Pascal Le Merrer : "Les économistes se substituent au déclin des intellectuels"

La 7e édition des Journées de l'économie (JECO), à laquelle La Tribune et Acteurs de l'économie sont associés, accueille à Lyon du 13 au 15 novembre le « gratin » des économistes français. 250 intervenants viennent débattre dans différents lieux de la ville pour « porter » l'économie vers le grand public. Objectif, ainsi résumé par son architecte Pascal Le Merrer : donner des clés pour mieux comprendre, mieux agir, et mieux décider. Fil conducteur de cette édition 2014 : le progrès social. Dont l'avenir même est questionné.

Acteurs de l'économie : La 7e édition des Journées de l'économie a pour thème central « l'avenir du progrès social ». Les débats ne porteront pas sur les formes que prend ce progrès mais interrogeront la probabilité même de son existence. L'examen de la situation « sociale » de l'économie et de la société augure-t-il la « non possibilité » de progrès ?

Pascal Le Merrer : Parmi les macro-économistes, deux grands courants se font face. L'un d'eux considère le moment que nous traversons comme « historique », estimant que les gains de productivité se tarissent, y compris dans les pays émergents. Ce ralentissement aurait pour origine l'épuisement du progrès technique, ou plus exactement l'influence déclinante du progrès technique sur l'efficacité économique de la production. Selon ces disciples de la stagnation séculaire, nous ne sommes plus dans une période d'innovations fondamentales comme celles que constituèrent l'irruption du chemin de fer, celles de l'électricité ou de l'automobile.

Autre aspect soulevé par ces économistes : le coût de l'innovation technologique est de plus en plus élevé. Qu'il s'agisse des matériaux employés ou de la construction des centres de recherche, il devient prohibitif. L'industrie pharmaceutique en est un bel exemple : l'individualisation exponentielle de l'approche des soins va l'amener à tendre vers l'individualisation des médicaments eux-mêmes. Imagine-t-on le coût d'un produit spécifique par malade ?

Face à eux, ceux qu'incarne le prospectiviste Jérémy Rifkin, mais aussi Erik Brynjolfsson et Andrew Mcafee, auteurs de « The second Machine Age ». Ils considèrent l'évaluation des progrès techniques et des gains de productivité réels très en-deçà de la réalité, et estiment les gisements de développement considérables. Selon eux, lorsque la problématique des organisations - pour l'heure en chantier - agrégées à ces potentialités aura été réglée, plus rien ne fera obstacle à l'accomplissement de ces dernières et donc à la résolution des deux « boulets » de l'économie occidentale : l'absence de croissance et le chômage.

Ce face-à-face n'est d'ailleurs pas nouveau. Il constitue une réplique des années post-1929...

Absolument. Nous vivons un épisode aussi passionnant que celui des années 1937-1938, lorsque les « stagnationnistes », convaincus du tarissement du progrès, se heurtaient aux disciples de Schumpeter qui pronostiquaient de gigantesques gisements d'innovation. Aujourd'hui, d'aucuns s'accordent sur la possibilité de mixer des opportunités. Pour exemple, la conciliation, même l'imbrication du gratuit et du marchand chères à Rifkin.

Est-il possible d'envisager à court terme le « progrès social » dans une société occidentale en panne non seulement de croissance, mais aussi d'espérance et d'idéaux ?

Quelques personnalités cherchent à arrimer une perspective sociétale aux enjeux économiques. Par exemple, comment transformer l'économie pour qu'elle soit celle d'un bien-être collectif ou d'un bonheur mieux partagé ? Le Jésuite et économiste Gaël Giraud - directeur de recherche au CNRS et au Centre d'économie de la Sorbonne - est de ceux-là. Mais ils sont rares.

Ce constat ferait-il écho à celui d'une paupérisation de la vitalité des intellectuels, ou à celui d'une compartimentation excessive des disciplines en sciences humaines censées se nourrir substantiellement ?

Le débat de clôture des JECO 2014 mobilise des représentants des Etudes, Projets et Esprit. Pourquoi Marcel Gauchet, directeur de Débat, a-t-il décliné l'invitation ? Il considère que les économistes ont écarté les intellectuels du débat public. De mon côté, je pense que les économistes ont simplement pris une place laissée vacante par le déclin des intellectuels. Il est exact que la relève peine à voir le jour. Où sont les grands historiens, philosophes, sociologues de demain et même d'aujourd'hui ? L'espace demeure occupé par la « vieille génération » des Touraine et autres Morin dont l'engagement parfois très idéologique structurait les grands débats de société. L'effritement des revues spécialisées correspond à celui des intellectuels censés les produire.

