Malaise à la CCI de Grenoble

Le personnel de la CCI de Grenoble s'inquiète des mesures de réductions budgétaires qui se traduiront notamment par les 37 suppressions de postes annoncées par la direction.

Aucune manifestation ni banderoles n'ont été déployées dans la CCI de Grenoble. Et pourtant, des salariés du siège et du Groupe Formation étaient bel et bien en grève jeudi dernier pour protester contre les suppressions d'emplois annoncées par la direction.

A la suite d'une AG qui s'est tenue le 23 octobre, la direction de la CCI a confirmé la suppression de 48 postes (dont 11 étaient encore non-pourvus), principalement au sein du siège et du Groupe Formation.

Baisse des recettes

La raison invoquée ?  La baisse des recettes fiscales de 37 % sur les trois prochaines années, ainsi que la modification de la loi sur la formation continue, "qui va faire passer la formation continue du ressort de l'organisation à celui l'individu. Nos clients étaient les entreprises : les salariés ne viendront pas spontanément taper à notre porte", prédit le président de la CCI de Grenoble, Jean Vaylet, qui souhaite amorcer un virage vers des secteurs plus porteurs comme l'apprentissage et l'enseignement supérieur, à travers ses deux antennes, Grenoble Ecole de Management et l'IMT de Grenoble.

"Comme toute entreprise qui a une baisse de recettes, nous avons donc regardé comment faire baisser les dépenses en modifiant notre offre, en essayant d'adapter le profil des gens aux besoins et en supprimant un nombre de dépenses qui ne paraissent pas nécessaires", explique Jean Vaylet.

2% de licenciements secs

Pour les syndicats, qui avaient appelés à la grève jeudi 20 novembre, ces suppressions de postes n'ont aucun sens au regard de la situation financière de la CCI, qu'ils jugent confortable. Ils appellent à d'autres actions et brandissent un rapport de la CCI Rhône-Alpes, issu de l'AG du 29 octobre dernier, rappelant que la masse salariale de Grenoble sera "en augmentation de 2,7 millions d'euros en 2015 pour faire face à une évolution prévisionnelle de l'activité de GEM".

Ils pointent également du doigt l'acquisition de locaux de 5 133 m2  sur le polygone scientifique de Grenoble en vue d'une extension de GEM pour un montant de 10 700 000 euros, payés en 2013 par prélèvement sur fond de réserve. "Or, on ne fait pas un tel investissement avant de licencier en masse", estime Sylvia Vuarnet, présidente CFE CGC, qui craint que les 37 licenciements annoncés ne soient suivis d'une seconde vague.

"Sans compter qu'en demandant aux employés de repostuler sur des postes quasiment à l'identique au sein du groupe Formation, c'est comme si l'on créait un marché de l'emploi en interne en transférant la responsabilité du reclassement de l'employeur vers l'individu", estime Dominique Thevenin, enseignant chercheur en finances à GEM et représentant du personnel CFE CGC en Rhône-Alpes.

CCI de Grenoble

La plus riche CCI de Rhône-Alpes ?

"Parmi les suppressions de postes annoncées au siège, on retrouve essentiellement des seniors âgés de 50 à 55 ans qui n'auront pas droit à la pré-retraite comme on l'annonce", affirme Béatrice Valfort, déléguée CFE CGC au réseau consulaire, qui estime que la CCI de Grenoble "est l'une des plus riches de Rhône-Alpes".

M. Vaylet promet qu'une "vingtaine de reclassements seront effectués en interne, dans les secteurs prioritaires qui sont GEM, l'IMT ou le centre d'export de GREX", tandis qu'une "demi douzaine de personnes ne souhaitent pas être reclassées car ce sont soit des gens en pré-retraite, ou avec un projet personnel bien ficelé", précise-t-il. Refusant de parler de plan social, il estime que cela portera le nombre de licenciements secs à une dizaine de personnes, soit 2% des effectifs globaux de la CCI. "Ces licenciements touchent tous les niveaux hiérarchiques, soit un directeur, des cadres administratifs et des collaborateurs dans l'esprit de la redéfinition de notre offre", assure-t-il.

Avec 745 salariés permanents, la CCI de Grenoble compte près des ¾ de son personnel dans la formation, que ce soit à travers son Groupe Formation, l'IMT ou GEM, qui représente à elle seule près de 500 postes.

"Le budget global de la chambre est de 88 millions d'euros en 2014 et 89 millions d'euros en 2015, mais 50% de ce chiffre va à GEM et 25% à l'IMT. Sur 88 millions d'euros, seuls 13 millions proviennent de la recette fiscale et 75 millions des frais de scolarité", précise Jean Vaylet.

