Donald Trump : la colère entre à la Maison Blanche

Vincent Michelot, professeur des Universités à Sciences Po Lyon, analyse la victoire de Donald Trump aux élections présidentielles américaines.

Minoritaire dans les suffrages populaires mais majoritaire dans le collège électoral, appuyé par une majorité républicaine dans les deux chambres du Congrès alors qu'il a sans cesse agressé l'establishment de son propre parti pendant la campagne électorale depuis les primaires, armé de la possibilité de faire basculer la majorité idéologique à la Cour suprême, Donald Trump deviendra le 20 janvier 2017 le 45ème président des États-Unis.

Il entrera à la Maison Blanche avec un vrai mandat de gouvernement car la mobilisation sans précédent des cols bleus et des Blancs non-diplômés, le ralliement tardif mais réel des Blancs diplômés de l'enseignement supérieur, y compris des femmes, indiquent bien qu'il ne s'agit pas d'une simple élection de rejet de la candidate démocrate, enfermée dans son incarnation de la continuité et de la stabilité au moment où une majorité d'électeurs, au terme de deux mandats qui ont usé le crédit du parti démocrate mais plus généralement de la classe politique, exigeaient un changement radical et parlaient de  "renverser les tables".

Pas de programme économique ou social

La liberté de Donald Trump est d'autant plus forte qu'il n'a pas réellement présenté de programme, économique ou social, si ce n'est la promesse, facile à tenir, d'abroger la réforme de la santé conduite par Barack Obama. Sa seule contrainte en la matière est minime : il lui faudra trouver une alternative à une loi qui n'est pas aimée dans sa globalité mais très appréciée pour certaines de ses dispositions spécifiques ; il lui sera aussi difficile de priver les quelques millions d'Américains qui bénéficient aujourd'hui d'une couverture santé de cette protection et de revenir au statut quo ante.

Mais au delà d'une baisse d'impôts (y compris et sans doute surtout sur les sociétés) qu'il obtiendra aisément des parlementaires républicains, la principale promesse du président-élu,, celle du rapatriement vers les États-Unis de ces emplois industriels qui ont massivement quitté des États comme l'Ohio, la Pennsylvanie, le Michigan ou le Maine, sera difficile à tenir. Or c'est là le point de fixation principal d'un discours identitaire qui comporte une forte dimension raciale et attise la peur de "l'Autre", à l'intérieur comme à l'extérieur.

Position hétérodoxe

C'est là aussi que Donald Trump par son discours protectionniste hostile au libre-échange se trouve dans une position hétérodoxe à l'intérieur de son propre parti, un parti qui lui est certes redevable d'avoir conquis la Maison Blanche contre toutes les attentes mais dont Donald Trump lui-même ne peut se passer, d'abord pour former un cabinet, puis pour construire une relation productive avec le Congrès.

Les tensions vont donc vite se faire jour, en particulier si elles sont aggravées par une déstabilisation des institutions internationales qui pourrait encourager l'aventurisme de certaines nations et une panique des marchés. A court terme, Donald Trump est dans l'obligation absolue de donner à sa base électorale les dépouilles de la victoire. On peine cependant à voir ce qu'elles pourraient être concrètement car même la dénonciation de l'ALENA ou la re-négociation à marche forcée des accords du GATT ne produiront d'effets immédiats. Le génie est sorti de la bouteille populiste ; il sera difficile de lui demander d'y rentrer.

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Commentaires 6
à écrit le 14/11/2016 à 12:23
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Il n'est pas nécessaire d'avoir un programme pour se faire élire . Être contre suffit : contre l'establissement, contre les élites,contre les étrangers à la nation, contre l'imposition,contre la réforme de la santé... après c'est le congrès, la cour ...

à écrit le 12/11/2016 à 9:39
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L'analyse de ses possibilités ...on verra , j'espère qu'il ne pourra pas pas faire tout ce qu'il souhaite mais pour le problème climat déjà ca na va pas arranger les affaires du monde. Quant à sa victoire , elle n'est pas une surprise, sauf pour les...

à écrit le 12/11/2016 à 9:39
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L'analyse de ses possibilités ...on verra , j'espère qu'il ne pourra pas pas faire tout ce qu'il souhaite mais pour le problème climat déjà ca na va pas arranger les affaires du monde. Quant à sa victoire , elle n'est pas une surprise, sauf pour les...

à écrit le 09/11/2016 à 19:29
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Bonjour, Je viens de vivre cette élection depuis le Nevada. Je suis d'accord avec vous sur le fond, mais c'est fait Donald Trump est Président. Beaucoup de promesses, il ne pourra pas toutes les tenir c'est certain et à la différence de la France...

à écrit le 09/11/2016 à 18:15
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Cher Monsieur, A partir de quel degré de faillite prédictive vous considérerez-vous comme illégitime pour infliger vos analyses à la toile et aux citoyens qui cherchent à s'instruire? Vous aviez annoncé sans ambiguïté que M. Trump n'avait auc...

à écrit le 09/11/2016 à 18:12
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