La victoire est implacable, mais contenue - du moins dans les faits. Le syndicat Artisans de notre avenir (ADNA) vient de remporter les élections pour les chambres de métiers et de l'artisanat sur la région Auvergne Rhône-Alpes (qui compte 158 000 artisans) avec sa liste Fiers d'être artisans face à l'Union professionnelle artisanale (UPA).
L'émanation de la CGPME (et soutenue par la Fédération française du bâtiment) remporte sept chambres contre seulement deux lors des précédentes élections de 2010 (Isère et Haute-Loire). Elle en récupère ainsi cinq dont la puissante du Rhône, à la liste concurrente qui en compte désormais plus que quatre. ADNA-Fiers d'être artisans devient donc majoritaire sur le grand territoire. Une liste commune sans étiquette ayant été élue en Haute-Savoie.
Le Rhône passe sous pavillon ADNA
Une réussite qui montre la volonté formulée ces dernières années par la CGPME de s'impliquer davantage dans le milieu artisanal et son réseau consulaire, longtemps dominé par l'UPA.
"On a tout gagné, c'est un raz-de-marée, une révolution, s'exclame François Turcas, président de la CGPME Rhône. Nous avons fait une percée extraordinaire dans le milieu des artisans. Désormais nous sommes le représentant de toutes les entreprises."
Ces élections sont aussi un coup de froid pour l'UPA qui perd six chambres sur toute la région, mais surtout celle du Rhône. La plus importante avec ses 31 000 ressortissants. Ancien adhérent UPA, Alain Audouard, tête de liste et président sortant de la chambre remporte donc ces élections sous la bannière ADNA (18 sièges sur 25), qu'il avait rejoint au cours de son dernier mandat.
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"Le message que nous avons véhiculé a été le bon, tant sur notre bilan que sur nos projets", souligne Alain Audouard, qui attaquera son 4ème mandat.
"La vérité ne paye pas toujours"
Du côté de l'UPA, la défaite est reconnue mais laisse un arrière-goût. "Nous avons fait une vraie campagne cette année avec de vraies propositions pour les artisans mais nos collègues ne nous ont pas entendus. Malheureusement la vérité ne paye pas toujours", reconnait Henri Meunier, tête de Liste dans le Rhône et secrétaire régional de l'UPA.
"Dire qu'ils ont fait une bonne campagne est démagogique. Ils ont simplement trouvé les bons mots parfois hors sujets mais qui plaisent aux artisans, mais qui sont faux", souligne un cadre de l'UPA.
Ces élections "ne sont pas une catastrophe non plus", rassure Alain Berlioz-Curlet, président UPA de la chambre régionale de métiers et de l'artisanat Auvergne Rhône-Alpes. Désormais, le bureau du syndicat devrait se réunir prochainement afin d'analyser cet échec et trouver des réponses pour l'avenir.
Où sont les artisans ?
Le succès d'ADNA-Fiers d'être artisans est bien réel, cependant, il est esquivé par le faible taux de participation des artisans à ce scrutin qui se déroulait du 1er au 14 octobre. Entre 7 % (score le plus faible pour la Savoie par exemple) et 23 % (pour la Haute-Loire, score le plus élevé).
Au point d'en être un sujet inquiétant pour l'ensemble des partis qui se questionnent sur le rôle et l'avenir des chambres de métiers."Après son inscription à une CMA, l'artisan est très peu impliqué dans la chambre, souligne Alain Berlioz-Curlet. Cela demande donc une remise en question du réseau des chambres."
"Je serais un président encore plus heureux si je fais évoluer le taux de participation des artisans, et leur regain pour les chambres consulaires", prévient François Turcas, dont le mandat à la tête de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) prendra fin en 2018.
Et pourtant, les efforts entrepris du côté d'Artisans de notre avenir auront certes permis sa victoire, mais au vu des moyens alloués, le résultat est en deçà des espérances. En effet, pour le seul département du Rhône, il disposait d'une enveloppe de 50 000 euros pour sa communication et les appels au vote - contre 1 250 euros pour l'UPA -, mais la participation globale a atteint 13,72 % contre 16,48 en 2010. Même constat ailleurs.
"Je me demande comment nous pouvons mobiliser davantage. Avec le vote électronique peut-être ?", s'interroge Alain Audouard.
Objectif : la chambre régionale
Désormais, chaque chambre devra élire son bureau et son président avant le 9 novembre afin de préparer la construction de la nouvelle assemblée régionale, dominée actuellement par l'UPA. Une assemblée qui compte 96 membres composés de 48 membres de chaque côté.
L'enjeu est donc de savoir si ADNA ira jusqu'au bout en raflant la chambre régionale de métiers et de l'artisanat Auvergne Rhône-Alpes. Alain Berlioz-Curlet, président sortant UPA, ne se prononce par encore sur sa candidature à sa propre succession, "mais nous ne baisserons pas les bras", prévient Henri Meunier qui critique ouvertement le monopole de la CGPME et du Medef. Aucune information non plus du côté d'ADNA.
Ce qui est sûr, en revanche, c'est que François Turcas voit la victoire de son camp. "On va la leur prendre (l'assemblée, ndlr)", affirme le dirigeant. Réponse, le 16 novembre, jour de l'assemblée constitutive.
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