Des chiffres contestés

Selon un rapport de la CCI Rhône-Alpes portant sur le budget primitif de 2015, 73 suppressions de postes (équivalents temps pleins) sont envisagées à Grenoble d'ici l'an prochain, sur un effectif total de 667 contrats CDI (équivalents temps pleins) en 2014. D'après ce même document, les contrats CDD sont appelés à connaître un bond, en passant de 59 à 103 (équivalents temps pleins) sur la même période. Des chiffres que le président de la CCI de Grenoble conteste : "Je n'ai pas d'autre plan que les suppressions déjà annoncées. En vue de cette situation, nous avons déjà mis en place un certain nombre de choses, comme le non remplacement de CDD, ce qui fait que le total n'est pas celui-ci", annonce-t-il.

Il rappelle que près de 25 millions d'euros d'investissements ont été réalisés dans le cadre de l'extension de l'IMT, afin d'accueillir de nouvelles formations dans des secteurs clés liés à la restauration, à la chocolaterie ou à l'énergie, tandis que le rachat et l'aménagement d'un bâtiment pour l'extension de GEM représentera un engagement de 35 millions d'euros d'ici 2017. "L'objectif étant d'augmenter de 5 à 6% le nombre d'étudiants de GEM, mais aussi de s'adapter à de nouveaux types de formations que sont les MOOCs par exemple", ajoute-t-il.

CCI de Grenoble

Une tendance à l'échelle régionale

Convoqués le 20 novembre lors d'une assemblée paritaire régionale, les syndicats CFE-CGC, CGT et UNSA affirment qu'ils ont été sollicités pour notifier "90 suppressions de postes de salariés statutaires à l'échelle de la région". Face "à l'ampleur et à la brutalité des procédés employés", ils demandent mise en place un plan social régional et la redéfinition de la stratégie régionale.

"Toujours sous le motif de la baisse des recette fiscales, on nous a annoncé une trentaine de suppressions de postes sur Saint-Etienne, alors qu'il y en avait déjà eu une vingtaine lors de la commission paritaire précédente consécutive à la fermeture de l'ESC Saint Etienne, puis 48 à Grenoble, 8 en Haute-Savoie, 4 dans la Drôme. Une trentaine de licenciements à Lyon doivent encore être annoncés à la prochaine réunion", s'inquiète Dominique Thevenin.

Selon lui, les présidents des CCI en Rhône-Alpes "se retranchent derrière les textes du statut des personnes consulaire, qui ne prévoyaient pas de plans de licenciement, mais uniquement des suppressions de postes à caractère de réorganisation interne", explique-t-il. En vertu de ces textes, le délai de préavis de ces agents est de 4 mois et le délai de carence est passé de 75 à 180 jours en juillet 2014.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 7
à écrit le 27/11/2014 à 18:54
Signaler
Effectivement, bravo pour votre connaissance du travail des CCI et surtout du statut de leurs salariés. Ils ne sont pas fonctionnaires, ils n'ont pas leurs avantages non plus, mais pour l'affirmer vous les avez sans doute déjà vus dans la rue, régul...

le 28/11/2014 à 10:48
Signaler
Si les salariés des CCI sont si efficaces, qu'ils créent leurs propres entreprises sans rien demander à personne, ils n'ont pas besoin d'aides puisqu'ils sont "experts" autoproclamés.

à écrit le 26/11/2014 à 9:01
Signaler
Un état en faillite il est urgent de fermer les administrations publiques sans utilités ou en doublons. Il est temps de taper dans le dur de la fonction publique pour arrêter le déclin de notre pays !!!!!!

le 17/12/2014 à 22:29
Signaler
Si seulement les cci faisaient parties de la fonction publique! Et non, ni droit privé, ni droit public, mais un pseudo droit consulaire, qui date de l'époque de Napoléon! Et qui ne reconnaît pas le licenciement économique, donc plus de 180 jours de ...

à écrit le 25/11/2014 à 22:52
Signaler
Faire disparaître au plus vite ces chambres consulaires, qui rackettent les entreprises comme le font les mafias. Si elles avaient une quelconque valeur, elles militeraient pour la libre adhésion.

le 26/11/2014 à 8:43
Signaler
Oui d'autant que les CCI sont un echec absolut, visible, incontestable puisque elles n'ont pas été capables de contrer le déclin de l'industrie et la mort des commerces en France. La France peut se passer sans aucun doute possible des CCI Chambres d...

le 28/11/2014 à 10:35
Signaler
On dit "échec absolu" et non "absolut". Car "absolut" c'est une marque de Vodka. A vous lire vous devez mieux connaître cette boisson que le fonctionnement et l'utilité des CCI ! Je dirige une petite entreprise industrielle (pas en Rhone-Alpes) et j...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.