80 millions d'euros pour 90 000 fusils. Pour le fusil FR-F2, la commande du Ministère de la Défense porte sur 2 600 unités. Comment la DGA a calculé ce seuil minimum de 50 millions d'euros et pourquoi ne pas avoir alloti le marché ?

Évidemment, il est fondamental que nos Armées se fournissent auprès d'entreprises fiables et solides, même si la solidité d'une entreprise ne se mesure pas uniquement à son chiffre d'affaires.

Verney-Carron réalise un chiffre d'affaires annuel de 14,5 millions d'euros en moyenne sur les trois dernières années et existe depuis 200 ans. Par conséquent, lorsque l'on fabrique 12 000 armes chaque année, en livrer 2 600 sur 4 ans est largement à notre portée. Ajoutons aussi qu'avec le Flash-Ball®, nous travaillons depuis longtemps avec l'État, auprès duquel nous avons déjà démontré notre savoir-faire industriel et notre capacité à piloter des projets avec succès. Et en prévision de cet appel à concurrence, Verney-Carron a pourtant déjà investi dans la mise au point d'un nouveau fusil, le VCD-10.

L'appel à candidatures en cours suscite donc une vraie inquiétude, surtout quand on sait que le dernier appel d'offres évoqué ci-dessus avait été attribué à des Allemands. Alors que la priorité du gouvernement en cette rentrée va à la loi PACTE, censée favoriser la croissance de nos PME et nous apporter 0,3 % de croissance, il serait surprenant que dans ce contexte, l'Etat ne joue pas lui aussi sa partition en privilégiant la meilleure politique qui soit pour ses PME et ses entreprises : leur faire confiance dans les marchés publics ! C'est précisément ce que font nos partenaires allemands pour permettre à leurs PME de devenir des ETI et, partant, de réussir à l'export.

Soutenir l'industrie française de Défense

Au vu de ces exigences, aucun fabricant français ne semble en mesure de répondre à ces critères, en dépit même du Pacte Défense PME qui avait été mis en place pour favoriser les collaborations entre l'Armée et les PME.

Si les pouvoirs publics font souvent référence au droit européen pour justifier la teneur de leur appel d'offres, rappelons, là encore, que nos voisins allemands - soumis à la même législation - trouvent toujours les solutions pour soutenir leurs industriels nationaux et les produits qu'ils fabriquent sur leur territoire. La France et, notre économie en général, aurait tout intérêt à s'inspirer de ces pratiques.

In fine, les acteurs français qui souhaiteront se positionner sur marché n'ont donc qu'une solution : monter un groupement d'opérateurs économiques avec d'autres partenaires.

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