Eric Maurincomme (Insa Lyon) : "Des divergences apparaissent au sujet de l'IDEX"

A son arrivée à la tête de l'Institut National des Sciences Appliquées (INSA) de Lyon, Eric Maurincomme s'est donné pour mission de faire de l'établissement une formation unique en Europe. Pour atteindre cet objectif, il entend miser sur "l'humanité" de la formation et son enrichissement avec des discipline connexes. Car l'ingénieur de demain est celui qui s'interroge non pas sur la technicité d'un projet, mais sur son utilité, son impact sur la société et l'environnement. Celui qui a travaillé dans six pays différents compte également pousser les étudiants à vivre une expérience à l'international. Mais l'un des plus importants chantiers qu'il devra mener est la création d'une université intégrée suite à l'obtention du label IDEX pour l'Université de Lyon, dont l'INSA Lyon fait partie. Aujourd'hui "des divergences apparaissent" si bien que "le projet original va changer : tous les établissements de la place lyonnaise et stéphanoise ne vont pas être ensemble."
(Crédits : DR)

ACTEURS DE L'ECONOMIE - LA TRIBUNE. L'INSA Lyon a fêté ses soixante ans en 2017. Quelles sont vos ambitions pour l'institut national lyonnais des sciences appliquées pour la nouvelle décennie qui s'ouvre ?

ERIC MAURINCOMME - Cette année anniversaire nous a permis de formaliser notre modèle de formation et de recherche. Nous nous sommes aperçus qu'il était toujours original dans la sphère de l'enseignement supérieur et de la recherche, en France et à l'étranger. Original car nous souhaitons former des ingénieurs mais avec une formation en humanité importante. Il y a deux ans, nous avons réaffirmé notre volonté qu'au moins 20 % des cours soient dans la pédagogie, et non scientifiques ou technologiques.

Nous voulons amener nos étudiants à s'interroger sur l'impact de la science et de la technologie sur notre société. Un projet, quel qu'il soit, doit toujours avoir dans son cœur cette notion de réflexivité et d'impact. Lorsque des grands projets d'infrastructures sont lancés - comme celui de la liaison ferroviaire entre Lyon et Turin -, l'aspect technologique n'est pas l'aspect le plus compliqué. C'est les acceptations sociales, environnementales, etc. qui sont en débat. Il est donc nécessaire de s'interroger sur l'impact et sur l'utilité de ce type de projet, au-delà de la faisabilité et du challenge technologique.

Des questions qui peuvent aussi se poser quand on parle de bioéthique ou d'intelligence artificielle.

Derrière la manipulation du vivant, la dimension éthique est primordiale. Je dis à mes étudiants : "si votre patron vous demande d'exécuter des tâches que vous jugez moralement discutables, alors démissionnez, cherchez un autre travail, et éventuellement, dénoncez-le." Ce n'est pas évident quand on a seulement 23 ans, d'autant plus que tout n'est jamais noir ou blanc. Mais ils doivent apprendre à gérer ces situations.

L'INSA Lyon accueille 41 % d'étudiantes, un ratio relativement important pour une école d'ingénieurs. Quelle politique menez-vous pour favoriser la diversité au sein de l'établissement ?

L'autre originalité de notre modèle est la dimension sociale. Comment permettre aux jeunes venant de zones d'enseignement prioritaire ou de milieux défavorisés d'accéder, mais surtout de réussir dans l'enseignement supérieur ?

Au moment de la sélection, nous ne transigeons pas sur le niveau académique mais nous transigeons sur le lycée de provenance. Mais encore faut-il lutter contre l'auto-censure. Aussi nous allons dans des lycées de la région, qui sont en ZEP ou dans des zones rurales, et discutons avec les jeunes pour leur dire qu'ils peuvent y arriver, filles comme garçons. Nous accueillons environ 30 % d'étudiants boursiers, que ce soit en première année comme en BAC +5, ce qui est plutôt rare. Je ne parlerai pas de discrimination positive mais d'égalitarisme total.

Nombre de chefs d'entreprises soulignent un manque d'ingénieurs dans la région. Comment y répondre ?

L'enjeu est de créer plus d'ingénieurs, sans pour autant transiger sur la qualité et amoindrir le diplôme. Même si cela est compliqué, nous avons quelques pistes parmi lesquelles figure l'apprentissage. Nous sommes attentifs à la réforme en cours. J'ai l'impression que nous allons nous orienter vers une libéralisation. Nous avons rencontré des difficultés avant d'ouvrir nos formations en alternance. La difficulté relevait non pas du financement, mais plutôt des questions d'autorisation.

