Honk Kong : Pékin coincée entre le marteau et l'enclume

La remise en question par Pékin du principe "un État, deux systèmes" a précipité les jeunes de Honk Kong dans les rues. Face à cette très médiatique "révolution des parapluies", la Chine hésite à réprimer durement. Le souvenir de Tian Anmen et ses conséquences sont encore très présents. Mais le mouvement en cours interroge aussi sur l’influence déclinante d’Honk Kong en Asie.

25 ans plus tard, des étudiants chinois sont de nouveau engagés dans un mouvement qui les conduit à opposer un sit in de longue durée face au pouvoir de Pékin. Pourtant, les choses sont bien différentes au départ. Sur la place Tian Anmen, les étudiants se battaient au départ contre la corruption. La "déesse de la Démocratie" n'est apparue que plus tard, parce qu'il fallait rendre ce mouvement médiatisable aux yeux de l'étranger.  
A Hong Kong, c'est une promesse trahie qui jette les jeunes dans la rue. "Un pays deux systèmes", cela voulait dire l'élection démocratique d'un exécutif local.

Un mouvement d'ampleur

Aujourd'hui, Pékin veut imposer ses candidats, ce qui s'ajoute à une série de petites contraintes distillées depuis des années et fait déborder le vase. Et, face à un premier mouvement de protestation, le gouverneur local n'a rien trouvé d'autre que d'envoyer une police brutale. En réaction, ce qui aurait pu n'être qu'un "mouvement étudiant" éphémère est en train de prendre de l'ampleur tout en ayant une identité aussi particulière que celle du territoire.

Il faut d'abord comprendre que Hong Kong n'est pas une entité comme les autres. Ce territoire, qui n'a jamais été un état nation, est un concentré de contradictions. Avec seulement 7 millions de résidents, son poids économique, financier, sa visibilité sont surdimensionnés. On y croise aussi bien l'hyper richesse que les Triades, et une classe moyenne relativement aisée et très éduquée côtoie le sous-prolétariat. Le tout tournant en rond dans un enclos où vivent 6500 habitants par km².

Visibilité mondiale

Le mouvement en cours actuellement pose autant de problèmes à Pékin qu'au futur de Hong Kong. Pour la capitale chinoise, le refus d'élections "sous tutelle" n'est qu'une partie du problème. Tous les "désordres sociaux", surtout s'ils sont le fait de Chinois, sont inacceptables, où qu'ils se produisent. Ils remettent en cause la légitimité du pouvoir et, par cela même, ils présentent un risque inacceptable et cela justifie toutes les mesures destinées à éviter une éventuelle contagion. Mais la visibilité mondiale de ce qui se passe aujourd'hui à Hong Kong est telle qu'il n'est pas possible d'envisager une répression brutale. La Chine a trop souffert de l'après Tian Anmen pour prendre le risque de le revivre.

Xi Jinping est donc contraint de privilégier une sortie de crise non violente, ce qui ne veut pas dire que des moyens de pression extrêmes sur certains individus ne sont pas exclus, tant qu'ils restent discrets. On peut aussi sacrifier un "gouverneur" qui n'a pas su gérer le mouvement et faire quelques concessions et promesses, sur lesquelles on pourra toujours revenir. Il sera aussi nécessaire de diviser les manifestants, provoquer des incivismes et discréditer certains protestataires.

Une influence en déclin

Mais c'est pour Hong Kong que ce mouvement est important. Economiquement, la cité est presque totalement dépendante de l'usine du monde, à laquelle elle sert d'interface vis-à-vis de l'extérieur. Mais ce rôle diminue, et ce n'est pas seulement parce que Pékin le veut ainsi. Ce qui était un point d'entrée privilégié pour faire des affaires en Chine ne l'est plus autant. Ce n'est plus non plus un point de passage obligé pour se rendre à Taiwan ou dans le Sud de la Chine. Quant au rôle d'entrepôt qui avait fait une très grande part de la richesse du territoire, il s'étiole, parce qu'Alibaba.com est capable de gérer en direct la distribution des produits des zones économiques spéciales. Même si la Bourse de Hong Kong, son système bancaire, son rôle de pôle financier demeurent importants, la ville est de moins en moins incontournable et toute perte de stabilité accélère ce déclin. Il est évident que les plus riches, mais aussi tous les investisseurs et entrepreneurs du territoire, craignent d'éventuelles conséquences du mouvement de protestation, même s'ils en sont moralement proches.

Le risque d'une radicalisation ?

On a aussi parlé plus haut de la visibilité de Hong Kong. Pratiquement 10 % des résidents sont des étrangers. Le prolétariat philippin ou vietnamien n'a pas une grande importance dans les relations internationales, mais, sur les bords de la Mer de Chine du Sud, les sensibilités sont différentes. Il y a aussi sur place de nombreux ressortissants des pays riches, Britanniques, mais aussi Etasuniens, Japonais et autres Européens. Les évènements de Tian AnMen n'avaient pas fait courir de risques aux -relativement rares à l'époque- ressortissants de ces pays. Il pourrait en être tout à fait autre chose à Hong Kong, tant les imbrications sont grandes.

Le mouvement, qui était très pacifiste malgré les violences policières, semble se radicaliser par certains côtés, avec un ultimatum pour obtenir la démission d'un gouverneur déconsidéré par toutes les parties, mais aussi la menace d'occupation de lieux de pouvoir. Pékin ne peut accepter cette évolution, mais aurait tout à perdre aux yeux du monde s'il ne trouvait que la violence à y opposer.

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Commentaires 6
à écrit le 06/10/2014 à 3:38
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Bonjour, attention à la faute dans le titre et le paragraphe en gras, c'est Hong Kong et non Honk Kong. Merci.

à écrit le 05/10/2014 à 5:32
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Pour rappel : les premiers accrochages physiques ont été déclenchés par les étudiants pacifiques qui ont tenté de forcer pacifiquement un cordon de police pour envahir pacifiquement un édifice gouvernemental. Non mais vous imaginez les forces de l'o...

à écrit le 04/10/2014 à 10:53
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il faut donner une belle leçon aux Chinechines militaristes et impérialistes. A bas le parti comuniste Chinechinbe. Vive la révolution estidiantine. Bravo les valeureux Hongkongis En avant jusqu'à la victoire finale!!!

à écrit le 04/10/2014 à 9:43
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Qui remet en question "un État, deux systèmes" ? Pékin vraiment ? S'agit-il réellement de "démocratie " ou de partition géopolitique ? Un acteur est absent de cette présentation ce sont les USA, et la Chine refusera toujours de revenir à un traité...

à écrit le 03/10/2014 à 22:53
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Et pendant ce temps là en Thaïlande...

à écrit le 03/10/2014 à 19:29
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Verrons-nous un jour une "révolution colorée" aux États-Unis ? et comment vont-ils réagir les médias aux ordres occidentaux ?

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