« L'enfermement dans l'économie est l'un des pièges les plus dangereux du moment », juge Marcel Gauchet. « L'économie est désormais supposée faire société », reconnait de son côté Daniel Cohen (L'Obs, 23 octobre). Tout, en effet, semble dorénavant estimé, jugé, mesuré, pronostiqué, élaboré dans le prisme de l'économie. L'imprimatur de l'économie sur le fonctionnement de la société n'est pas sans effets délétères. En premier lieu celui de reléguer l'approche sociologique, philosophique, sociale, simplement humaine des enjeux...

Contrairement à ce que pense Marcel Gauchet, l'économie ne s'est jamais détachée des autres pans de la société. L'économie du bonheur, n'est-ce pas de l'économie ? L'analyse économique des décisions politiques témoigne que l'économie se promène dans le paysage intellectuel des autres sciences sociales. L'échec de l'Ecole des Annales censée fédérer l'ensemble de ces disciplines autour des historiens, invite à la prudence. Tout revient toujours à la relation entre l'économie et la politique, les représentants de cette dernière ayant la fâcheuse tendance à stigmatiser la première, à la considérer bien davantage comme un obstacle que comme une opportunité ou simplement un état de fait, et ainsi à la rendre coupable des maux de la société ; comment s'étonner qu'à partir d'un tel discrédit public les citoyens peinent à s'intéresser à l'économie ? La marge de manœuvre des élus ne s'est pas érodée, simplement ils ne savent pas toujours s'en saisir.

Que manque-t-il à la discipline économique pour qu'elle serve le double enjeu social et sociétal ? Du sens ? Un support philosophique ? Un discours politique approprié ? Une plus grande hybridation avec les sciences dites humaines ?


La discipline économique est assez compartimentée. Des chercheurs sont concentrés sur le traitement de données purement quantitatives, s'affirment comme de purs techniciens sans se préoccuper de « sens » ni des effets de leurs travaux sur la société ; d'autres au contraire enveloppent leur mission de cette exigence. Les premiers sont-ils pour autant moins vertueux ? Non. Pour autant, il faut rappeler que tout chercheur a pour missions outre celle d'exercer un double travail de scientifique et d'enseignant dans le cadre d'une collectivité, celle de contribuer a enrichir le débat public. Une responsabilité malheureusement trop souvent négligée.

JECO 2

Crédit : Daneil Fogel/Jeco

La profession est face à un enjeu de taille : comment - c'est-à-dire surtout à quelles fins - va-t-elle exploiter au mieux le champ considérable de données et d'informations généré par le big data ? Pour cela, elle n'a pas d'autre choix que de croiser ses analyses avec celles des disciplines sociologique, philosophique, psychologique ou historienne. Jean Tirole l'explique fort bien : le comportement des agents économiques résulte de motivations extrinsèques et intrinsèques, et du rapport à soi, ou plus exactement de l'image que l'on a de soi. Un tel examen pourrait-il être établi sans y inclure des données psychologiques et sociologiques ? Et dans le champ de la « neuroéconomie », peut-on se passer des sciences dures et molles pour cerner le sujet ? L'interaction des disciplines n'est peut-être pas parfaite, mais elle existe bel et bien. On peut seulement regretter que l'histoire ne soit pas suffisamment représentée.

Peu de conférences interrogent concrètement l'Europe. Les économistes ont-ils acté le fait que la situation européenne - le fonctionnement des institutions, la santé économique, et les perspectives de développement - hypothéquait la notion même de « progrès social » ?

L'Europe n'est pas en déclin économique, contrairement à ce que laissent penser la vulgate populaire, les médias et certains élus. Mais elle souffre d'un déficit de gouvernance et d'institutions. En clair, elle ne s'est pas dotée des institutions à même de porter son développement, de structurer et de dynamiser son avenir. Et elle s'est laissé ronger par la technocratie. Pourtant, à l'instar d'Erasmus, que de réalisations fabuleuses ! L'avenir de l'Europe passe par celui d'initiatives dites « à plat », comme l'organisation d'un réseau de métropoles et d'axes de coopérations métropolitaines cohérents - comme celui liant Lyon à Francfort et Milan.

Il n'est pas contestable que le progrès économique n'a pas servi à juguler les inégalités ou les injustices. Parfois même il a accompagné la compartimentation et une ségrégation croissantes de la société. Progrès économique et progrès social se sabordent-ils plus souvent qu'ils ne se sustentent ? Quelles propriétés et quelles conditions associez-vous au « progrès » pour que son expression « économique » soutienne sa matérialisation « sociale » ?