Les formations dispensées dans l'enseignement privé sont aujourd'hui en développement. Dirigeant un établissement public, je m'interroge : "Pourquoi ces jeunes ne trouvant pas les formations potentielles et se tournent vers le privé ?" Une des raisons est que les établissements publics n'évoluent pas assez vite, et ne sont pas assez adaptatifs aux enjeux du marché.

Vous disposez d'un campus à Oyonnax. Peut-on envisager de prochaines ouvertures dans des villes comme Saint-Etienne ou Grenoble où les dimensions de recherche et de créativité sont fortes ?

Dans le cadre de l'Université de Lyon et de l'IDEX, c'est un projet à l'étude, auquel nous réfléchissions. Nous nous demandons comment décliner le modèle INSA dans d'autres lieux de formation, et comment ces territoires peuvent se l'approprier. Il est intéressant de se confronter aux autres, autour de ces questions des sciences de l'ingénieur. Mais il faut bien se coordonner pour ne pas être concurrents.

Juste après votre élection pour un nouveau mandat en 2016, vous avez déclaré : "Nous avons remis en marche une institution qui avait un peu dérivé." En effet, en 2011, quand vous prenez la tête de l'Insa Lyon l'établissement est au bord du gouffre financier. Qu'en est-il aujourd'hui ?

Nous avons remonté la pente et nos finances sont positives. Maintenant nous redistribuons l'argent obtenu avec la reconstitution de notre fond de roulement. Grâce à nos économies de fonctionnement et notre efficacité opérationnelle, nous sommes dans le vert ce qui nous permet d'avoir des montants d'investissements dans nos bâtiments importants. Nous interrogeons également nos entités qui nous proposent des projets, et ensuite nous regardons si nous les finançons ou non.

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Aujourd'hui, 70 % de votre budget provient de l'Etat. Quelles sont vos autres sources de recettes ?

Le budget global de l'INSA Lyon s'élève à 130 millions d'euros chaque année. Notre modèle est particulier car nous nous occupons de l'hébergement et de la restauration de nos étudiants, ce qui représente 12 % de notre budget. Nos recettes proviennent alors des étudiants qui résident sur place. Le pourcentage restant provient des contrats de recherche. Sur les 26 millions d'euros générés, un peu plus de la moitié est géré par notre filiale INSAvalor et le reste par l'INSA Lyon. Les financeurs peuvent être nationaux, européens ou industriels. Ensuite, nos recettes additionnelles proviennent de financements de la part de la métropole, la région Auvergne-Rhône-Alpes sur des objets particuliers à l'image du nouveau bâtiment Provadems qui sera opérationnel en 2020.

Notre fondation a levé depuis sa création 23 millions d'euros. L'objectif est de financer les chaires d'enseignement, la recherche mais aussi l'accompagnement des étudiants via par exemple des programmes de bourse.

Diplômé de l'INSA Lyon, vous avez travaillé dans six pays différents et trois continents avant de candidater à la direction de l'établissement qui vous avait formé. Vous avez déclaré : "Il ne faut pas craindre la globalisation." Pourquoi ?

La mondialisation est souvent vue de manière négative, et je ne comprends pas pourquoi. Quand je suis arrivé en Australie en 1986, cette expérience m'a ouvert au monde. Quand on se construit, le fait de vivre l'altérité, de vivre à la place d'un autre, d'être une minorité dans un pays, de ne pas comprendre les codes culturels, ni parfaitement la langue, donne de la confiance en soi car on se rend compte qu'il est possible de survivre malgré ces obstacles. Ces petites victoires forgent le caractère. Vivre à l'étranger ouvre aussi l'esprit. En Inde, par exemple, le mécanisme de caste ne correspond pas à la manière de penser européenne. Mais qui suis-je pour juger ? Cela enlève beaucoup de préjugés. Même si elle peut déstabiliser, une expérience l'étranger enrichit quand on commence à comprendre la manière dont une société pense et avance. Les sociétés monocultures s'appauvrissent.

En postbac, nous accueillons environ 25 % d'étudiants internationaux. Avec les jeunes Français, ils se rencontrent à l'âge de 18 ans, se rendent compte de leur différence mais qu'ils sont également semblables. Cela leur permet d'apprendre le monde plus vite que les autres. La philosophie de Gaston Berger (un des fondateurs de l'INSA avec Jean Capelle, NDLR) était de dire qu'il ne fallait pas avoir peu de la complexité du monde. Nos étudiants doivent avoir confiance en cette complexité car elle est une chance, une opportunité que leurs aînés n'auraient jamais pu avoir, et non un danger comme on peut parfois l'entendre.

Depuis la dernière rentrée, avoir étudié dans une de nos universités partenaires ou avoir effectué un stage à l'étranger est devenu un critère obligatoire pour obtenir un diplôme. Lorsque je suis sorti de l'INSA, nous avons seulement été dix étudiants à avoir eu la chance d'être sélectionnés par nos professeurs pour partir à l'étranger. Maintenant, ils sont 1 000.

