Syriza : des constats partagés mais des décisions qui interrogent

Même si le parti de Aléxis Tsípras n'appartient pas à notre famille politique, les axes qu'il défend relèvent partiellement d’une analyse partagée par notre groupe Socialistes et Démocrates au Parlement européen. Ce qui n'empêche pas de s'interroger sur certains choix fait par Syriza.

Comme socialiste française et européenne, je sais bien que Syriza n'appartient pas exactement à ma famille politique. Mais pour autant, j'exprime des vœux de succès à cette formation de la gauche grecque et je veux envoyer un message de compréhension et d'encouragement aux Grecs. Je suis heureuse que cet exercice démocratique à haut risque se solde par un changement qui est une demande de réorientation de l'Europe.

La plupart des partis politiques grecs traditionnels sont aujourd'hui laminés par la crise en ce sens qu'ils n'incarnent plus l'avenir de la Grèce. Ils ont adopté et relayé -parfois avec une grande brutalité comme c'est le cas avec les conservateurs- une médecine de cheval préconisée par la Troïka, qui est en train de tuer le malade. Syriza a compris le désarroi des Grecs qui ont vu en lui et son leader Alexis Tsipras un espoir de changement dans le pays et en Europe.

 Principe de réalité

Ce parti est positionné à l'extrême gauche et il va devoir gouverner, se confronter au principe de réalité en passant de l'opposition à l'exercice du pouvoir. Il s'y prépare depuis des mois déjà et a infléchi son discours car il sait que les électeurs attendent des résultats concrets et pas seulement des promesses exaltées. S'il arrive à maintenir le cap entre convictions fortes et sens des responsabilités, nos positions pourront se rapprocher.

Les quatre axes de la politique que souhaite mener Alexis Tsipras relèvent d'une analyse que notre groupe des Socialistes et Démocrates du Parlement européen a déjà notablement fait avancer avec quelques succès.

Il souhaite conditionner le remboursement de la dette à l'évolution du PIB. Cela signifie qu'il entend l'honorer mais avec des aménagements. Au sein du groupe S & D, nous avons dit à de multiples reprises combien le pacte de stabilité devait être ajusté aux circonstances et ne pas s'appliquer au nom de l'orthodoxie néo libérale. Dans l'état actuel de la Grèce, lui imposer ce rythme de remboursement revient à lui maintenir la tête sous l'eau - tout en lui disant qu'on veut la secourir. Les modalités sont bien sûr à discuter car elles engagent tous les européens et notamment les contribuables français.

 L'Europe fait partie de la solution

Alexis Tsipras a également un programme de réformes structurelles, en particulier dans la lutte contre la fraude fiscale et la corruption. On ne peut qu'être d'accord et il a du pain sur la planche en Grèce ! Il souhaite relancer l'investissement sans creuser les déficits. Il considère que le plan Juncker est insuffisant : nous sommes d'accord, mais nous, nous encourageons ce pas dans la bonne direction. Il en appelle à la Banque européenne d'investissement, qui est effectivement un outil sous-utilisé.

Je retiens donc que pour lui, l'Europe fait partie de la solution et pas seulement des problèmes. Enfin il souhaite gérer la crise humanitaire qui a été créée par la terrible austérité de ces dernières années. Quelques erreurs qu'ait pu commettre la classe politique grecque, la population n'a pas ce qu'elle endure aujourd'hui. Rappelons que 25 % des grecs vivent en dessous du seuil de pauvreté.

Des interrogations lourdes

Si nous n'avons pas d'ostracisme, nous avons pourtant des interrogations lourdes. Les résultats de dimanche n'ont pas donné la majorité absolue à Syriza qui a dû trouver des alliés. Parmi les deux pressentis, To Potami, parti centriste pro-européen mais partageant les thèses de Syriza sur la renégociation de la dette s'est vu préférer les Grecs indépendants (AN.EL.), le parti fondé par Panos Kammenos, dissident des conservateurs, souverainiste, populiste, anti européen. Il peut être comparé à Nicolas Dupont-Aignan pour le discours, avec en plus, une réputation d'affairiste douteux, raciste et homophobe.

Cette hypothèse semblait dans les tuyaux depuis longtemps ; je la découvre, avec le sentiment que le « pragmatisme » a présidé à la décision. Mais Alexis Tsipras devra se garder des manches de râteaux politiques ! Autre déconvenue : alors que la composition du gouvernement est annoncée, on apprend qu'il n'y a aucune femme ministre. En incluant les vice-ministres et secrétaires d'État, il compterait une quarantaine de membres, dont sept femmes. On est donc loin de la parité... J'espère donc que d'autres signes, plus encourageants, seront donnés dans les prochains jours.

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Commentaire 1
à écrit le 29/01/2015 à 21:50
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Bonjour, combien y avait il de femme dans les précédents gouvernements Socialistes, puis ND, puis ND/socialistes? Pouvez vous nous le précisez?

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