Transhumanisme : quelle humanité pour demain ?

Le vieux rêve d'augmenter les capacités humaines existe aujourd'hui sous des formes, réelles et actives dans notre société ultra connectée. A travers l'intelligence artificielle, la génétique ou la robotique, des projets transhumanistes émergent. Ces sujets repris par la Science-fiction ne sont pas que du domaine de la littérature et interrogent les fondements de nos sociétés.

En 1999 Peter Sloterdijk, Philosophe allemand a écrit un livre très provocateur : « Règles pour le parc humain » ...Ce livre a suscité beaucoup de réactions ! Certaines très négatives et d'autres au contraire très positives.

La société dite civilisée serait un parc humain dirigé par des élites qui sont les gardiens des troupeaux. Pour l'auteur l'humanisme est né de l'Ecriture et a été diffusé par les livres, la littérature. Les livres étant condamnés par les médias de masse à une mort programmée, l'humanisme est condamné à disparaître... L'auteur suggère que les élites doivent dresser les troupeaux par de nouvelles techniques, qu'il appelle « anthropotechniques » capables de faire une sélection d'une espèce plus apte à vivre en société, du fait que le livre, l'outil majeur de l'Humanisme a disparu ...Pour l'auteur la fin de la lecture va entraîner la désocialisation des humains...

Les projets transhumanistes se multiplient

Ce livre controversé a le mérite de poser de manière crue la question de toute une idéologie en marche depuis un certain temps qui conduit au courant du post humain.
Si l'on regarde aujourd'hui la nature des grands projets en innovation technologique, intelligence artificielle, génétique, l'engouement phénoménal pour la robotique à travers le monde on peut se poser à juste titre un certain nombre de questions... Le vieux rêve d'augmenter les capacités humaines : l'intelligence, la force, la puissance a traversé l'histoire de la mythologie grecque aux nouvelles technologies. Il est aujourd'hui présent, il prend d'autres formes, beaucoup plus réelles et actives dans notre société, cyber société, ultra connectée !

On peut sourire de tout ceci, cependant de très grandes institutions scientifiques du type MIT, technologiques publiques et privées dans de grands pays : USA, Japon, Chine, Russie, France, Allemagne... sont sur de projets très lourds que l'on pourrait qualifiés de type « transhumaniste ». Car en effet leur objectif est de rendre apparemment l'homme plus en intelligent en transformant sans cesse ses capacités cognitives, mentales, en pratiquant des extensions de sa mémoire et en éradiquant toute émotion...notamment dans les projets réalisés au Japon.

Des connexions neuronales uploadées

Le concept de cyborg : interfaçage entre le biologique et l'humain est au cœur des débats et des projets d'un grand nombre de recherches. Un certain nombre de travaux sur l'intelligence artificielle et les nanotechnologies ont en commun cet objectif de type CYBORG, au-delà de cette visée, une autre intention est en voie de développement le UPLOADING. Vous savez quand vous envoyez un fichier vers d'autres... Autrement dit, il s'agit ici de cartographier les connexions neuronales d'un individu qui seront uploadées vers un ordinateur ou un robot. La conscience enregistrée pourrait être ainsi implantée dans un nouveau corps, celui d'un robot, ou dans un corps virtuel...une conscience devenue logicielle pourrait ensuite subir toutes sortes d'interventions et donc aussi d'altérations... ?

Un supra cerveau ?

« Dans un véritable futur post-humain, les identités pourraient se dissoudre complétement, et le monde apparaître comme une fusion d'économie super liquide et d'intelligence artificielle distribuée » Sasha Chilenskoi.

L'idée d'un supra cerveau capable de transcender les imperfections de l'homme est présente dans beaucoup d'écrits d'auteurs qui viennent du monde de la technologie, surtout de l'informatique.

Marvin Minsky est le co-fondateur du groupe IA du MIT est un des prestigieux leaders de cette approche transhumaniste. Vernon Vinge est à l'origine du concept de singularité technologique, Ray Kurzweil, l'inventeur des synthétiseurs, a réalisé des systèmes d'intelligence artificielle de reconnaissance de la voix et des formes est un des plus fervent porte-parole de la thèse transhumaniste.ii Ces sujets repris par la Science-fiction ne sont pas que du domaine de la littérature.

Les machines façonnent directement ou indirectement notre pensée

Une entreprise australienne travaille aujourd'hui sur un casque destiné aux jeux vidéo capable de capter les intentions des joueurs et de contrôler l'action par la pensée.
Ces grands cerveaux ont contribué à influencer aujourd'hui une forme de pensée et d'idéologie. Les grandes réussites des personnalités comme Bill Gates et Steve Jobs sont devenues des références incontestables et vénérées, les nouveaux dieux du XXe et XXI siècle... en même temps ces deux derniers ont fait le choix de mettre leurs enfants dans des établissements scolaires dépourvus de toutes les nouveautés technologiques !...
Tout çà pour dire que l'ère des Big Data, de l'apprentissage par les systèmes informatiques de plus en plus sophistiqués nous amènent petit à petit à penser nos rapports sociaux et humains à travers des machines de plus en plus complexes qui façonnent directement ou indirectement notre propre façon de travailler, de penser, de communiquer, de réduire tout ce qui peut sembler de l'ordre du superflu, du non efficace, du non programmable, du non global...

Connaître est-ce apprendre ?

Gardons les opportunités fantastiques de communiquer à distance sans nous faire piéger par nos virtuelles relations, d'ouvrir l'accès à plus de connaissances partagées, l'apprentissage c'est aussi une affaire de liens en temps réel, de partage des émotions, d'empathie avec les autres. Réduisons vraiment nous les inégalités face au savoir grâce aux nouvelles technologies ? N'y a-t-il pas de décrochage de l'apprentissage via un MOOC par exemple, quand on est pas un « pro » de l'utilisation informatique, et quand on est en grande difficulté de compréhension, ou tout simplement que l'on a besoin d'une relation de plus grande proximité, au-delà d'un interface à distance, de la captation de connaissances, et que tout va très vite ? Connaître est-ce apprendre ? Dialoguer avec les autres via des systèmes interactifs, vidéo, chat, plates-formes et autres est-ce suffisant pour capitaliser, vivre, modéliser les expériences de chacun ?

Prendre plus de recul

Notre capacité à être émotionnellement en lien c'est ce qui nous caractérise d'abord et avant tout en tant qu'humain. Peut-être pourrions-nous prendre plus de recul pour appréhender les impacts potentiels et aussi déjà bien réels produits par cette culture technologique dévorante, et laisser l'espace à la rencontre, à l'informelle et au non programmable. Si l'innovation c'était aussi de renforcer notre capacité à rebondir ensemble collectivement et de façon plus humaine ?

Garder le meilleur et se prémunir avec intelligence « naturelle » et humanité du pire... Si nous faisions aussi la promotion de nos forces intrinsèques : le respect, la bienveillance, la joie de se retrouver dans la proximité, de créer des opportunités de partages vivants.

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