Réforme du marché du travail, infrastructures, succession de Gattaz : les réponses du patron du Medef Aura

Patrick Martin, président du Medef Auvergne-Rhône-Alpes, a abordé pendant plus de deux heures, ce mardi matin, aussi bien des sujets locaux que nationaux : craintes sur la poursuite des grands projets d'infrastructure du territoire (A45, Lyon-Turin), redressement de l’activité économique, réactions concernant les premières mesures du gouvernement et particulièrement les ordonnances Pénicaud. Sans oublier sa possible candidature à la succession de Pierre Gattaz. Tour d'horizon.
  • Les ordonnances Pénicaud

Dans la droite ligne de Pierre Gattaz, président du syndicat patronal, Patrick Martin, président du Medef Auvergne-Rhône-Alpes a salué en grande partie le contenu de ces ordonnances dévoilées la semaine dernière, qui visent à réformer le marché du travail. "Nous serons cependant très attentifs aux décrets d'application et au délai de mise en oeuvre", a-t-il poursuivi. Mettant en avant "la qualité du processus et du dialogue", le dirigeant a reconnu la portée importante de ces textes, qui devraient notamment impacter particulièrement "les TPE/PME". Autre élément positif selon lui, la "bonne décision d'élargir la rupture conventionnelle individuelle vers un acte collectif, permettant de désamorcer certaines situations délicates". La disposition du "contrat de chantier" fait également office de bon point. Concernant le dossier de la fusion des instances représentatives du personnel, le patron du groupe Mabeo a parlé de "demi-satisfaction". Le syndicat espérait que la concentration en un unique organisme concernerait les entreprises ayant jusqu'à 300 salariés, et non pas jusqu'au seuil de 50 salariés comme l'envisage le gouvernement.

Mais Patrick Martin a cependant tenu à assurer que "la petite musique selon laquelle le gouvernement serait à la botte du Medef n'est pas une réalité", prenant pour exemple la question des modifications des indemnités salariales. S'il souligne le caractère positif du plafonnement des indemnités en cas de licencient abusif - "jusqu'à alors une vraie inquiétude, incertitude voire une obsession pour les chefs d'entreprise"-, ces mesures sont "à relativiser car les actions prud'homales de ce type ne concernent que 8 % des cas". Il critique ensuite la revalorisation des indemnités légales - "un gage accordé aux syndicats", calculant, qu'au final, entre "plafonnement des indemnités en cas de licenciement abusif et hausse des indemnités légales, cela va in fine coûter plus cher aux entreprises".

Autre "déception" mise en avant par le patron du Medef régional concernant les ordonnances : l'équilibre entre accord de branche et d'entreprise. Le syndicat patronal, relayé par Patrick Martin, voulait aller plus loin dans les termes des négociations au sein des entreprises, notamment sur les grilles salariales et non pas "uniquement sur les primes ou le 13e mois", explique-t-il.

  • Les combats à suivre : budget, transformation du CICE

Si le premier syndicat des chefs d'entreprise a ferraillé tout l'été pour faire entendre ses positions au sujet des ordonnances réformant le marché du travail, il n'aspire pas à relâcher la pression. Parmi les débats à venir, la loi des finances concentre les attentions du Medef sur plusieurs points : stabilisation des dépenses en volume ; 4 milliards de nouvelles économies nécessaires, retour sous la barre des 3 % de déficit. Mais le point de crispation pourrait sans doute se focaliser sur l'avenir du Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) lancé sous François Hollande. Si les chefs d'entreprise reconnaissent désormais de façon majoritaire son impact positif sur les emplois et le soutien à l'activité, le gouvernement Philippe veut le transformer en baisse de charge durable pour les entreprises. Cette transformation, imaginée en deux temps (d'abord ramener la fourchette de 7 % à 6 % avant une transformation en baisse de charge pérenne) "augmenterait l'assiette fiscale des entreprises" sur laquelle elles seront imposées, estime Patrick Martin. Le chiffre de 7 milliards d'euros de manque à gagner pour les entreprises a été avancé par le président de la fédération Auvergne-Rhône-Alpes. "Une telle mesure serait en contradiction avec le discours et les premiers actes du gouvernement", poursuit-il. Autre élément d'inquiétude du côté du Medef, "la surtaxe temporaire envisagée pour les grandes entreprises".

  • Conjoncture

 "Je partage le constat d'une amélioration de la situation économique", a souligné Patrick Martin. "La tonalité du discours des patrons, et leur moral, s'améliorent clairement. C'est encourageant après des années de sinistrose". Parmi les indicateurs clés, la baisse des défaillances d'entreprise, l'amélioration des marges des sociétés, les bons chiffres de la création d'emplois, et particulièrement un redressement significatif dans l'industrie et le bâtiment, sont autant d'éléments mis en valeur.

  • Les infrastructures de transports

Patrick Martin a souhaité "tirer la sonnette d'alarme" concernant la "mise en pause" annoncée par le gouvernement sur plusieurs grands sujets d'infrastructure. Dans le viseur du président de l'instance régional, les questionnements autour du projet ferroviaire européen Lyon-Turin, mais aussi celui de l'autoroute A45 entre Lyon et Saint-Etienne. "Je suspecte que sous prétexte d'économie budgétaire, ces projets soient remis en cause pour des raisons occultes ou écologiques", fustigeant entre les lignes l'équilibre gouvernemental incarné par Nicolas Hulot au sein du ministre de l'Environnement. "Si les décisions ne sont pas actées très rapidement, elles ne seront jamais prises" assure-t-il, prenant à témoin la fin de validité de la déclaration d'utilité publique de l'A45 prévue "en 2018". Concernant le Lyon-Turin, nul doute que les patrons et les autres chambres consulaires vont intensifier le lobbying, alors qu'un sommet franco-italien - durant lequel ce sujet sera abordé - doit se tenir à Lyon fin septembre.

  • La succession de Pierre Gattaz

Enfin dernier sujet chaud, et qui deviendra brûlant au fil des mois : la succession de Pierre Gattaz. L'actuel président du Medef avait annoncé dès son élection qu'il exercerait un mandat unique. Une telle position a forcément ouvert les sollicitations et les appétits. Si Gattaz a exhorté ses troupes à respecter le calendrier (début de la campagne fixé au 1er janvier 2018) afin de rester "concentré sur les batailles à venir", en coulisse, les manœuvres ont débuté. Et Patrick Martin pourrait bien se glisser dans celles-ci. Défendant une ligne territoriale "là où se déroulent aujourd'hui en grande partie l'économie réelle et les décisions concrètes", affichant une volonté de rééquilibrer la balance entre instances départementales / régionales et branches professionnelles, Patrick Martin dit consulter les autres patrons régionaux afin d'aboutir à une candidature issue des territoires et pouvant être crédible. Sa candidature, ou une autre, pourraient être envisagées, assure-t-il.

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