Une rentrée qui en soit vraiment une

L'actualité est au diapason des orages récurrents de cet été où d'aucuns se demandent, pour reprendre le titre du film de Philippe de Chauveron, qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu. Seul, le cinéma triomphe pour avoir dépassé les 11 millions d'entrées. En revanche, l'entrée dans un monde qui a changé ne semble pas se dessiner.

Ne serions-nous pas paralysés par l'explosion du transfert d'activités d'un bout à l'autre du monde, d'une financiarisation de l'économie et d'expertises dont les scenarii contradictoires oscillent entre "la fin d'une histoire"  de Francis Fukuyama) et l'espoir de réguler les crises pour en sortir à moindre frais.

Un grave désenchantement

Les faits montrent que les oukases ne changent pas le réel tant il est complexe ; l'heure est celle d'un grave désenchantement que les commémorations de cet été atténuent, le temps de la mémoire soulignant que l'esprit et la force de la volonté récusent la promesse du pire.

Il ne s'agit pas de faire des arrêts sur image mais plutôt de s'inscrire dans un acte de création rappelant - pour rester dans le temps, fût-il maussade - que mars préparant en secret le printemps lui offre un 'déjà-là'.

Ce "déjà-là" est celui né d'actes de résistance pour dire non à la déshumanisation qu'entraînent les guerres, notamment celle, jamais déclarée, d'une économie qui n'en est pas moins violente pour entraîner l'exode de millions de chômeurs en recherche d'un travail et l'exil pour ceux qui, lassés de trop de refus, perdent cœur. La courbe du chômage ne s'infléchit point mais en revanche fait courber bien des foyers.

Une cécité partagée

Le front sur lequel nous sommes est celui de terrains qui demeurent en friche, pour ne point faire surgir en nombre un habitat de cohésion sociale, libéré enfin de ces stigmatisations qui déjà préparent de nouveaux conflits.

La crise, l'expression est retenue même si elle n'est pas exacte, fait apparaître une cécité partagée comme si nous nous ne voulions pas voir que 600 000 enfants sont victimes deux fois du mal logement : un présent abîmé et un avenir compromis.

Les statistiques voilent pudiquement le réel alors qu'elles disent sans fard le donné d'une situation. Habitués à les entendre, nous n'habitons point le drame qu'elles soulignent même si, ici et là, des velléités d'indignations se manifestent pour ne point désespérer de ce que nous sommes. Le palliatif social ne nous sauverait-il pas de nous-mêmes, laissant dans des abîmes les plus vulnérables. Quand comprendrons-nous que le sujet n'est pas de s'indigner mais d'éradiquer ce qui est indigne.

Le logement reste oublié

La rentrée s'affiche difficile sur le plan politique, économique et social ; elle le sera bien sûr pour les plus fragilisés. Souvenons-nous de l'expression si juste de la philosophe Simone Weil : "Ce n'est pas le chemin qui est difficile, mais le difficile qui est le chemin". La Nation doit s'interroger sur ce chemin qu'il n'est pas possible de déserter. Alors, pourquoi malgré bien des voix autorisées, le mal-logement n'a-t-il jamais été reconnu comme une grande cause nationale.

Pourquoi le logement est-il un enjeu politique oublié à la veille des élections, chacun saisissant avec crainte que prendre la question à bras le corps, c'est se mettre à distance des idées toutes faites, convenues à l'égard de ceux touchés par la grande pauvreté.Qui ne voit pas le drame des taudis, de ces 'machines à loger' concentrant la misère avec comme corollaire une carte scolaire brisant l'égalité des chances. Faut-il le surgissement des émeutes pour voir clair ?

La Société est à la recherche d'un souffle ; offrons-lui celui de bâtir une fraternité, dans cette perspective de construire pour servir la cause de ceux oubliés, méprisés au point de n'avoir point de toit.

Deux propositions :

  • 1. Le développement de l'épargne solidaire accompagnée d'une mobilisation de l'Investissement Social Responsable (ISR), observant - tout n'est pas sombre - l'intérêt que la finance solidaire suscite pour favoriser une économie où l'homme est enfin reconnu.
    Le démembrement de la propriété est une des clés pour atténuer le mal logement.
    Créons des foncières pour l'acquisition de tènements remis en usufruit à des bailleurs sociaux et associatifs, facilitant à coût maîtrisé la réalisation de programmes pour ceux qui, en raison d'un indigne 'reste pour vivre', sont éloignés - c'est un comble - du logement.
    La fiscalité liée au démembrement de la propriété et à la finance solidaire doit impérativement s'inscrire dans la durée pour entraîner la mobilisation nécessaire afin que chacun ait un toit.
  • 2. L'aménagement du territoire revu avec la création des nouvelles Régions.
    Personne ne peut dire je ne sais pas que des centaines de milliers de logements sont inoccupés dans les villes moyennes. Les métropoles, plus riches quant à l'emploi, bâtissent paradoxalement les ruptures de cohésion sociale ; les rentes foncières conduisent à l'étalement des constructions, cause de l'éloignement des plus fragiles dans les périphéries.

L'ouverture n'est jamais d'évidence ; il faut non seulement la volonté de la construire mais aussi le courage de l'assumer pour mettre au pas les logiques du court terme.

Ne soyons pas victimes d'une illusion que les mots entretiennent, répétant à l'envi un développement durable. Sommes-nous bien décidés pour ce faire à briser les peurs liées à la différence, entretenues pour ne point se presser de lutter contre l'indifférence, alors que le seul débat d'avenir qui vaille est celui de l'école de la fraternité pour un mieux "vivre ensemble".Travaillons à cette valeur de la République pour offrir à la démocratie le sens qui la fera durer.

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