[Tourisme en 2050 2/4] Des musées sous le signe de l'ouverture

Si 2050 reste encore lointain, des tendances émergent déjà et dessinent ce que sera le musée de demain. Cette institution permanente sans but lucratif au service de la société et de son développement se veut désormais plus ouverte sur le territoire mais aussi auprès des individus. Dans les décennies à venir, le développement du numérique risque aussi de bouleverser l'expérience utilisateur.
Au Musée des Confluences, l'exposition Antarctica témoignait d'une expérience immersive du visiteur.

Fermez les yeux et imaginez. Vous êtes chez vous, assis dans votre canapé, après une intense journée de travail. Plutôt que de regarder la télé, vous enfilez votre casque de réalité virtuelle. Devant vos yeux, défilent La Joconde ou la dernière exposition du musée des Beaux-arts de Lyon. Nous sommes en mars 2050 et ce que vous êtes en train de regarder, c'est votre propre cabinet de curiosité virtuel, constitué à partir des bases de données des musées que vous avez pu visiter.

Ces musées "hors les murs" et dématérialisés sont déjà une réalité. Le musée d'Art moderne de San Francisco vient de développer un outil permettant d'envoyer ses œuvres d'art par texto. Mais ces initiatives devraient s'accentuer, se généraliser dans les décennies à venir. "Nous devons imaginer de nouvelles pratiques, nous devons aller chercher les gens en dehors", s'exclame Hélène Lafont-Couturier, directrice du musée des Confluences à Lyon. Autrement dit, être présent autrement dans la société.

Ouverture au public

S'ouvrir davantage vers l'extérieur permet également de répondre à un autre enjeu majeur des "ces institutions permanentes sans but lucratif au service de la société", comme les définit Hélène Lafont-Couturier : aller capter un public plus large. Au sein de l'établissement lyonnais, "un visiteur sur trois n'avait jamais poussé la porte d'un musée avant de venir, 40 % des visiteurs ont réalisé des études courtes (maximum bac +2) ou sans diplôme, contre 30 % en moyenne dans les autres musées français." Tout l'enjeu est de casser cette image d'un musée inaccessible, "il ne doit plus faire peur".

C'est d'ailleurs l'un des points qui ressort du rapport de la mission "Musées du XXIe siècle", remis à l'ancienne ministre de la Culture, Audrey Azoulay, en mars. Parmi les différentes thématiques abordés, celui d'un musée éthique et citoyen, afin d'aller contre cette image "surannée du musée, un sentiment d'intimidation, et l'idée d'une institution à l'écart des questions de société". Ainsi, parmi les chantiers à ouvrir, le rapport défend l'idée d'un musée qui serait un forum culturel permanent, s'adressant à tous les publics. "Une web-tv du réseau des Musées de France en élargira l'audience et fera la promotion de cette nouvelle fonction muséale."

Collaboratif

Ce même rapport préconise qu'"aux résidences d'artistes, pourront désormais s'ajouter les résidences de journalistes, mais aussi celles d'historiens ou d'anthropologues, et plus largement de jeunes chercheurs qui participeront au décodage des sujets sensibles". Car toujours dans cette idée d'ouverture, le musée de demain se voit plus collaboratif.

"Nous serons amenés à davantage collaborer avec d'autres champs comme la chorégraphie ou le cirque", imagine Thierry Raspail, directeur du musée d'Art contemporain (Mac) à Lyon.

Un constat que partage Hélène Lafont-Couturier, reprenant l'exemple d'une nuit au musée des Confluences, en collaboration avec la Maison de la Danse : "Un pianiste et une danseuse ont réalisé un cours dans les couloirs du musée. Les gens se sont arrêtés, ont même enlevé leurs chaussures et ont rejoint la barre."

Numérique

Même s'il reste encore difficile de se projeter tant les technologies évoluent rapidement, l'expérience du visiteur devrait être amenée à évoluer dans les décennies à venir. Avec le développement du numérique, le public sera davantage acteur que spectateur de sa visite. Thierry Raspail le confirme :

"Aller au musée pour s'asseoir devant un ordinateur n'est pas suffisant. L'irruption du numérique va être formidable. On peut imaginer un système de capteur qui permet d'aller à l'intérieur même d'une œuvre d'art."

Il sera par exemple possible de tourner virtuellement les pages d'un manuscrit, aujourd'hui enfermé dans des cages de verre. Un storytelling et une gamification poussés grâce à l'irruption de technologies comme la réalité augmentée ou virtuelle. De telles innovations sont d'ailleurs déjà à l'œuvre au musée Gallo-Romain de Lyon. "Beaucoup de stèles sont en latin, et personne ne les comprend. Au cours d'un Muséomix, nous avons imaginé un vidéomapping qui permet d'expliquer le contenu de manière ludique", raconte Christophe Monnet, directeur adjoint d'Erasme, laboratoire d'innovation ouverte de la métropole de Lyon, également cofondateur de Museomix, dont l'objectif est d'imaginer le musée autrement, au cours d'un marathon créatif. Pour lui, "ces dispositifs technologiques permettront au visiteur de s'exprimer, de laisser ses propres traces dans un musée."

Mais le numérique ne sera pas le seul bouleversement à l'intérieur du musée. Pour Thierry Raspail, le maître-mot est la diversification : "Nous aurons deux types de musées : des structurants, et d'autres plus spécialisés et originaux. Car si on s'amuse à copier un musée qui est ailleurs, on est mort."

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