Refuser la banalisation du malheur

Le fondateur d'Habitat et humanisme s'interroge sur la question de l'engagement et sur celle de la prise de position estimant qu'il y a de "ces situations qui ne peuvent nous laisser indifférents, sauf à devenir étrangers non seulement au malheur de l'autre, mais aussi à sa propre humanité", écrit Bernard Devert.

L'éthique ne condamne pas, elle réveille pour comprendre que l'homme ne l'est vraiment que s'il s'insurge contre les causes de déshumanisation. Il est de ces situations qui ne peuvent nous laisser indifférents, sauf à devenir étrangers non seulement au malheur de l'autre, mais aussi à sa propre humanité.

 Un des combats majeurs est de refuser la banalisation du malheur. L'indifférence est destructrice de l'humain. « L'intranquillité » ne serait-elle pas la seule attitude humaine acceptable, aux fins de demeurer vigilants à cette nécessité de changer et faire changer ce qui peut et doit l'être. Cette perspective ouvre le champ de la pensée et de l'action. L'étroitesse abîme.

Toute réduction est une mutilation.

Quelle écoute avons-nous de cette part manquante de l'autre. N'est-elle pas une chance pour se protéger de ces raisonnements qui font céder notre humanité au nom du raisonnable, reportant sine die des décisions dont l'absence taraude l'espoir.

Bien des argumentations, pour ne point s'éprouver avec discernement, rendent sourds les craquements de l'âme, se révélant pourtant des appels à une liberté intérieure.

Une des terreurs qui nous tient, et à laquelle nous tenons plus que nous le croyons, est de veiller à ne point se tromper pour ne pas être trompés. Vouloir tout comprendre avant d'entreprendre est le plus sûr moyen de substituer au pouvoir d'agir, celui de la velléité.

Notre civilisation laisse présager « l'homme réparé » pour être prolongé. La durée, comme désir de puissance, n'est pas sans analogie avec les bâtisseurs de la tour de Babel.

Yuval Noah Harari, auteur du Livre Une brève histoire de l'avenir, affirme qu'est commencé pour l'homme le temps du passage de l'homo-sapiens à l'homo-deus, pour être désormais en capacité de fabriquer du vivant.

Seulement, Dieu ne fabrique pas, Il crée et ne cesse de créer pour que l'homme devienne créateur. Le risque ne serait-il pas de vouloir posséder cette création pour la réduire à notre image, celle précisément de fabricant.

Vivre, ce n'est pas seulement être en capacité de faire circuler à l'infini l'information, selon Harari, mais ne serait-ce pas reconnaître une Parole qui, pour nous décentrer de nous-mêmes, nous fait naître à ce que nous sommes appelés à devenir.

Alors s'éveille ce moment où l'on comprend que grandir en humanité, c'est se confronter à cette question : qu'est-ce-que l'homme.

Le Fils de l'homme nous accompagne sur ce chemin pour nous en faire saisir le sens comme orientation mais aussi comme densité offrant à l'existence une intensité pour réconcilier temps et éternité.

Un proverbe demande d'attendre le soir pour dire si le jour fut beau. Il l'est si nous avons pu écouter cette voix intérieure rappelant souvent l'idéal de notre jeunesse. La nuit qui vient alors n'est plus celle des ténèbres pour être auréolée de ce service diaphane d'une humilité qui signe l'humanité.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.