Les dirigeants et les attentes de la "multitude"

Les clients ne sont plus une masse uniforme et passive mais une multitude. Une évolution que les entreprises du numérique ont compris. Et c'est pour cette raison qu'elles gagnent toujours à la fin. Par Nicolas Colin, expert APM, inspecteur des finances et rapporteur de la mission "Création et internet"*.

Dans l'économie fordiste, la création de valeur se fondait sur l'immobilisation d'actifs tangibles : infrastructure physique, chaînes de production, matières premières. Les règles du jeu sont différentes dans l'économie numérique. Les clients ne sont plus une masse uniforme et passive, mais une "multitude" : organisés en réseaux, rendus plus exigeants par la capacité des entreprises numériques à leur fournir des services personnalisés, ces utilisateurs sont pour les entreprises à la fois des clients et des actifs à valoriser.

Pour les entreprises traditionnelles qui cherchent à réaliser des économies d'échelles, leur obsession est de grossir et de standardiser leur offre pour diminuer leur coût marginal de production. Dans l'économie numérique, au contraire, l'enjeu est de maximiser les puissants effets de réseau rendus possibles par la connexion des utilisateurs entre eux.

Repositionner et repenser

Si les entreprises numériques gagnent toujours à la fin, c'est parce qu'elles ont compris que les utilisateurs sont devenus actifs et qu'elles ont su s'organiser pour stimuler cette activité. Afin d'évoluer, elles peuvent se repositionner et se repenser. Au fond, c'est une question de culture : plutôt qu'un dispositif centralisé considérant les utilisateurs comme une masse de clients passifs, les dirigeants doivent pouvoir adapter leurs décisions en temps réel aux attentes de la multitude, pour mieux l'enrôler dans la chaîne de valeur de l'entreprise. C'est une opportunité plus qu'une menace : dans un secteur encore structuré de manière traditionnelle, adopter une approche plus numérique peut être un avantage décisif. Il ne s'agit pas de planifier une « stratégie numérique » à la marge du cœur de métier de l'entreprise, mais de transformer l'entreprise pour mieux s'allier avec la multitude.

* Auteur de L'âge de la multitude, entreprendre et gouverner après la révolution numérique (Armand Colin, 2012).

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