Droit de retrait des salariés et état d'urgence

La vague récente d'attentats et les mesures exceptionnelles prises à cette occasion, notamment l'état d'urgence, pose la question de la légitimité, ou non, du droit de retrait qui serait exercé par un salarié dans un tel contexte. Par Eric Ravier, avocat Associé CAPSTAN Lyon

Rappelons au préalable que le droit de retrait est la possibilité, pour un salarié, de se retirer de son poste de travail, dès lors qu'il estime que la situation dans laquelle il se trouve présente un danger grave et imminent pouvant porter atteinte à son intégrité physique ou mentale.

Face à une telle situation, un salarié peut se retirer de son poste de travail et cesser d'exercer toute activité professionnelle sans accomplir d'autre formalité que celle consistant à informer son employeur qu'il estime qu'un danger grave et imminent peut porter atteinte à sa santé. Une simple information verbale suffit.

L'employeur, informé par un salarié de l'exercice de son droit de retrait, doit alors procéder immédiatement à une analyse de la situation afin de déterminer, si oui ou non, la santé du salarié est menacée et prendre toute disposition pour prévenir ou faire cesser ce risque, si celui-ci était avéré.

Les conséquences attachées au droit de retrait dépendent de son caractère légitime ou pas.

Si le droit de retrait est considéré comme légitime, le salarié ne pourra pas se voir opérer de retenue de salaire pour le temps de travail qu'il n'aura pas accompli pendant l'exercice de son droit de retrait. Il ne pourra pas, par ailleurs, faire l'objet de sanction disciplinaire.

En revanche, si le droit de retrait n'est pas considéré comme légitime, alors l'employeur pourra retenir la partie du salaire correspondant au travail non effectué et sanctionner disciplinairement le salarié, généralement pour abandon de poste. Une sanction telle que le licenciement peut même être envisagée si le salarié fait courir, en raison de l'exercice non légitime de son droit de retrait, des risques pour la santé et la sécurité de ses collègues de travail.

Deux types de situations

Ainsi, dans le contexte que nous connaissons depuis les attentats du 13 novembre 2015, on peut relever deux types de situation dans lesquelles un salarié pourrait imaginer exercer son droit de retrait.

La première, serait la situation dans laquelle un salarié entendrait exercer son droit de retrait estimant, au regard de la situation générale d'insécurité résultant de la situation que nous connaissons, qu'un danger grave et imminent le menace. Face à une telle démarche, le caractère non légitime du droit de retrait ne fait aucun doute et, un salarié se plaçant dans une telle posture, se verrait très certainement sanctionné par son employeur.

La seconde, serait l'hypothèse dans laquelle un salarié, notamment au regard des fonctions qu'il exerce et du secteur d'activité dans lequel intervient son employeur, disposerait d'informations précises, corroborées par la Direction Générale des Services Intérieurs, que des actions terroristes seraient envisagées dans son milieu professionnel. Dans un tel contexte, dont on n'imagine pas que son employeur n'en soit pas lui-même parfaitement informé, ce dernier devrait prendre toutes mesures permettant de protéger la santé et la sécurité de ses salariés. A défaut, l'exercice du droit de retrait par un salarié pourrait être considéré comme légitime.

On mesure bien, cependant, au regard des conditions posées, que ce type de situation sera par nature très exceptionnelle.

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