C'est aussi pour cette raison que je suis revenu en tant que directeur de l'INSA Lyon : pour donner leur chance à tous les étudiants de vivre cette expérience. Mais cette vision n'est pas encore partagée par tous aujourd'hui alors il faut se battre pour l'imposer.

L'Université de Lyon a obtenu le label d'excellence IDEX en février 2017. La définition de ce que pourrait devenir cette université-cible a-t-elle évolué ?

Ce projet comprend deux volets. Le premier est l'excellence académique du site. Sur ce point, nous avons mise en place nombre d'initiatives afin d'améliorer le système d'enseignement supérieur et de la recherche, notamment autour de l'innovation et de l'entrepreneuriat, avec la Fabrique de l'innovation ou Beelys, l'accueil des étudiants étrangers ou encore le dialogue entre science et société. Ce schéma de développement universitaire, qui consiste à s'interroger sur le rôle que joue chaque campus dans la métropole, fonctionne très bien. Et une partie des crédits accordés grâce à l'obtention du label IDEX cherche à faire fonctionner tout cela.

Cependant, le second volet, qui est la structuration du site, sous forme d'une université intégrée, n'est pas assez clair. Il n'était déjà pas assez mûr quand nous l'avons décrit devant le jury international. Il nous l'a d'ailleurs reproché et ne nous a pas complètement crus. Nous devons donc encore décrire la façon dont cela va fonctionner. Quel sera le périmètre des établissements ? Tout le monde pense-t-il la même chose sur le principe de fonctionnement d'une université de rang mondial ? Des divergences apparaissent.

Dès lors, comment les laisse-t-on apparaître, comment les nomme-t-on et comment construisons-nous quelque chose malgré ces divergences ? Il ne faut pas hésiter à mettre ses opinions sur la table, façon brainstorming, mais pour l'instant nous avons tendance à être trop dans la retenue, dans le non-dit. Impossible d'avancer comme cela. Un des problèmes que nous rencontrons est que chaque établissement a sa propre stratégie, son histoire. Si tout le monde comprenait que l'autre est différent, alors le dialogue ne serait que meilleur.

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La méthode doit donc être améliorée. En tant que chefs d'établissements ou universitaires, c'est quelque chose nouveau sur lequel nous devons nous faire accompagner. Nous avons contacté d'autres universités qui ont obtenu le label, mais elles avaient fait ce travail en amont.

Le projet original va changer : tous les établissements de la place lyonnaise et stéphanoise ne vont pas être ensemble. Jusqu'à présent, nous avons voulu mêler les deux aspects, université de rang mondial intensive en recherche et insertion dans l'écosystème territorial, mais nous nous rendons compte que c'est impossible. Aussi, deux pistes de travail se dessinent désormais.

Vous montrez-vous optimiste ? Cette université-cible verra-t-elle le jour ?

Je suis un grand optimiste mais nous devons professionnaliser nos méthodes de travail. Nous devons confronter nos idées, nos visions pour faire émerger un projet fort perçu comme une évidence. A présent, il nous faut décrire que nous voulons être et ce que nous ferons, à la fois individuellement et collectivement, pour être en mesure de l'expliquer à l'automne 2019 lorsque nous passerons de nouveau devant le jury.

Nous avions promis de faire partager à notre personnel et à nos étudiants l'avancée du projet mais nous avons traîné. Ce fut une erreur.

En janvier 2017, un projet d'alliance des écoles formant des ingénieurs au sein de l'Université de Lyon (AEILyS) a été présenté. Cette alliance a-t-elle finalement vu le jour ?

Le projet n'avance pas aussi vite que nous le voudrions car pour travailler ensemble, il faut que chacun ait conscience de ce qu'il est, de ses missions de base, pour ensuite les confronter et voir quel est l'intérêt pour les étudiants, le corps enseignant. Aujourd'hui, comme chaque école propose sensiblement la même chose, l'intérêt n'est pas important.

La notion d'empreinte est ici centrale. Chaque établissement en a une sur la société en fonction du profil des étudiants qu'il recrute, du genre d'adultes qu'ils deviennent et de l'endroit où ils vont s'insérer. Il ne faut surtout pas que chaque établissement soit le même. L'ENS est excellent en science fondamentale, forme de très bons enseignants, enseignants-chercheurs ou chercheurs. Nous, nous sélectionnons avec des critères différents et ensuite nos étudiants travaillent en entreprise. Il ne faut pas que l'ENS devienne l'INSA, et inversement. Nous devons chacun continuer dans nos excellences respectives. A être trop semblable, on peut s'y perdre. Si nous sommes tous dans le même moule, avec les mêmes missions, alors nous n'avons plus de saveur. Nous devenons du coca alors que nous devons être du bon vin rouge.

