"Nous défendons un système juridique accessible à tous"

Ce mercredi, les Notaires et leurs collaborateurs manifesteront à Paris et partout en France. Le projet de réforme des professions réglementées les inquiète. Pour Me Caroline Courtiade, présidente de la Chambre des Notaires du Rhône, une dérèglementation aurait des conséquences sur les Etudes mais aussi les justiciables.

Acteurs de l'économie : Les notaires dans la rue ce n'est pas banal. Qu'est qui motive votre mouvement?

Caroline Courtiade, présidente de la Chambre des Notaires du Rhône : Nous souhaitons attirer l'attention des élus et du public sur les enjeux d'une dérèglementation en particulier la sécurité juridique. C'est l'élément essentiel, déterminant. Nous défendons un système juridique accessible à tous pour tous, avec un maillage territorial équilibré. Je rappelle que nous sommes nommés par le ministère de la Justice. Après les déserts médicaux, nous ne voulons pas d'un désert juridique. Nos actes ont force de jugement. Nous conservons les documents. Nous pouvons prouver les titres, un droit non prouvé, c'est un droit qui n'existe plus. Les notaires et leurs collaborateurs assurent aujourd'hui un service public

Que signifierait cette réforme selon vous ?

Le plus inquiétant pour nous c'est la perte de la garantie sécurité. Dans un monde mondialisé, il faut un socle sécurisé. Si nous passons au modèle anglo-saxon, nous changeons notre vision des choses. Dans ce modèle, le juge est omniprésent et les contentieux se règleront devant les tribunaux. Tout deviendra contestable. Dans le système notarial un acte sur 1100 seulement est contesté, dans le système libéral c'est un sur trois. Une libéralisation aurait aussi des conséquences en terme d'emplois dans nos études.

Vous n'acceptez pas le terme de rentiers, mais la question du prix des actes est bel et bien posée ?

Le mot de rentier ne correspond pas à la réalité. Un notaire c'est d'abord une entreprise avec des collaborateurs. Il y a la partie travail et la partie capital. Le rapport de l'IGF a tendance à tout confondre. La rémunération moyenne d'un notaire en France c'est 75 000 euros par an. (NDLR: le rapport de l'inspection générale des finances sur les professions réglementées évoque 16 000 euros par mois).

Le tarif protège la personne. Il est progressif et redistributif. Les petits actes sont faits à perte. Les plus gros compensent, et cela permet à tous d'avoir accès aux actes.
Le modèle notarial n'est pas le plus couteux. Sur 90 % des actes, le système est moins cher que le modèle anglo-saxon. Sur les actes très importants, il est plus cher, mais cela ne représente que peu de cas.

Dans les pays où il y a eu une libéralisation du tarif, cela n'a pas fait baisser les prix, sauf pour les actes les plus importants. Changer de système ne serait avantageux que pour les plus hauts patrimoines au détriment des plus petits, excluant l'accès au droit des plus modestes. Les Français paieront plus sans le système redistributif que nous avons aujourd'hui. J'ajoute qu'aujourd'hui quand nous recevons des personnes étrangères, qui dans leur pays n'ont pas notre système, elles sont rassurées. Le modèle notarial s'exporte également à l'étranger, comme en Chine.

Comprenez-vous que les usagers s'interrogent par exemple sur le montant des frais de notaires lors d'une transaction immobilière ?

C'est vrai, nous-mêmes notaires, nous n'avons sans doute pas su expliquer cela, notamment la part des taxes qui reviennent à l'État. Le public s'imagine que nous empochons tout. Sur une transaction immobilière de 200 000 euros, ce qu'on appelle communément "frais de notaires" représente 15 245 euros. Dans les faits, 12 377 euros reviennent à l'État sous forme de taxes. 300 euros représentent les demandes de pièces, 2568 euros vont réellement à l'étude du Notaire. Nous n'avons pas suffisamment communiqué sur cette répartition. De fait, nous collectons aussi l'impôt pour l'État, cela représente 22 milliards d'euros de taxes diverses.

Avez des propositions à faire au gouvernement ?

Nous avons eu le projet de M Montebourg, il n'est plus au gouvernement. Nous attendons d'en savoir plus avec M Macron. Le Conseil supérieur du Notariat a rendez-vous jeudi avec le gouvernement. Nous allons faire des propositions. Nous ne sommes pas une profession figée. Sur le maillage du territoire, sur les tarifs également nous pouvons faire mieux. Nous pouvons envisager des améliorations.

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