La Turquie coincée entre deux élections

La Turquie vie une situation confuse depuis les élections législatives de juin dernier. Recep Tayyip Erdoğan a œuvré à faire échouer la formation d'un gouvernement de coalition, afin d'obtenir de nouvelles élections et reprendre la présidentialisation du régime, mais rien ne dit que cette stratégie va réussir.

Alors que la Turquie a relancé la guerre contre le PKK, elle vient d'intégrer deux membres du parti kurde HDP dans l'équipe gouvernementale chargée d'expédier les affaires courantes, avant les élections législatives anticipées du 1er novembre prochain. Loin d'être une concession démagogique d'Ankara à ses alliés occidentaux, inquiets de voir l'aviation turque bombarder plus volontiers les positions du PKK que celles de Daech, ces nominations ne sont que la conséquence de ce que prévoit la Constitution en pareil cas.

Le grain de sable des dernières législatives

Mais le paradoxe reflète bien la situation confuse que vit la Turquie depuis les législatives du 7 juin dernier, qui ont vu l'AKP perdre la majorité absolue qui lui permettait de gouverner seul depuis 2002. Bien que la formation de Recep Tayyip Erdoğan ait conservé une majorité simple, ce revers a remis en cause un processus de personnalisation du pouvoir qui paraissait inéluctable. Elu à la présidence de la République au suffrage universel l'an passé, après avoir été chef de gouvernement dans un régime de tradition parlementaire pendant 3 législatures d'affilée, le fondateur de l'AKP s'est mis à imprimer aux institutions un tour présidentialiste accentué. Les élections du 7 juin ont porté un coup d'arrêt à cette entreprise. La principale cause de ce camouflet tient au bon score (13%) des Kurdes du HDP qui, en doublant leur score habituel, se retrouvent avec 80 députés au parlement, aux côtés des islamo-conservateurs de l'AKP (258), des kémalistes du CHP (132) et des nationalistes du MHP (80).

Une atmosphère de tension

Sonné par cet échec dans un premier temps, Recep Tayyip Erdoğan n'a pas tardé à redresser la tête. Maintenu aux avant-postes sur la scène internationale par le climat tendu qui prévaut au Moyen-Orient, il a œuvré à faire échouer la formation d'un gouvernement de coalition, afin d'obtenir de nouvelles élections pour effacer le revers du 7 juin et reprendre la marche vers la présidentialisation du régime.

Par ailleurs, après l'attentat de Suruç (le 20 juillet), œuvre probable de Daech dans le sud-est de la Turquie, et face aux violences déclenchées en représailles par le PKK, le chef de l'Etat n'a rien fait pour calmer les esprits. En prétendant lancer une guerre contre le terrorisme, qu'il soit djihadiste ou kurde, il s'est surtout employé à entretenir une atmosphère de tension susceptible de créer, chez les électeurs turcs, un réflexe de peur les incitant à donner à nouveau massivement leurs voix au parti qui les a gouvernés depuis plus d'une décennie.

Un scénario qui pourrait échouer

Il n'est pourtant pas sûr que ce scénario fonctionne. Depuis la fin 2012, les négociations engagées avec le PKK par Erdoğan lui-même ont donné au pays le goût de la paix. Dès lors, les Turcs comprennent mal pourquoi celui qui les a incités, ces dernières années, à faire la paix avec les Kurdes, leur demande aujourd'hui de leur faire la guerre, et ils ne peuvent s'empêcher de relier cette volte-face aux ambitions personnelles de leur président. Quoi qu'il en soit, cette stratégie est d'autant plus risquée qu' Erdoğan l'a déjà expérimentée en vain, lors du scrutin précédent. En prenant alors une posture martiale et chauvine, il avait perdu une grande partie de son électorat kurde, sans pour autant gagner les voix des nationalistes.

De récents sondages montrent cependant que les électeurs ne sont pas dupes et qu'ils attribuent majoritairement l'échec de la formation d'un gouvernement de coalition au chef de l'Etat, tout en restant très hostiles à l'idée d'un régime présidentiel. Quant aux intentions de vote, elles sont proches des résultats du 7 juin. Ironie du sort : les Kurdes du HDP pourraient même augmenter leur score et devenir ainsi le troisième parti de Turquie...

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Commentaires 2
à écrit le 03/09/2015 à 20:23
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Trop de mensonge dans cette article et ils sont tous dirigé contre la personnalité D'ERDOGAN Et pourtant ocun président dans le monde ne peux esté les yeux fermés devant un armé qui exécute deux fonctionner de L'état en temps de négociation de paix ...

le 03/09/2015 à 22:05
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Non c'était deux taupes de l'État islamique. Vive le Kurdistan libre et surtout loin des turc et arabe

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