Là encore l'Europe doit être interrogée. Le volet social de la construction européenne est très insuffisant, et d'ailleurs il pourrait constituer un formidable moyen de revitaliser le souffle européen, de régénérer l'envie et le goût d'Europe. Par exemple, peut-on imaginer un contrat de travail européen, que les citoyens pourraient préférer à un contrat national et qui donnerait droit à une protection sociale continentale ? Nul doute que la jeunesse y serait sensible, nul doute qu'il y aurait là matière à accélérer le processus d'intégration au sein de l'Europe, nul doute enfin qu'il pourrait s'agir d'un vrai progrès social.

Quelques conférences interrogeront la situation des pays émergents. Toute dynamique de « développement » - économique, infrastructurelle, éducationnelle, etc. - questionne mécaniquement et en premier lieu la réalité sociale, y compris lorsqu'elle bouleverse les équilibres et l'anémie...

La démocratie est-elle un levier de développement ? Pendant longtemps, certains économistes ont privilégié dans les pays pauvres des systèmes politiques forts, voire autocratiques. D'autres, à l'instar de Robert Barro estiment que dans un pays peu démocratique une amélioration des droits politiques stimule la croissance. Aujourd'hui, les travaux tendent à démontrer que des organisations démocratiques favorisent la capacité résiliente de l'économie et la faculté d'adaptation ou d'ajustement aux crises. L'une des conférences s'attachera d'ailleurs à observer la manière dont un pays économiquement émergent, la Chine, investit des continents entiers eux-mêmes en devenir - Afrique, Amérique latine.

Vidéo bilan des JECO 2013 avec Pascal Le Merrer

Les JECO sont nées en 2008 d'un double constat : en France, la discipline économique souffre « d'un manque de compréhension, de diffusion et d'accessibilité », et la culture économique au sein de la société est faible. Professionnels de l'économie, enseignants, médias, élus : la responsabilité de ce lourd déficit est-elle équitablement partagée ?

La situation a changé depuis 2008 et l'irruption de la fameuse « crise des subprimes ». Et nous faisons face désormais à un paradoxe : jamais l'économie n'a été aussi présente dans notre quotidien et jamais les économistes n'ont été aussi nombreux à prendre part aux débats, mais cela ne s'est pas accompagné d'une franche amélioration de la compréhension que les citoyens ont de l'économie. « Parle-t-on mal d'économie ? » fera d'ailleurs l'objet d'une conférence conclusive d'une enquête menée par des étudiants.

L'économie connaît aujourd'hui le même phénomène que la psychologie il y a quelques années : l'impression est qu'elle est devenue le catalyseur de toutes les autres manifestations, que tout est ramenée à elle. Mais le degré d'intelligibilité ne suit pas, et signifie donc que les efforts de pédagogie doivent être soutenus. Autre écueil : tout le monde ou presque a un avis sur l'économie, des non économistes publient des livres d'économie, des pseudo-experts occupent les plateaux de télévision... bref, la discipline économique en tant que science est parfois galvaudée. Demande-t-on à un non biologiste de commenter une découverte dans le domaine de la biologie moléculaire ?

Ce constat est d'autant plus regrettable que jamais sans doute dans l'histoire contemporaine l'économie n'a à ce point constitué l'axe cardinal du fonctionnement de la société, jamais les mécanismes de la macro et de la micro-économie n'ont autant permis de « lire » l'état et l'avenir de la planète et de ses populations. La crise économique, ou plus exactement la superposition des crises économiques, résultent-elles en premier lieu de la méconnaissance publique pour l'économie ? Quelle évolution des raisonnements, des comportements, des aspirations au sein de la population française une meilleure maîtrise de l'économie favoriserait-elle ?

Mieux comprendre l'économie permet d'être davantage autonome, de disposer d'un espace de liberté plus grand et d'un périmètre de responsabilité élargi. Ainsi on peut mieux décider de ce que l'on veut et de ce que l'on peut.

Les marchés ne fonctionnent pas seuls, et ils ont besoin d'être alimentés et orchestrés par des individus pourvus d'un sens moral développé - c'est-à-dire porteurs de la société dans laquelle ils s'inscrivent. Ces individus ont en commun d'avoir réussi leur « socialisation », et c'est d'ailleurs de cette socialisation collective que dépend l'efficacité de l'économie de marché. Or les éléments constitutifs de cette socialisation sont aujourd'hui interrogés : l'école est loin d'avoir exaucé toutes ses prérogatives, la structure familiale est bouleversée, les associations peinent à mailler le territoire, enfin les citoyens n'ont guère de « figures » politiques et publiques vers lesquelles se rassembler et converger.

