Christine Ollier, patronne en 48 heures

Christine Ollier est lauréate du prix du rebond. Brutalement veuve à 40 ans, elle reprend le surlendemain les commandes de l'entreprise familiale Oletal, que dirigeait son mari. Dans ce drame, cette Lyonnaise a peu à peu cultivé l'opportunité de devenir " une autre personne".
Christine Ollier, lauréate du prix du rebond. Crédits : Laurent Cérino

Son mari était un colosse de 43 ans, bon vivant et extraverti. Il dirigeait la société familiale Oletal, spécialisée dans l'équipement de magasins (mannequins, sacs d'emballage, cintres, décorations…). Un vendredi de 2005, il décède brutalement sur un terrain de rugby. Devant cet événement tragique, Christine Ollier fait le choix d'endosser les habits de dirigeant de son défunt mari.

 Devenir une autre personne

Dès le lundi, elle prend donc les manettes d'Oletal. « J'étais maman, mariée, salariée, je suis devenue du jour au lendemain maman, veuve, dirigeante. Il a fallu accepter ces nouvelles identités, souligne-t-elle. Le mot « veuve », c'est un choc, et se voir patron n'est pas évident. Je suis devenue une autre personne. » Les sept salariés de l'entreprise l'ont encouragée dans cette épreuve. Ne se voyant pas peser de tout son chagrin sur ses trois enfants, Christine Ollier souhaitait rester dans la vie active, la vie sociale.

Christine Ollier, le baccalauréat en poche, exerce pendant 8 ans le métier de secrétaire médicale. En 1995, son mari l'entraîne dans Oletal : elle y dessine à l'époque les sacs. Plus tard, elle prend en charge les fonctions administratives et financières de l'entreprise. Elle connaissait la maison mais la diriger… « Je découvre qu'on attend du dirigeant une vision, un rôle de guide. C'est vous la patronne, c'est vous qui décidez. »

Au début le management la déroute

Au début le management la déroute, malgré la présence de salariés de longue date, pleins de courage. Christine Ollier aime apprendre, être challengée, se fixer des objectifs, et se sait optimiste. Elle peaufine son nouveau rôle en avançant, tutorée aussi par le CJD : « Leurs valeurs me vont bien, j'y ai fait de belles rencontres. »

Au fil des ans, elle s'entoure d'une équipe choisie, s'affirme dans ses relations bancaires, avec les fournisseurs, cultive des valeurs humaines qui lui sont chères. « Je veux que les gens se sentent bien dans leur travail. Oletal est une entreprise où l'affect a toujours été important, avec une culture d'entreprise que les salariés se transmettent. Quelque chose, en toile de fond, qui lie tout le monde. »

Rattrapée par la crise

Cette cohésion se révèle précieuse depuis que la crise frappe durement, en particulier ces magasins indépendants de Rhône-Alpes et même au-delà (prêt-à-porter, décoration, parfumerie, bijoux…) qui constituent la clientèle d'Oletal. Le chiffre d'affaires (un million d'euros en 2012) a chuté de 10 % en 2013, 2014 ne sera pas meilleure.

Alors elle pousse de nouvelles portes, celles de l'alimentaire (restauration, traiteur, sandwicherie…), booste le site internet marchand, développe le conseil et les services et renforce la qualité des sacs produits dans l'atelier de flexographie en périphérie lyonnaise, avec notamment la technique de la dorure à chaud. Un atelier qui voit passer 700 000 sacs à imprimer chaque année.

Oletal, du haut de sa longue existence lyonnaise et de ses 8 000 références, dispose d'une belle image auprès de sa clientèle mais le contexte global se révèle incertain. Pour autant, Christine Ollier dirige tranquillement, convaincue depuis longtemps que ce passage de relais si dramatique s'est révélé une chance. « C'était une opportunité à saisir pour exister. Je n'ai jamais regretté mon choix. » Dans la tempête émotionnelle d'alors, elle s'est accrochée à cette phrase de Paul Ricoeur : «Pour aller à la rencontre d'un autre que soi, il faut avoir un soi. »    

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Commentaires 2
à écrit le 04/06/2014 à 21:41
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tres beau reportage, tres belle personne ......

à écrit le 03/06/2014 à 23:11
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Une belle personne. Un beau chemin. Une belle dirigeante d'entreprise. Merci de ce témoignage

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