Réforme du crowdfunding en France : ne confond-on pas entreprise et jeux de hasard ?

Les banques prêtent peu, les fonds d'investissements manquent de liquidités, les business angels réduisent leurs engagements et les PME ont du mal à financer leur développement. Le crowdfunding (financement participatif) relie directement les particuliers qui ont de l'argent et les entreprises qui en recherchent via des plateformes internet tournées vers l'international et capables de capter des investisseurs du monde entier.

Sur les 4 formes de crowdfunding, seuls les prêts et les titres financiers sont concernés par la réforme voulue par le gouvernement

La réforme du prêt d'argent

L'entreprise française qui recourt au crowdfunding pourra récolter jusqu'à un million € de prêt à la condition de séduire au moins 1 000 particuliers, un même individu ne pouvant pas prêter plus de  1 000 €  à l'entreprise qu'il souhaite financer. Pourquoi plafonner à 1 million € l'entreprise qui emprunte  et à 1 000 € le particulier qui prête ? Sont évoqués le risque pour le particulier et  le possible blanchiment d'argent  ?

1/ En quoi un particulier qui décide de prêter à une entreprise et d'investir dans l'économie réelle est il plus en risque que lorsqu'il place son argent dans des fonds de fonds dont plus personne ne maîtrise le contenu ?

2/ Le législateur veut « protéger » l'épargnant. Mais qu'en est-il lorsqu'il s'agit de jeux d'argent ?
Pourquoi un salarié est-il autorisé, le jour même de sa « paie » à la risquer au PMU ou à           l' l'EuroMillions ? Menant des campagnes publicitaires agressives, l'Etat  encourage tous les excès. Pourquoi le même individu pas n'a-t-il pas le choix de prêter plus de 1 000 € à l'entreprise qu'il souhaite financer ? Ainsi, le particulier qui traite avec l'Etat est « parieur responsable » alors que lorsqu'il investit dans l'économie réelle,  il devient « investisseur irresponsable » ? …

  •   ne confond-on pas entreprise et jeux de hasard, parieur et investisseur ?
  •   le modèle économique des sites spécialisés dans le prêt résistera-t-il à une réforme visant à convaincre 1 000 prêteurs, gérer 1 000 contacts et  suivre 1 000 dossiers pour financer un « petit »  million € ? Si les banques connaissaient le même sort,  elles auraient cessé depuis longtemps toute activité de crédit ;
  •  même problématique pour l'entrepreneur qui emprunte.

3/ Pour les particuliers capables d'investir davantage,  devrons-nous nous résigner à ce qu'ils aillent financer des entreprises étrangères et créer de l'emploi et de la richesse hors de France ? A contrario, pourquoi se priver de la manne financière des investisseurs étrangers intéressés à soutenir les entreprises hexagonales ?

4/ en ce qui concerne le risque de blanchiment d'argent :

  •    freinons l'ardeur des  « blanchisseurs » avec des limites à 1 000 €, … ils miseront des sommes considérablement plus importantes sur des opérations non encadrées,
  •   les souscriptions  crowdfunding  doivent être réglées par chèque ou virement bancaire  à partir d'un compte ouvert dans une banque en France, laquelle s'assure de la provenance des fonds. Cette disposition exclut de facto les investisseurs étrangers qui ne détiennent pas de compte bancaire en France et qui seraient pourtant capables d'y investir d'importants capitaux.

La réforme du crowdfunding « equity »

Les frontières financières ont disparu depuis longtemps et l'on continue de faire comme si la France était un îlot de prospérité non confronté à la mondialisation.

  • Nos voisins italiens ou anglais autorisent désormais des opérations de 5 millions d'euros. Pourquoi s'imposer en France l'inutile handicap d'un seul million € et se priver d'investisseurs internationaux qui pourraient être tentés de financer ces projets ?
  • Les PME françaises n'auraient-elles pas le droit de devenir elles aussi des ETI ?
  • Leurs besoins sont-ils 5 fois moindres que leurs compétitrices européennes ?
  • En quoi rend-on service aux PME hexagonales en restreignant leur liberté de recourir à de tels modes de financement ? Leurs choix sont-ils déjà si larges ?
  • Enfin, l'épargnant français est-il si peu averti ? Pourquoi l'encourager à investir hors de France ? Et pourquoi empêcher un étranger d'investir en France ?

Arrêtons de sortir l'épouvantail « entreprise = risque » et de nous réfugier derrière l'Etat protecteur, bienfaiteur, providence !  Qui crée l'emploi ? Qui crée la richesse ? Qui crée la croissance et … qui la consomme ? Libérons les énergies, allégeons les contraintes, levons les barrières : faisons confiance aux entrepreneurs et aux investisseurs et encourageons tout ce qui peut contribuer à  créer  emploi,  croissance et  richesse.

Une opération de crowdfunding d'envergure européenne : 10 millions € a été lancée avant la réforme. Objectif : financer le développement d'un constructeur français de véhicules électriques, créer sous 2 à 3 ans près de 200 emplois et fournir du travail à de nombreux sous-traitants locaux. En quoi brider demain à 1 million € le financement d'un tel projet aurait-il du sens si le besoin réel est de 10 millions € ?

Agir ou se résigner ?

Les besoins des sociétés innovantes se limitent rarement  à un million €.
Moins financer reviendrait à moins innover, moins embaucher, moins investir, moins exporter et favoriser la concurrence étrangère.  Les porteurs de la réforme du crowdfunding  ne peuvent rester insensibles à ce qu'est en France, la dure réalité de l'entreprise.



Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 2
à écrit le 11/04/2014 à 18:37
Signaler
Ok, je trouve le crowfunding génial et ces contraintes obsolètes. Les français sont des gens responsables comme les autres...

à écrit le 10/04/2014 à 18:13
Signaler
Vraiment rien à ajouter: tout est dit! Xavier de Lombarès Aptimen Managers

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.