L'importante méconnaissance des dirigeants politiques en matière économique et, plus largement, leur discrédit au sein de la population, confèrent à la responsabilité individuelle et à l'action citoyenne un rôle accru. L'inculture pour la « chose économique » les condamne-t-elle à un périmètre exigu ?

La maîtrise des sujets économiques est très inégale au sein du cénacle politique. Or quoi d'autres que d'ineptes, populistes, démagogiques, in fine dangereux programmes politiques l'absence de raisonnement économique provoque-t-elle ? Les Enarques ne manquent pas de connaissances économiques, mais ils les déploient « d'en haut » et de manière technocratique, volontiers monolithique. Quant aux outils d'évaluation des politiques publiques, on ne manque pas : à la Cour des comptes, il faut ajouter les dispositifs de mesures propres à certains ministères et les centres ad hoc intégrés dans les établissements universitaires ou les écoles d'économie de Paris et de Toulouse.

Pascal Le Merrer

Et malgré l'ensemble de ces moyens, l'exercice politique n'est pas à la hauteur. La cause principale, c'est l'anachronisme des temps - court du politique, long de l'économiste. Le RSA en est un exemple symptomatique : son architecte Martin Hirsch avait initié une expérimentation puis une évaluation dans quelques départements « pilote » avant de l'étendre au territoire national : pour des motivations purement politiques et d'affichage public, Nicolas Sarkozy n'a pas attendu les conclusions et a procédé à sa généralisation. Or si le processus avait été respecté, le dispositif aurait pu être corrigé et sensiblement amélioré.

L'une des causes de la crise politique en France tient à l'effacement des clivages idéologiques en matière économique. Plus rien ou presque ne distingue les programmes, dans ce domaine, des sociaux-démocrates, des sociaux-libéraux, des centristes, et des libéraux « tempérés » de la Droite républicaine. N'existe-t-il plus qu'un seul schéma économique - un libéralisme et une politique de l'offre focalisés sur « la croissance », engagés à réduire les déficits, et minimisant la contribution publique - dans une économie mondialisée dont une grande partie des règles et des arbitrages échappe aux gouvernants nationaux ?

Vous évoquez une uniformisation des offres... or le problème est plutôt l'absence d'offres ! Le déclinisme constaté au niveau national tranche avec la réalité dans les territoires, que dominent une formidable vitalité et de remarquables initiatives, souvent portées par la société civile. Les politiques peinent à saisir le sens même, la substantifique moelle de « l'action politique », fondée sur les projets et les réalisations concrets. L'impression est que les partis d'opposition se réjouissent des décisions impopulaires mais structurantes prises par la majorité et dont ils tireront profit une fois vainqueurs du scrutin suivant : ce va-et-vient incessant est insupportable et nuit à l'efficacité économique.

 Il est de coutume de fustiger en France l'excès idéologique et doctrinaire, coupable d'un immobilisme et d'un corporatisme qui hypothèquent la dynamique de réforme. Une meilleure connaissance de l'économie permettrait-elle de lever ces obstacles ou au contraire cultiverait-elle les dogmes ?

En France, dans le sillage d'une culture et d'un héritage portés par une vision intellectuelle très atypique, « on » aime les sujets assez généraux voire conceptuels et idéologiques. En revanche, lorsqu'ils deviennent techniques, ils n'intéressent plus grand monde. Or l'économie c'est en premier lieu des chiffres, des équations, des projections, bref... c'est technique ! En d'autres termes, on raffole débattre de l'avenir du capitalisme mais on rechigne à décortiquer les tenants et aboutissants concrets du CICE. Et c'est une erreur, car c'est dans les sujets techniques que se niche la véritable compréhension des problématiques.

Dans quelle mesure les professionnels de l'économie ont-ils eux-mêmes participé à asseoir, dans toutes les strates de la société, une dictature du chiffre, de la performance quantitative, de l'efficacité mesurée, par la faute de laquelle les autres lectures, les autres perspectives, et même les autres « valeurs » de ladite société s'assêchent ?

Je ne partage pas totalement ce jugement. La France se distingue historiquement par une grande culture du chiffre et de la maîtrise statistique. Est-ce une forme de tyrannie ? Non. En revanche, si ces données venaient à ne plus être partagées et à devenir la propriété de donneurs d'ordre privés, alors cela mettrait la démocratie concrètement en danger. L'accès universel à ces données doit être sanctuarisé.

La connaissance des chiffres et des statistiques, c'est-à-dire l'interprétation qu'il faut en faire et la manière de les présenter, exige une discipline et une rigueur qui manquent aux principaux intéressés : les journalistes. Or leur responsabilité est considérable afin d'assurer aux chiffres d'être lus et compris comme ils doivent l'être. Au lieu de quoi, on assiste à une course effrénée au scoop, par la faute duquel le volet didactique et pédagogique, qui nécessite recul et distance, est négligé voire occulté. A quand une véritable formation de journaliste économique en France ?