L'autre raison pour laquelle nous sommes restés bloqués est que l'enseignement public et privé n'ont pas la même manière de penser, donc construire des projets en commun prend du temps. Sur le campus, nous discutons avec des écoles comme Polytech, ENTPE mais aussi avec l'école d'architecture à Vaulx-en-Velin. Nous arrivons à parler ensemble, créer des synergies et l'idée est de bien nous connaître, d'aligner nos visions et nos différences.

Le campus LyonTech-La Doua doit être rénové pour un budget estimé à 343 millions d'euros. L'État, la métropole de Lyon et la Région sont les principaux financeurs. Savez-vous à quel stade est le projet ? Quelles sont vos attentes quant à la position de votre établissement ?

Nos attentes sont élevées car nous n'avions pas investi dans notre immobilier ces cinquante dernières années. Entre Lyon 1 et l'INSA Lyon, 22 bâtiments seront rénovés d'ici 2021-2022. Nous avons participé au cahier des charges, en dialoguant avec les entités formation et recherche affectées par ces travaux. Ces rénovations sont principalement externes mais aussi internes, quand l'usage ou la finalité a changé.

J'ai quatre axes stratégiques et la rénovation du patrimoine participe à chacun d'eux : faire de l'INSA Lyon une formation visible et unique en Europe ; créer un campus et une recherche attractive qui attire les entreprises. Je veux qu'elles viennent à Lyon car il y a l'INSA et que la recherche est incroyable ; que nos étudiants et personnels s'épanouissent ; et enfin garantir les spécificités de l'INSA que sont la mixité, l'accueil du handicap et des étudiants étrangers.

Quelle vision avez-vous de l'ingénieur de demain ?

Nous sommes rentrés dans une démarche de prospective pour réfléchir sur qui nous voulons être et comment nous voulons nous positionner demain. Nous avons quelques pistes, parmi lesquelles figure l'enrichissement de l'INSA de ces disciplines connexes comme l'architecture, le design ou le management. L'INSA Centre Val-de-Loire délivre un diplôme de paysagiste. Depuis mars 2017, nous sommes associés par décret ministériel à l'école d'architecture de Vaulx-en-Velin. Nous allons essayer de faire croître l'INSA en travaillant avec ces écoles partenaires.

L'ingénieur de demain devra encore davantage s'interfacer avec les autres. Il ne restera plus dans sa discipline. Les ingénieurs devront comprendre la manière de penser des architectes qui conceptualisent l'impact de leurs bâtiments sur l'environnement. De la même manière, les ingénieurs devront conceptualiser l'impact de leurs procédés industriels sur la société. L'apprentissage du design, l'usage d'un logiciel, la conception d'un objet, est pour moi fondamental tout comme le management car souvent, l'ingénieur est amené à avoir des responsabilités dans une entreprises, à gérer des équipes. L'ensemble de ces disciplines permet de former ce que l'on peut appeler un "polytechnicum".

L'une des différences entre l'ingénieur d'hier et celui de demain est cette recherche de sens. La société est devenue plus complexe, plus déroutante. Nous savons en temps réel les événements qui se déroulent la planète, les atrocités nous sont révélées. Il y a trente ans, nous étions épargnés de cela, nous étudiions les drames mais ne le prenions pas en pleine figure chaque jour. Face à cette complexité, certains peuvent décider de s'isoler. Au contraire, il faut continuer à s'ouvrir et s'éduquer.

Dans une interview vous avez déclaré que la définition du mot politique est "utile pour faire bouger les lignes". Qu'en est-il aujourd'hui ? L'environnement politique est-il favorable au changement ?

Au niveau de l'établissement, chaque chef d'établissement doit avoir une politique, l'afficher, la décliner. Au niveau local, l'enjeu est l'attractivité du territoire. En faisant de ce campus une référence en matière d'innovation technologique sur le périmètre Lyon - Saint-Etienne cela permet d'aller chercher des entreprises, qu'elles soient en Chine, en Allemagne ou à Moulins. Au niveau national, il faut bouger les lignes : la sélection des étudiants, l'accès à l'enseignement supérieur sont autant d'enjeux actuellement. Aujourd'hui, l'enseignement supérieur a une réelle carte à jouer à chaque niveau.

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Commentaire 1
à écrit le 14/02/2018 à 10:33
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Un seul commentaire sur le bilan du directeur de l insa https://www.usinenouvelle.com/classement-des-ecoles-d-ingenieurs. Au lieu de penser à son avenir personnel il faudrait s occuper de la place de son école qui ne cesse de décroître dans tous le...

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