Lyon : une place à prendre pour le cinéma indépendant

Tandis que les CNP vivotent dans le centre ville de Lyon, plusieurs projets semblent se dessiner dans le paysage lyonnais. Chapeauté par l’Institut Lumière, la réouverture de la Fourmi vient d’être annoncée, tandis que le Comoedia se prépare à investir 2,5 millions d’euros pour la création de trois nouvelles salles mitoyennes.

La première bonne nouvelle est arrivée en septembre dernier. Véritable institution du film Arts et Essais, le cinéma la Fourmi (IIIe arrondissement de Lyon) rouvrira ses portes d'ici la fin de l'année, sous l'égide de l'Institut Lumière qui a créé une société commerciale afin d'en assurer la gestion.

Fermé en 2012, faute de fonds pour assurer sa rénovation, ce cinéma de trois salles offrira une capacité de 250 sièges au total, après des travaux estimés à 850 000 euros (dont un tiers sera financé grâce à des fonds du CNC et du Conseil Régional). Si le fond de commerce a été cédé gratuitement à l'Institut Lumière à sa fermeture, son directeur Thierry Frémaux a confirmé qu'il souhaitait ouvrir le capital à des intérêts privés. L'objectif ? Respecter l'ancienne ligne éditoriale du lieu en offrant "un cinéma d'art et d'essai pointu et des rééditions".

Un projet citoyen

Si la nouvelle semble bien accueillie, "ce n'est pas trois salles qui combleront le manque que l'on puisse avoir à Lyon, dans une ville qui représente un bassin de plus d'un million et demi d'habitants", estime Francis Forge. Aux côtés de quatre autres amoureux du cinéma, ce dernier porte depuis plusieurs mois le projet de créer une salle de trois écrans indépendante en plein cœur de Lyon, baptisée le Trésor Public. L'équipe assure avoir bouclé le financement de son projet et prévoit d'investir 800 000 euros, grâce à un investisseur privé ainsi qu'à des fonds du CNC de la Région Rhône-Alpes.

Aucune piste immobilière n'est encore arrêtée. L'emplacement du Pathé Cordeliers qui doit fermer fin 2014 est écarté car jugé : "bien trop sujet à la pression immobilière". D'après une source municipale, le géant de la mode Printemps serait d'ailleurs déjà sur les rangs pour récupérer le bail du cinéma. Si la ville de Lyon a déjà fait savoir qu'elle ne financerait pas les projets à vocation commerciale, le collectif est toujours en discussions pour l'identification d'un lieu. "Nous voulons un projet à taille humaine, qui accueille entre 80 et 100 000 spectateurs la première année", annonce Francis Forge.

"Trouver son public"

Pour l'Association Enjeux sur Image, créée à l'occasion de la fermeture du CNP Odéon à l'été 2009, il y a une place à prendre pour développer un autre cinéma indépendant en Presqu'île de Lyon. "Il existe un vrai problème de diversité de l'offre et de durée, car il ne suffit pas de montrer un film, encore faut-il qu'il ait le temps de trouver son public", rappelle Marie-Reine Jazé, la présidente d'Enjeux sur Images. Les CNP, qui étaient jusqu'ici un acteur clé sur la scène lyonnaise, semblent en très mauvaise posture.

"On parle régulièrement de fermeture. La programmation est faite depuis Paris pour tous les cinémas de Lyon, Marseille et Paris tandis que les distributeurs, qui ne sont pas payés, ne veulent plus présenter de films", observe-t-elle. S'il ne souhaite pas commenter ces informations, l'artiste parisien Galeshka Moravioff, propriétaire des deux CNP Lyonnais, se retranche derrière les accusations : "Je pense qu'il y a une place à prendre pour le cinéma indépendant, mais la politique du CNC et la concentration du secteur sont contre les indépendants", lâche-t-il.

CNP Bellecour

Les CNP dans le centre de Lyon semblent en mauvaise posture (Crédits : Laurent Cerino)

Trois nouvelles salles pour le Comoedia

Installé dans le VIIe arrondissement de Lyon depuis 8 ans, le Comoedia vient quant à lui d'annoncer l'ouverture de trois nouvelles salles mitoyennes d'ici avril 2016. "On se retrouve aujourd'hui avec six écrans à devoir refuser, par manque de salles, un certain nombre de films que l'on nous propose. Il y a aussi des films que l'on doit arrêter trop tôt pour faire de la place aux nouveautés", explique Marc Bonny, le président de ce complexe classé Arts et Essais. Lorsque l'INPI a fermé ses portes pour déménager rue Raulin, la direction du Comoedia a donc fait le pas.

"Nous savions qu'une opportunité comme celle-ci, avec un espace mitoyen en plein cœur d'îlot, ne se représenterait pas".

Avec un investissement de 2,5 millions d'euros, les travaux devraient démarrer début 2015 pour une livraison en avril 2016.

Le défi du financement

"Nous faisons aujourd'hui en moyenne 330 000 entrées. L'objectif est de gagner entre 80 et 100 000 entrées par an, et de montrer jusqu'à 18 à 20 films en multiprogrammation au lieu de 12 ou 14", précise le président. Avec ses 13 équivalents temps pleins, pas question toutefois que le Comoedia se transforme en une grosse machine. "La façade, les caisses et le hall d'entrée vont rester les mêmes, c'est simplement le cheminement interne qui évoluera". Pour lui comme pour tous les indépendants qui se lancent, le principal défi reste le financement puisque les salles de cinéma nécessitent des investissements très lourds, auxquels s'ajoutent un prix du foncier souvent prohibitif.

"Heureusement, il y a des aides pouvant arriver du CNC ou de la région Rhône-Alpes, qui s'avèrent souvent déterminantes pour investir", affirme Marc Bonny, qui rappelle que "contrairement à d'autres villes, la municipalité de Lyon a fait le choix de ne pas octroyer d'aides aux cinémas indépendants". Elle est cependant co-financeur de l'Institut Lumière à Lyon, et a décerné à ce titre une subvention de 300 000 euros pour participer au programme de réaménagement du site en novembre 2013.

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Commentaires 2
à écrit le 04/03/2015 à 8:25
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Avec mon soutien au cinéma Art et Essai ! Bravo !

à écrit le 16/10/2014 à 18:06
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Bravo au Comédia

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