JECO 1

Crédits : Charlène Daniel/Jeco

Les économistes n'ont-ils pas contribué à installer une considération purement financière de l'économie et du capitalisme, une approche exclusivement matérielle du progrès et matérialiste de la réussite, une fascination pour la croissance, et donc concomitamment à décrédibiliser ce qui « fait » le socle de la société : d'une part les fondations et l'espace publics, d'autre part le collectif ?

Les économistes forment une communauté bigarrée, même hétérogène. Qu'ont en commun les membres des économistes atterrés et leurs confrères proches de la Société du Mont Pélerin ? S'engager dans des projets politiques et cultiver un esprit critique est intéressant si cela prend pour support un travail de recherche. L'hétérodoxie que revendique une partie des économistes n'est réussie et véritablement utile que si d'une part elle repose sur des travaux démontrés et acceptés par la communauté scientifique, d'autre part elle sert les compétences d'ensemble de la profession et conditionne les vocations des jeunes chercheurs.

Ces JECO 2014 vont explorer « l'avenir du progrès social ». D'aucuns estiment que le triomphe de l'économisme traduit, au contraire, un immense malaise social. « Jusqu'où sommes-nous prêts à aller pour sacrifier le progrès social du siècle passé au nom d'un progrès matériel devenu évanescent ? », questionne de son côté Daniel Cohen. Avez-vous une réponse ?

Daniel Cohen est un économiste singulier. Sa compétence est incontestable, sa réflexion le porte à faire une lecture pessimiste de l'économie et du capitalisme. Ses perspectives annoncent une société qui se détruit. Il n'empêche, il est de ces rares personnalités qui exercent un formidable travail intellectuel, explorent les leviers de transformation de la société, nourrissent le débat public en respectant les frontières de leurs compétences. Qui donc, dans les autres disciplines de sciences sociales, possède cette faculté ?

Il est une preuve supplémentaire et bien involontaire que la supposée « tyrannie » de l'économie résulte en réalité d'un certain déclin des intellectuels.

Jean Tirole, Prix Nobel d'économie 2014, absent des débats : un acte manqué ?

Jean n'a pas de goût particulier pour les tables rondes, qui constituent le concept commun à nos conférences. D'autre part, il n'est pas naturellement tourné vers l'exercice du grand orateur, il excelle plutôt dans les longs entretiens au cours desquels il peut développer sa fructueuse et très dense pensée. Pour autant, n'était-il pas « calibré » pour un échange « vulgarisé » avec le grand public ? Ce dernier, je considère, de mon côté, qu'il est tout à fait capable d'élever son niveau d'attention lorsque la qualité des développements le justifie. Et en l'occurrence, sur le seul thème du marché du travail, il y avait de quoi faire !

>> Les journées de l'économie 2014

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 5
à écrit le 07/11/2014 à 11:49
Signaler
JE NE SUIS PAS ECONOMISTE? MAIS IL Y A BEAUCOUP DE BARATIN DANS TOUS CES TEXTES SUR L ECONOMIE? LA REALITE ET AUTRE ?AU NIVEAU EUROPPENS DEUX CHOSSES SONT INPORTANTE DANS LA PERIODE ACTUEL 1 DIMINUEE LE TEMPS DE TRAVAIL CAR IL Y I A TROP DE CHOMEURS...

à écrit le 06/11/2014 à 19:20
Signaler
Si on souhaite baisser le cout du travail sans augmenter la contribution du capital, il faut augmenter le prix de l'énergie à niveau constant. C'est ce qu'il faut faire comprendre.

à écrit le 06/11/2014 à 17:55
Signaler
Les economistes parlent du declin des intellectuels ? Quelle pretention ? Après 2008 et tout ce qu'on a entendu , les economistes vont encore donner des leçons ? Je crois qu'il faut inventer un mot nouveau : les ecofumistes.

à écrit le 06/11/2014 à 16:53
Signaler
Je suis prêt à développer cette idée si quelqu'un le souhaite. L'économie doit concerner le travail, le capital et l'énergie. Pourquoi ignorer l'énergie? Que serions nous sans énergie?

à écrit le 06/11/2014 à 16:51
Signaler
Tout faux: pas un mot du role de l'énergie dans le développement économique. L'énergie remplace le travail en utilisant le capital (l'outillage) pour produire des richesses et doit donc participer au financement des charges sociales. Il doit y avoir ...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.