Jean-Loup Rogé (Segeco)   : "Notre gestion nous met à l'abri des conflits d'intérêts"

Jean-Loup Rogé qui a repris Segeco en 2007, dont il était déjà un des associés, prévoit un déploiement à l'international pour accompagner l'implantation d'entreprises étrangères en France. Le groupe né dans l'expertise-comptable s'est étoffé pour répondre à la demande du marché et couvrir tous les aspects de la gestion d'entreprise. Selon son PDG, l'évolution du cadre professionnel suite à la loi Macron n'engendre pas un risque de conflits d'intérêts. Entretien.

Acteurs de l'économie - La Tribune : Quel était votre projet lorsque vous avez repris Segeco en 2007 ? Votre ambition était-elle de multiplier la taille par plus de six en passant de 12 à 75 millions de revenus ?

Jean-Loup Rogé. Tout d'abord, je voudrais préciser que j'ai rejoint Segeco en 1993. Lorsque j'ai repris la société, en 2007, j'étais associé au capital. Dès cette époque le projet ELAN était bien d'offrir un guichet unique allant de l'expertise-comptable à la formation en passant par le commissariat aux comptes, le juridique, et l'informatique. Nous sommes restés dans ce modèle de multi-spécialiste pour répondre à l'ensemble des préoccupations du client.

Jusqu'où voulez-vous grossir ?

Nous ne sommes pas dans une stratégie de grossir pour grossir, mais bien dans l'objectif de répondre aux demandes des clients. Leurs besoins ont évolué dans le temps. Ainsi, il y a quinze ans les TPE n'achetaient que de la comptabilité. Aujourd'hui, le juridique fait partie du pack qu'elles sollicitent.

Par ailleurs, le digital a transformé la manière de collecter, traiter et restituer l'information. Néanmoins, notre ancrage reste toujours très centré sur Auvergne-Rhône-Alpes. Nous avons pris position à Paris lorsque nous avons décidé d'élargir notre spectre aux grands comptes. Notre implantation à Toulouse s'explique par les nombreux clients que nous suivons dans l'aéronautique et notamment Airbus. Dans le cadre de notre prochain plan stratégique, celui qui succédera à Magellan, en cours, nous réfléchissons à d'autres territoires.

Il semble que chaque fois que vous ajoutez une nouvelle activité vous commencez par une création ex nihilo. Cette méthode s'est vérifiée pour le Consulting - avant l'acquisition de Magellis Consultants à Paris- ou encore dans la profession d'avocat : création de Metalegal. Est-ce une stratégie ?

Ce n'est pas un choix délibéré. Nous sommes une entreprise de croissance organique dans nos métiers. Les rapprochements, parfois liés à des rencontres à l'instar de Magellis, s'effectuent sur la base d'une complémentarité de clientèle ou d'activité.

La loi Macron, dans son ordonnance du 31 mars 2016, ouvre la porte à la constitution de sociétés pluri-professionnnelles mêlant le chiffre et le droit. Des voix se sont élevées, notamment l'Ordre des avocats de Paris, mettant en garde contre "un grave risque d'insécurité juridique" (sic). Comment prévenez-vous les éventuels conflits d'intérêts ? Comment évitez-vous toute porosité entre le conseil et l'audit ?

Nous sommes dans l'esprit de la loi Macron depuis longtemps en ce sens que nos activités fonctionnent en synergie. Ce texte conforte donc notre stratégie formalisée depuis dix ans en nous ouvrant des opportunités importantes. Il est exempt de conflits d'intérêts et quoi qu'il en soit, notre gestion nous met à l'abri de ce type de risque. Quand nous entrons un nouveau client en commissariat aux comptes nous vérifions, auparavant, qu'il n'est pas sous contrat avec nous pour d'autres prestations : commissariat aux comptes etc. Je me répète : travailler à une plus grande échelle est une attente du marché. Les Anglo-saxons le font depuis longtemps.

Lire aussi : François Péron : « La Loi Macron met en grand danger les commissaires-priseurs judiciaires »

Quels sont les nouveaux champs que vous pourriez agréger à votre périmètre actuel ? Pourriez vous, comme Fiducial, développer une activité dans la sécurité ? N'est-ce pas un peu votre modèle ?

Notre modèle est à l'opposé de Fiducial dont la stratégie repose sur la croissance externe. Nous, nous voulons aider nos clients à augmenter leur valeur ajoutée. Dans ce but, nous proposons à nos clients toute la filière ressources humaines (RH) : recrutements d'ingénieurs avec Talended, managers et cadres supérieurs avec Teal Executive, formation finances, RH et informatique et même la gestion des licenciements et de l'outplacement.

L'équipe dédiée compte aujourd'hui une trentaine de collaborateurs. Tout comme le secteur de la cybersécurité sous la marque Securymind. Nous avons des agréments Passy et des experts en interne de haut niveau dont certains viennent de l'Armée. Dans le droit nous allons renforcer la partie fiscalité. La fusion avec le cabinet d'avocats Brumm & Associés nous renforce dans le droit social en nous étendant à d'autres domaines : propriété industrielle, immobilier, relations familiales.

Avez-vous des visées à l'étranger ? Si oui, où ?

Dans notre futur projet d'entreprise, qui sera prêt entre mai et juin 2018, l'international sera un axe de développement. Nous voulons accompagner les groupes étrangers qui veulent se doter de filiales en France. Une de nos entités est en mesure de faire de la recherche de site. Et nous pouvons déployer nos autres prestations. Nous allons ouvrir des desks à l'étranger et pas uniquement en Europe.

Parlez-nous de votre démarche RH en interne. Comment s'exprime l'importance que vous voulez donner au travail collectif ?

Le travail collectif est indispensable. Pour le favoriser, nous opérons une refonte dans la distribution des espaces et des lieux de vie. Nous mettons l'accent sur le travail en binôme. Quinze collaborateurs suivent une formation de chef de projet pour coacher la transformation. Et puis, notre académie maison a pour objet de gérer l'intégration de nouveaux salariés.

Votre groupe se veut un acteur de la transformation. Comment imaginez-vous le futur ?

Demain nous apprendrons à nos clients à résoudre leurs problèmes. Nous leur transmettrons nos savoir-faire. Et nous, nous continuerons à faire monter en gamme nos métiers.

Vous allez bâtir un siège en propre en 2019. Est-ce pour être plus visible ?

Notre siège social est à Brives-Charensac où nous employons 50 personnes avec un vrai bureau de production. Nous sommes la seule ETI basée en Haute-Loire et nous restons fidèles à nos racines. A Lyon, ce que nous nous allons construire est un lieu de vie, de rencontres, de 6 000 m², toujours basé dans le 6ème arrondissement mais je ne dévoilerai pas maintenant l'adresse précise. Il sera ouvert au coworking réservé à nos clients, un peu sur le mode Google. Nous voulons être collaboratifs jusqu'au bout. Ce nouvel immeuble conçu par l'atelier d'architectes lyonnais Babylone Avenue sera agrémenté de jardins, de terrasses, et la livraison est programmée en 2019.

En chiffres
Segeco a été créé en 1973.
Le groupe annonce 75 millions d' euros de chiffre d'affaires consolidé 2016.
700 salariés.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.